La BCE ne s’inquiète pas trop de la situation française

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Pierre-Henri Thomas
Pierre-Henri Thomas Journaliste

Le conseil des gouverneurs de la Banque centrale européenne a, sans grande surprise, décidé de ne pas toucher aux taux directeurs de l’euro. Et il reste muet sur la situation française, officiellement du moins.

La BCE a décidé ce jeudi de laisser ses taux inchangés. La raison de ce statu quo est que, désormais, l’inflation s’est stabilisée : la hausse des prix à la consommation « se situe actuellement autour de l’objectif à moyen terme de 2 % et l’évaluation, par le Conseil des gouverneurs, des perspectives d’inflation est globalement inchangée », dit la BCE. Les projections d’inflation restent stables, elles aussi : la BCE prévoit 2,1 % en 2025, 1,7 % l’an prochain et 1,9 % en 2027.

La présidente de la BCE, Christine Lagarde, a répété ce qu’elle avait déjà dit précédemment : la banque centrale est bien positionnée. Le trio de taux directeurs reste donc au même niveau : le taux d’intérêt de la facilité de dépôt à 2%, le taux des opérations principales de refinancement à 2,15% et celui de la facilité de prêt marginal à 2,40%.

Préoccupant, ou non ?

Mais les questions les plus sensibles, lors de la conférence de presse, concernaient bien évidemment la situation française. Christine Lagarde a répété le principe général : l’institution ne commente pas la situation précise d’un pays particulier. Mais elle a voulu adresser un message rassurant, plus rassurant que ce qu’elle avait déclaré sur une radio française la semaine dernière, quand elle avait indiqué : « Tous les risques de chute de gouvernements dans tous les pays de la zone euro sont préoccupants ».

« Nous ne portons pas de jugement sur un pays en particulier, a dit Christine Lagarde ce jeudi. Mais je dirais que je suis confiante dans le fait que les décideurs politiques, ceux qui prennent les décisions, prendront à cœur, en cette période d’incertitude, de réduire cette incertitude autant que possible. Il existe aussi un ensemble de règles concernant la gouvernance et le cadre budgétaires qui sont les règles internes des pays européens. Les États membres doivent s’y conformer et agir en conséquence. Je suis sûre que tous les gouvernements, où qu’ils soient, voudront opérer sur la base de ce cadre budgétaire. »

Un outil anti-crise

C’est sans doute une manière indirecte de dire aux partis politiques qui voudraient s’écarter de la route fixée par l’Europe et qui consiste, pour des pays trop endettés, de revenir dans le droit chemin en sept ans au maximum, qu’emprunter cette voie ne sera pas soutenu par les instances européennes.

Il n’y a pour l’instant pas de crise de la dette française. Mais pour contrer le scénario purement hypothétique où les taux français flamberaient et entraîneraient la dette du pays dans un effet boule de neige, la BCE a mis en place en 2022 un nouvel outil, baptisé TPI (Instrument de protection de la transmission). Cet outil lui permet d’acheter des obligations souveraines d’un État de la zone euro sur le marché secondaire afin d’éviter la fragmentation de la zone. Cet outil peut être activé si jamais les coûts d’emprunt d’un État augmentaient de façon disproportionnée.

Alors, a-t-on discuté d’une activation du TPI ce jeudi pour la France ? Non, répond Christine Lagarde. « Le TPI n’a pas été discuté du tout lors du conseil des gouverneurs », dit-elle.

On peut toutefois penser que la thématique était quand même un peu présente à l’esprit des gouverneurs. Le communiqué publié par la BCE en fait en effet mention, rappelant que « l’instrument de protection de la transmission (TPI) est disponible pour lutter contre une dynamique de marché injustifiée, désordonnée qui représente une menace grave pour la transmission de la politique monétaire à l’ensemble des pays de la zone euro, ce qui permettra au Conseil des gouverneurs de remplir plus efficacement son mandat de maintien de la stabilité des prix ». Une manière d’avertir les marchés de ne pas songer à spéculer contre la dette française, car ils s’en mordraient les doigts.

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