Guerre commerciale: Pékin accuse l’UE de discrimination
La Chine accuse l’Union européenne de pratiques commerciales injustes via son Règlement sur les subventions étrangères (FSR). Pékin déplore un traitement défavorable de ses entreprises, tandis que Bruxelles rejette ces allégations, exacerbant les tensions commerciales entre les deux blocs.
La Chine a indiqué jeudi que son enquête sur la mise en œuvre par l’Union européenne du Règlement sur les subventions étrangères (FSR) soumettait le pays à des barrières commerciales discriminatoires, voire “arbitraires”, des accusations rejetées par Bruxelles.
Les produits chinois sont soumis à un traitement “plus défavorable” que les produits provenant de pays tiers, a souligné le ministère du Commerce chinois. Pékin avait annoncé en juillet enquêter sur des pratiques commerciales jugées déloyales de l’Union européenne (UE), après une série de procédures de Bruxelles visant des entreprises chinoises soupçonnées de fausser la concurrence.
Le ministère du Commerce chinois a déclaré en être venu à la conclusion que la mise en œuvre du FSR était discriminatoire à l’égard des entreprises chinoises et “constituait des obstacles au commerce et à l’investissement”. Selon lui, le règlement dispose de critères “vagues”, ce qui fait peser sur les entreprises ciblées “beaucoup d’incertitude” et une “lourde charge”.
Le FSR est “pleinement conforme à toutes les règles applicables de l’UE et de l’Organisation mondiale du commerce”, a répliqué dans un communiqué un porte-parole de la Commission européenne.
“Toutes les entreprises (…) sont soumises à ces règles”, indépendamment de la localisation de leur siège et quelle que soit leur nationalité, a-t-il poursuivi. “C’est également le cas lorsqu’il s’agit d’appliquer les règles en matière d’aides d’État ou de règles antitrusts”, a-t-il ajouté.
Le ministère a également critiqué, dans ce document de 20 pages détaillant ses conclusions, des inspections surprises “qui ont largement dépassé les limites nécessaires” et le comportement d’enquêteurs qualifiés de “subjectifs et arbitraires”.
Les entreprises qui ne se conforment pas à ces inspections risquent des “sanctions sévères”, source de “pression énorme”.
Surtaxes douanières
Le ministère a précisé que les enquêtes de l’UE avaient contraint des entreprises chinoises à abandonner ou réduire des projets, pour des pertes chiffrées à plus de 15 milliards de yuans (près de 2 milliards d’euros).
Et qu’elles ont “nui à la compétitivité des entreprises et produits chinois sur le marché de européen”.
Le FSR de l’Union européenne est destiné à éviter que des subventions étrangères ne confèrent à leurs bénéficiaires un avantage “indu” au sein de l’UE.
La première enquête menée par l’UE dans le cadre du FSR, en février 2024, visait une filiale de la société d’Etat chinoise du rail CRRC. Elle a été close après que l’entreprise s’est retirée d’un appel d’offres en Bulgarie pour la fourniture de trains électriques.
Une autre enquête vise des fabricants de panneaux solaires chinois qui souhaitent construire et exploiter un parc photovoltaïque en Roumanie, financé en partie par des fonds européens.
Le ministère n’a pas précisé si Pékin envisageait de prendre des mesures de représailles mais fin décembre, la Chine a annoncé qu’elle prolongeait son enquête antidumping sur les importations de brandys (les eaux-de-vie à base de vin) et de cognac en provenance de l’UE.
Pékin impose depuis le 11 octobre aux importateurs de brandys européens, dont le cognac représente 95% du total, de déposer une caution ou une lettre de garantie bancaire auprès des douanes chinoises, dans le cadre d’une enquête antidumping.
Cette décision est apparue comme une mesure de représailles contre Bruxelles après que l’UE eut imposé des surtaxes douanières supplémentaires sur les véhicules électriques fabriqués en Chine et vendus dans l’UE.
Un rapport de la Chambre de commerce de l’UE en Chine a mis en garde contre le fait que les entreprises européennes y étaient contraintes de localiser radicalement leurs activités pour s’adapter aux réglementations, entraînant une augmentation des coûts et une réduction de leur performance.
Les tensions commerciales accrues et les “politiques d’autonomie” de Pékin poussent de nombreuses multinationales “à séparer certaines fonctions basées en Chine, voire des opérations entières, de celles du reste du monde”, indique le document.
Il met également en avant les règles de gouvernance de plus en plus dominées par des préoccupations de sécurité nationale.
Certains clients choisissent donc de “pécher par excès de prudence et de ne pas prendre de risque en passant par un prestataire de services étranger”, a déclaré le président de la Chambre Jens Eskelund, lors d’un événement médiatique jeudi.