Faut-il s’inquiéter d’une dette mondiale dépassant les 315.000 milliards de dollars?

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Pierre-Henri Thomas
Pierre-Henri Thomas Journaliste

Une dette qui a grimpé de près de 100.000 milliards en huit ans, alimentée par la pandémie et ses effets.

Avant les vacances d’été, l’Institute for International Finance (IIF), l’association qui regroupe les grands établissements financiers, a annoncé que l’endettement mondial avait atteint, à l’issue du premier trimestre de cette année, le montant faramineux de 315.000 milliards de dollars. La plus grande part de cette dette est détenue par les sociétés non financières (94.100 milliards), qui sont suivies par les pouvoirs publics (91.400 milliards), puis le secteur financier (70.400 milliards) puis les ménages (59.100 milliards).

L’impact de la pandémie

Quelques précisions tout d’abord : on parle ici de l’endettement cumulé des ménages, des entreprises financières et non financières et des pouvoirs publics. Puisque les banques et les établissements prêteurs sont intégrés dans ces statistiques, il y a donc forcément un double comptage (les banques créent de la monnaie, mais elles empruntent aussi de l’argent pour le reprêter ensuite aux ménages, aux pouvoirs publics, aux entreprises).  On parle aussi de dette rapportée en dollars, qui fluctue donc aussi en fonction de l’appréciation ou la dépréciation du billet vert à l’égard des autres devises. Mais si l’on évacue ce problème méthodologique, on est à première vue frappé par la  montée impressionnante du stock de dettes depuis 2016, année où la dette mondiale pesait 220.000 milliards de dollars. En huit ans, donc, la dette mondiale a grimpé, en terme nominal, de près de 45%.

Les principales raisons sont connues : la hausse a été brutale dans les années covid en raison à la fois des aides massives des pays industrialisés et de l’inflation causée par la disruption des chaînes d’approvisionnement et la crise énergétique. Une inflation qui a agi en deux temps, sur les prix, mais aussi sur les taux d’intérêt payés par les débiteurs. Tout cela a été encore aggravé par la guerre en Ukraine. Entre 2020 et 2022, la dette mondiale a gonflé de 40.000 milliards de dollars, passant  260.000 à 300.000 milliards.

La Chine et les États-Unis

Certains crient au loup. Mais si l’on essaie de voir son poids réel sur les économies, l’image est un peu différente. Ces 315.000 milliards représentent en effet un peu plus de 330% du PIB mondial. C’est un peu plus que le ratio de 2016 (320%), mais ce n’est pas une explosion.

Il reste que pour certains pays, le poids de la dette se fait sentir de plus en plus avec des implications non négligeables pour nos économies. La Chine, par exemple, est un pays dont les entreprises et les ménages sont fortement endettés. Résultat, Pékin recentre ses efforts non plus sur une consommation intérieure financée en partie par des crédits immobiliers et des crédits à la consommation, mais à nouveau sur les exportations.

D’ailleurs, les pays classés comme « émergents » – la Chine, l’Inde, le Mexique en tête – ont vu leur endettement augmenter plus rapidement que les autres ces dix dernières années. La dette des « émergents » pèse aujourd’hui 105.000 milliards, soit le tiers du total de la dette mondiale.

Les États-Unis sont un autre pays dont l’endettement explose. Et aucun parti, ni les démocrates, ni les républicains ne font de ce sujet une priorité, puisque depuis des décennies, les pays en surplus d’épargne (Allemagne, Pays-Bas, Japon, Corée, Chine) achetaient sa dette. Mais cela risque de changer (on voit déjà que la Chine n’est plus acheteuse), et des conséquences, notamment sur les taux d’intérêt, se feront sans doute sentir à long terme.

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