D’un Munich à l’autre: l’Europe “complètement à la ramasse” sur l’Ukraine et sa sécurité
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![Olivier Mouton](https://img.static-rmg.be/a/view/q75/w150/h150/5085703/olivier-jpg.jpg)
Une nouvelle conférence sur la sécurité a lieu en Allemagne, dans un contexte troublé par les négociations “immédiates” annoncées entre Donald Trump et Vladimir Poutine. Le professeur Tanguy Struye (UCLouvain) et l’eurodéputé Raphaël Glucksmann, parmi d’autres, ont des mots très durs sur la faiblesse de l’Union.
Une nouvelle Conférence sur la sécurité débute ce vendredi à Munich. La Russie ne sera pas représentée, mais son ombre plane. L’annonce de négociations “immédiates” entre le président américain, Donald Trump, et son homologue russe, Vladimir Poutine, sème le trouble dans les rangs européen et ukrainien. Car tant les Vingt-Sept que le pays agressé ne sont pas conviés autour de la table.
Le président français Emmanuel Macron estime que “seule l’Ukraine” peut décider de son sort et a demandé que l’Europe soit impliquée. Il a également mis en garde contre une paix qui reviendrait à une “capitulation” de l’Ukraine et s’est demandé si son homologue russe Vladimir Poutine était “sincèrement” prêt à un cessez-le-feu “durable”. Avant lui, l’Allemagne avait déjà regretté que Donald Trump fasse des concessions – pas de retour aux frontières de 2014, pas d’Ukraine dans l’OTAN… – avant même le début des négociations.
Visiblement, les Américains soufflent le chaud et le froid. Les Etats-Unis auront “à coeur l’indépendance souveraine de l’Ukraine” dans les négociations à venir avec la Russie sur l’issue de la guerre, où “tout sera sur la table”, y compris “les moyens de pression militaire”, a déclaré le vice-président américain JD Vance vendredi, dans un entretien au Wall Street Journal.
“A la ramasse”
En attendant, les critiques sont nombreuses à l’encontre d’une Union européenne qui ne parvient pas à saisir l’importance du moment, engluée dans son absence de voix unique et ses divisons.
“L’Europe est complètement à la ramasse face à Trump, Poutine, Xi (président chinois – Ndlr) et Modi (président indien), affirme de façon cassante Tanguy Struye, professeur de relations internationales à l’UCLouvain. Ca fait 15 ans que les règles ont changé et l’UE n’a rien compris.”
Il se réfère à plusieurs textes rédigés ces derniers mois, dans lesquels il épinglait déjà le manque de réactivité des Vingt-Sept, alors que l’élection de Donald Trump rabattait les cartes. “La gestion de crise ne suffira pas face à Trump, écrivait-il notamment. Au lieu de se lamenter continuellement, l’UE et ses États membres doivent penser en stratège, en personnes d’État, et non en femme ou homme politique.”
Evoquant notamment notre manque de cohérence dans la politique de défense, il ajoutait en novembre: “Malheureusement, force est de constater que ce n’est pas la génération actuelle de leaders qui fera cet effort, beaucoup étant dans une position de faiblesse – pensons à Macron, Scholz, De Croo, Tusk, ou encore Sanchez – ou suivant une logique populiste, nationaliste et de repli, comme Orban ou Wilders par exemple.”
D’un Munich à l’autre
L’eurodéputé Raphaël Glucksmann, auteur d’un livre intitulé La Grande confrontation. Comment Poutine fait la guerre à nos démocraties, estime pour sa part que Donald Trump “sacrifie l’Ukraine”, avec pour conséquence “grave” le fait que l’Europe perd sa sécurité, au risque de metrte un terme à 80 années de paix.
“Nous voilà revenus à ce moment 1938 de notre Histoire, ce moment Daladier et Chamberlain qui revient toujours et que, connaissant la faiblesse insigne des élites occidentales, je redoutais depuis trois ans”, écrit-il.
Il rappelle: “A Munich, la Tchécolovaquie fut offerte à Hitler sur un plateau d’argent dans des négociations dont ses dirigeants furent exclus. Là, Trump a engagé des discussions avec Poutine sans l’Ukraine. Sans l’Ukraine et sans l’Europe.”
Raphaël Gucksmann rappelle que les services secrets allemands, danois ou polonais alertent aujourd’hui sur le fait que la Russie pourrait s’en prendre à des pays de l’OTAN d’ici 2029. “Face à cette trahison américaine, l’Europe se résoudra-t-elle à un destin de serpillère?“, interroge-t-il.
Lors de la Conférence de Munich, les Européens tenteront de faire entendre leur voix. La question est de savoir s’il n’est pas définitivement trop tard.
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