La Belgique franchit un cap vers la reconnaissance de la Palestine

Gaza
Distribution de nourriture à Gaza, le 3 août 2025. © Hassan Jedi/Anadolu via Getty Images
Vincent Genot
Vincent Genot Coordinateur online news

Le Conseil ministériel restreint a adopté  un ensemble de mesures qui témoignent d’un tournant dans la politique belge au Moyen-Orient. En se félicitant de cet accord, le ministre des Affaires étrangères, Maxime Prévot, souligne la volonté du gouvernement de conjuguer pression diplomatique, sanctions ciblées et aide humanitaire accrue.

L’accord insiste sur la gravité de la situation humanitaire à Gaza et met en avant le devoir de prévenir tout risque de génocide. Mais derrière cette approche juridique et humanitaire se dessine une stratégie politique assumée : accroître la pression à la fois sur le gouvernement israélien et sur les terroristes du Hamas, tout en maintenant ouverte la perspective d’une solution à deux États.

Les mesures unilatérales décidées par la Belgique vont au-delà de l’aide humanitaire. Interdiction d’importation des produits issus des colonies, embargo sur les biens militaires et à double usage, limitation des services consulaires aux Belges vivant dans les colonies : autant de décisions marquées par la volonté de traduire le droit international en actes.

La Belgique franchit également une étape politique sensible en déclarant personae non gratae sur son territoire non seulement des colons violents et des membres du Hamas, mais aussi les ministres israéliens Itamar Ben-Gvir et Bezalel Smotrich. Ces décisions visent à « accroître la pression » sur les deux parties du conflit.

Cependant, le communiqué du gouvernement souligne à plusieurs reprises que nombre de mesures ne peuvent produire leur plein effet qu’au niveau européen : suspension des accords commerciaux et technologiques avec Israël, restrictions de coopération en matière de sécurité et de recherche, sanctions renforcées contre l’Iran et inscription du Hezbollah dans son ensemble sur la liste des organisations terroristes. L’action belge apparaît donc ambitieuse mais dépendante de dynamiques collectives.

La reconnaissance palestinienne : un signal politique, mais différé

L’autre axe majeur du texte réside dans la reconnaissance de l’État palestinien. La Belgique rejoint la « New York Declaration » et s’associe à l’initiative de la France et de l’Arabie saoudite. Mais cette reconnaissance est conditionnée : elle ne sera formalisée par arrêté royal qu’une fois les otages israéliens libérés et le Hamas écarté de la gestion politique.

Cette posture illustre un double souci. D’une part, envoyer un signal diplomatique en faveur du droit des peuples à l’autodétermination, sans que cela ne puisse être interprété comme une « récompense » au Hamas. D’autre part, poser des garde-fous afin de préserver la sécurité des Israéliens et d’assurer une autorité politique palestinienne renouvelée, issue d’élections démocratiques.

La Belgique affirme ainsi qu’elle ouvrira une ambassade et établira des relations diplomatiques complètes avec la Palestine, mais seulement si les objectifs de la Déclaration de New York – démilitarisation du Hamas et renouvellement politique – sont atteints.

Reconstruction et projection internationale

Le texte se projette également vers l’après-conflit. La Belgique souhaite soutenir la reconstruction de la Palestine en mettant à disposition son expertise institutionnelle et en poursuivant son appui à l’United Nations Relief and Works Agency for Palestine Refugees in the Near East (UNRWA). Elle plaide aussi pour que la Palestine soit reconnue par le FMI et la Banque mondiale, afin d’accéder aux financements internationaux nécessaires.

Enfin, le gouvernement belge insiste sur son rôle moteur dans les forums internationaux et sur son attachement à des principes universels : respect du droit international, condamnation des violations, protection des diplomates et fonctionnaires internationaux, défense de la liberté de la presse.

Une politique entre principe et pragmatisme

Si la position du gouvernement belge affirme la fermeté de la Belgique face aux violations du droit international et prépare une reconnaissance palestinienne soigneusement conditionnée, elle révèle aussi une constante : l’efficacité de ces mesures dépendra largement de leur relais européen et international. La Belgique entend être un moteur, mais son action reste étroitement liée aux dynamiques collectives.

Le gouvernement flamand s’accorde à son tour
Peu de temps après le gouvernement fédéral, le gouvernement flamand, réuni en comité ministériel restreint, s’est accordé dans la nuit de lundi à mardi sur des sanctions visant Israël.
Le ministre-président flamand, Matthias Diependaele (N-VA), n’a rien voulu dire aux journalistes présents sur les contours précis de l’accord, obtenu vers 1h30 du matin. “Nous choisissons le camp des victimes innocentes, du droit international et de la paix. Nous allons prendre des mesures appropriées en ce sens”, a tout de même déclaré Matthias Diependaele, disant vouloir réserver la primeur de l’accord au reste du gouvernement flamand qui en sera informé avant la commission flamande des Relations extérieures. “C’est un signal très clair à Israël, aux deux parties belligérantes”, a encore ajouté le ministre-président flamand. Sur la question de la reconnaissance d’un État palestinien, le ministre-président flamand a laissé entendre que la ligne adoptée au niveau fédéral serait suivie.

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