Donald Trump suspend les droits de douane 90 jours, sauf pour la Chine: l’art de l’incertitude et de la manipulation

Donald Trump décrète une "PAUSE" (AFP)
Olivier Mouton
Olivier Mouton Chef news

Le président américain cultive un art particulier du chaos et de l’incertitude. Une semaine après l’annonce de barrières douanières généralisées, il tape fort contre la Chine, mais suspend celles contre le reste du monde, dont l’Europe, pour nonante jours. Un répit et une possibilité de négocier. Comme il le disait, tout le monde vient lui “lècher le cul” (sic).

Le président américain, Donald Trump, aime être au centre de l’attention mondiale. Sa politique semble dictée par sa capacité à donner le tournis aux observateurs du monde entier et à désarçonner les médias tentant de suivre sa logique.

En fin de semaine dernière, il provoquait un émoi généralisé avec son “Liberation day” et des droits de douane importants annoncés sur la majorité des pays du monde. Mercredi soir, il a donné un peu de répit en décrétant une suspension de nonante jours. Sauf pour la Chine, la puissance rivale, avec laquelle l’escalade a démarré sur les chapeaux de roue: 125%, désormais, de la part des États-Unis.

Allez savoir à quel saint se vouer…

“J’ai autorisé une PAUSE”

Donald Trump a voulu provoquer un électrochoc et imposer aux pays lourdement touchés de négocier. Les uns après les autres, ils ont annoncé leur intention de le faire, pour atténuer le déficit commerciale américain. “Vous voyez, ils me lèchent le cul” (sic) avait affirmé le président américain, avec son art consommé de la provocation. Un message à ses partisans.

Mercredi soir, c’est comme s’il avait manipulé en direct les marchés américains, en plein affolement. Via son réseau social, il a lancé: “J’ai autorisé une PAUSE de 90 jours et une réduction substantielle des droits de douane réciproques pendant cette période, à hauteur de 10%, avec effet immédiat..

La Chine n’est pas concernée. Les autres partenaires commerciaux des États-Unis devraient dès lors voir leurs droits de douane abaissés à 10%Le Mexique et le Canada, qui avaient été frappés par les foudres trumpiennes bien avant le 2 avril, ne sont pas concernés par cette annonce. De la même manière, les surtaxes sur l’acier, l’aluminium et les voitures restent en place.

“Il y aura un accord”

Dans la foulée, devant la presse, Donald Trump a prédit des accords: “Il y aura un accord avec la Chine, il y aura un accord avec tous (les pays)“, a déclaré le président américain devant la presse, alors que ses hausses de droits de douane ont provoqué une panique sur les places financières mondiales depuis la semaine dernière.  “La Chine veut conclure un accord”, mais “ne sait pas très bien comment s’y prendre”, a-t-il ajouté, quelques heures après avoir annoncé une nouvelle hausse prohibitive, à 125%, des droits de douane américains sur les produits chinois.

Sans surprise, les marchés américains sont fortement repartis à la hausse, ce qui devrait être le cas en Asie et en Europe ce jeudi. En attendant, la prochaine saillie d’une président qui cultive l’art de l’incertitude et de la manipulation à nul autre pareil.

“Il se heurtait de plein fouet à une contradiction centrale de son projet politique, intenable à moyen terme face à une partie de son électorat”, estime Corentin Sellin, professeur d’histoire et spécialiste des États-Unis, sur X.

“Le pari de Trump était d’obtenir à très court terme la soumission de partenaires commerciaux ouvrant, tels les bourgeois de Calais, leurs marchés aux produits US avant que les effets des tarifs douaniers ne se fassent sentir à moyen et long terme sur les prix à la consommation, prolonge-t-il. Sauf qu’il s’est fracassé sur le mur du réel, et aussi sur deux pans essentiels de sa coalition politique hétéroclite. Les milliardaires oligarques à la Musk lui ont notifié la perte d’actifs qu’engendraient pour eux les tarifs douaniers sur les marchés financiers. Il risquait aussi de perdre ses nouveaux électeurs (couches populaires des minorités, jeunes non-diplômés) venus à lui sur la thématique de l’inflation et de la hausse des prix, contradictoires avec ces tarifs douaniers.”

L’Europe satisfaite, mais…

“Je salue l’annonce du président Trump de faire une pause sur les tarifs réciproques, réagit Ursula Von der Leyen, présidente de la Commission. C’est un pas important vers la stabilisation de l’économie globale. De la clarté, des conditions prévisibles sont les conditions essentielles pour le commerce et les chaînes de valeur.”

“Les tarifs heurtent les entreprises et les consommateurs, poursuit-elle. C’est pourquoi je plaide pour accord sur des tarifs zéro entre l’Union européenne et les Etats-Unis. L”Union européenne reste déterminée à mener des négociations constructives avec les Etats-Unis. Dans le même temps, l’Europe continue à diversifier ses partenariats commerciaux notre engagement pour un libre échange de biens, services et idées avec des pays qui représentent 87% du commerce mondial.

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