Elections européennes: un affrontement entre centristes et populistes

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Les citoyens de l’Union européenne se rendent aux urnes en juin. Un nouvel affrontement entre centristes et populistes est à prévoir.

Les élections en Europe, pour paraphraser Mark Twain, ne se répètent pas, mais elles riment. De l’Allemagne à l’Italie en passant par la Slovaquie, on retrouve un schéma familier. Les partis centristes qui sont au pouvoir depuis des décennies s’opposent de plus en plus à des rivaux de la droite dure qui auraient autrefois été considérés comme irrécupérables sur le plan politique. Il en sera de même le 9 juin, lorsque les élections pour le Parlement européen se tiendront dans les 27 Etats membres de l’Union européenne.

Les partis nationalistes de diverses obédiences s’en sortiront bien, mais il est probable que le centre se maintiendra. Les politiques raisonnables émanant de Bruxelles, qu’il s’agisse du soutien à l’Ukraine ou de la réduction des émissions de carbone, devraient rester (en grande partie) inchangées, après la bataille habituelle pour savoir qui obtiendra quel poste de haut niveau au sein de l’Union européenne.

De Lisbonne à Helsinki, les sondages indiquent que le centre-droit (le Parti populaire européen, ou PPE) devrait à nouveau s’imposer comme le bloc le plus important. Mais il perdra probablement un peu de terrain, comme les centristes de centre-gauche (Socialistes & Démocrates) et les libéraux (Renouveau). Une multitude de sièges de cette chambre de 720 membres iront à des partis de la droite dure comme ceux de Giorgia Meloni en Italie, de Viktor Orban en Hongrie et de Marine Le Pen en France.

Une majorité centriste ?

Les formations centristes auront probablement assez de poids pour réunir une majorité. Ce serait une bonne nouvelle pour Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne depuis les précédentes élections de 2019. Bien que le poste le plus élevé à Bruxelles soit décidé par les 27 dirigeants nationaux de l’UE, le Parlement européen doit ensuite approuver leur choix. Si le PPE remporte la plupart des voix, Ursula von der Leyen sera assurée d’un nouveau mandat de cinq ans. Mais si les partis centristes n’obtien­nent pas de bons résultats, elle pourrait être contrainte de conclure un pacte avec les partis de la droite dure pour s’assurer une majorité.

Si Ursula von der Leyen reste en poste, il faut s’attendre à ce que Bruxelles poursuive sur la même voie. Elle continuera notamment à soutenir fermement l’Ukraine : en collaboration avec les Etats-Unis, la Commission a contribué à l’élaboration de 11 séries de sanctions à l’encontre de la Russie. Les efforts visant à intégrer dans l’Union européenne ce pays déchiré par la guerre ainsi que huit autres Etats (principalement dans les Balkans occidentaux) se poursuivront, même s’il faudra attendre de nombreuses années avant une adhésion formelle.

Malgré l’importance des élections européennes, celles qui se tiendront de l’autre côté de l’Atlantique détermineront davantage la forme future de l’Union.

Quid de l’environnement ?

La prochaine série de réglementations relatives à la réduction des émissions de carbone sera plus controversée. Dans toute l’Europe, les populistes se plaignent des politiques vertes et mettront toutes les chances de leur côté si les élections européennes se transforment en référendum sur la réduction rapide des émissions de gaz à effet de serre. L’engagement de l’UE à atteindre des émissions “nettes zéro” d’ici 2050 nécessitera plus d’argent (dont l’Europe manque) et plus de réglementations (dont elle dispose d’une réserve apparemment inépuisable). Même les partis centristes se montrent parfois réticents à l’égard des programmes verts proposés par Bruxelles.

Les élections pourraient également donner lieu à des prises de bec pour les postes les plus importants. Le maintien d’Ursula von der Leyen assurerait la continuité. Mais l’ensemble de son équipe de 26 commissaires, y compris les puissants responsables des tentatives d’élaboration d’une politique industrielle, sera renouvelée. Il y aura également un nouveau président du Conseil européen, qui préside les réunions des dirigeants de l’UE et représente l’Union à l’étranger, puisque Charles Michel quittera ses fonctions après cinq ans. Un nouveau responsable de la politique étrangère sera également nommé et, de l’autre côté de la ville, un nouveau secrétaire général de l’Otan.

Plus l’Europe se rapproche du scrutin, plus ses propres débats seront éclipsés par les élections américaines qui se dérouleront plus tard dans l’année. La simple perspective d’un candidat Trump triomphant donnerait un coup de fouet aux appels français en faveur de l’”autonomie stratégique”, selon lesquels l’Europe dépendrait moins de l’Amérique pour sa défense et dans d’autres domaines. Malgré l’importance des élections européennes de juin, celles qui se tiendront de l’autre côté de l’Atlantique en novembre détermineront davantage la forme future de l’Union.

Stan Pignal, chroniqueur et correspondant à Bruxelles de “The Economist”
Traduit de “The World in 2024”, supplément de The Economist

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