France: le Conseil constitutionnel valide la réforme des retraites. Et maintenant ?
Le Conseil constitutionnel français a validé vendredi l’essentiel du projet de réforme des retraites, un des dossiers phares du second mandat d’Emmanuel Macron contre lequel syndicats, oppositions et manifestants se mobilisent depuis des mois.
Les membres du Conseil ont censuré un certain nombre d’aspects secondaires de la réforme mais n’ont pas retoqué sa principale mesure qui repousse de 62 à 64 ans l’âge légal de la retraite, selon un communiqué du Conseil.
La décision des neuf “Sages” du Conseil, gardien des institutions, ouvre la voie à l’entrée en vigueur de la loi, qu’Emmanuel Macron souhaite voir appliquée dès la rentrée.
Le Conseil a en revanche censuré sans grande surprise un certain nombre d’aspects secondaires de la réforme, et a bloqué un projet de référendum d’initiative partagée (RIP) demandé par l’opposition de gauche, qui espérait un feu vert pour entamer la collecte de 4,8 millions de signatures en vue d’une consultation des Français destinée à contrecarrer le projet du gouvernement.
La décision du Conseil est censée “clore” une séquence selon les mots d’Emmanuel Macron, qui, avant même le verdict, avait invité les syndicats à le rencontrer mardi, dans l’optique de restaurer un dialogue inexistant depuis trois mois.
L’exécutif espère pouvoir avec ce dénouement surmonter la contestation qui agite le pays depuis mi-janvier, et reprendre la marche de ce deuxième quinquennat de M. Macron sérieusement entravé dès sa première année.
Les décisions du Conseil, auxquelles le mouvement social et la classe politique étaient suspendus depuis plusieurs semaines, ne sont pas susceptibles de recours.
Et maintenant ?
Reste maintenant à savoir quelle sera la réaction des opposants à la réforme, ces centaines de milliers de personnes qui ont manifesté et fait grève à douze reprises depuis mi-janvier.
“La lutte continue”, a immédiatement déclaré le chef de la gauche radicale, Jean-Luc Mélenchon. “Le sort politique de la réforme des retraites n’est pas scellé”, a de son côté affirmé Marine Le Pen, cheffe de file de l’extrême droite française, deux fois présente au deuxième tour de l’élection présidentielle face à M. Macron.
A Paris, un rassemblement a débuté sur le parvis de l’Hôtel de Ville à l’appel de plusieurs syndicats. Plusieurs centaines de jeunes manifestaient par ailleurs dans la capitale et devraient s’y joindre en fin de journée. L’annonce a été saluée par des huées.
Quelques minutes avant l’annonce de la décision, des manifestants chantaient “constitutionnelle ou pas, cette loi, on en veut pas”, “et on ira jusqu’au retrait”, ou encore “dehors Macron et son 49.3”, en référence à l’article de la Constitution qui a permis de faire adopter la loi sur les retraites sans vote.
La police redoute des débordements. Des blocages se sont poursuivis vendredi: perturbation de la circulation autour de Rouen (ouest), blocage d’une plateforme alimentaire dans la banlieue de Strasbourg (est)…
Selon une note des services de renseignement territoriaux consultée par l’AFP, 131 actions sont attendues vendredi soir.
Retranché derrière des barrières anti-émeutes, le Conseil constitutionnel lui-même était sous bonne garde. Toute manifestation aux abords de son siège, dans une aile du Palais Royal, est interdite jusqu’à samedi matin.
La Comédie française, voisine du Conseil, a annulé ses représentations de vendredi.
L’essoufflement de la contestation était manifeste depuis plusieurs jours, et notamment lors de la 12e journée d’action jeudi. Mais la colère reste vive.
La Première ministre Elisabeth Borne a pu mesurer la grogne populaire vendredi matin. Des opposants à la réforme ont entonné “On est là”, un chant hostile, alors qu’elle visitait un supermarché dans une petite ville au sud-ouest de Paris.
La France est l’un des pays européens où l’âge de départ à la retraite est le plus bas, mais avec des systèmes très différents.
L’exécutif justifie son projet par la nécessité de répondre à la dégradation financière des caisses de retraite et au vieillissement de la population, mais les opposants le jugent “injuste”, notamment pour les femmes et les salariés aux métiers pénibles.