“Ils n’ont qu’à vendre des îles” : la Grèce se moque de la situation économique de l’Allemagne
En Allemagne, la crise politique à cause d’un immense trou dans le budget et le ralentissement économique sont au rendez-vous. La Grèce en profite pour proposer à Berlin de faire des efforts et d’être plus austère. Il y a dix ans, c’était l’exact opposé.
Crise politique en Allemagne : le gouvernement fédéral a un trou de 60 milliards d’euros dans son budget. Un reste de dette alloué mais inutilisé durant l’époque du covid, que Berlin voulait injecter dans la verdisation de son économie : rénovation des bâtiments, mobilité électrique, production d’hydrogène et l’installation de TSMC et Intel, deux géants des puces électroniques, sur son territoire, entre autres. Mais la justice l’a rattrapé par le colback – un tel transfert est contraire à la constitution.
Scholz et compagnie sont donc sur le pont depuis deux semaines pour trouver une solution pour combler le trou. Trou qui n’est d’ailleurs pas anodin. Ces dernières années, le budget était de 450 à 500 milliards d’euros, soit un trou de 12 à 13%. Et ces 60 milliards d’euros, l’économie, au point mort, en a cruellement besoin. Que faire alors ? Réduire les dépenses ? Taxer plus ?
“Vendre des îles” : la revanche grecque
Panagiotis Lafazanis, ancien ministre grec de l’Energie et de l’Environnement, en fonction dans le gouvernement de Tsirpas, dans l’après-crise de la dette de 2011, donne quelques pistes de réflexion au gouvernement des “feux de circulation”. “Il devrait imposer des impôts d’urgence aux citoyens et aux entreprises”, explique-t-il à Bild ce lundi. Ou l’alternative : “la vente d’actifs publics, tels que des îles, pour lever rapidement de grosses sommes d’argent.” Ou des entreprises publiques, ajoute-il encore.
L’ironie du sort. Il y a à peu près 10 ans, c’est la Grèce qui était en faillite. L’Allemagne lui a prêté des fonds, mais en appelant à la rigueur budgétaire. Il faudrait taxer fermement. Lafazanis lui-même a d’ailleurs dû vendre des centrales énergétiques et des entreprises pour renflouer les caisses. “Vous n’avez qu’à vendre vos îles, espèces de Grecs en faillite. Et l’Acropole avec”, titrait le tabloïd Bild à l’époque.
Lafazanis n’hésite donc pas à remettre ces éléments sous le nez des Allemands, aujourd’hui. “Si les Allemands ne parviennent pas à s’en sortir seuls, ils devront se placer sous la surveillance de la troïka. Ils seront alors contraints”. Et d’ajouter : “La vie est vindicative. L’Allemagne va désormais vivre ce qu’elle a imposé à la Grèce. L’Allemagne risque d’entraîner l’Europe dans une crise de longue durée.”
Miracle économique à Athènes
C’est en effet drôle comment la roue peut tourner. L’économie allemande est aujourd’hui le maillon faible du continent, avec un taux de croissance négatif ou nul ces derniers trimestres. Alors qu’elle est censée être le moteur du bloc. En Grèce, au contraire, c’est un petit miracle économique qui est en train de se passer. Le pays devrait boucler l’année avec une croissance de plus de 2%, contre moins d’1% pour la zone euro.
Aussi, lors des dernières évaluations de la Commission européenne il y a une semaine, la Grèce (avec les anciens cas problématiques de l’après 2011, comme l’Espagne et l’Irlande) a reçu une gommette verte. Ses finances publiques sont en ligne avec les recommandations. L’Allemagne a reçu une gommette jaune : “pas entièrement en ligne.” Et la Belgique, une gommette rouge. Les obligations grecques ont d’ailleurs récemment reçu une gommette verte aussi : elles sont désormais “investissables“.
Pas la première piqûre de rappel
Les Grecs n’hésitent donc pas rendre la monnaie de sa pièce, à l’Allemagne. Au plus fort de la crise énergétique déjà, ils n’ont pas tari de commentaires. Il y a un an, l’Allemagne demandait à tous les pays européens de faire des efforts et d’économiser de l’énergie, car le pays souffrait (le plus) de la baisse conséquente d’approvisionnements en gaz russe.
“Ils vivaient au-dessus de leurs moyens”, “ils n’ont qu’à se serrer la ceinture” ou encore “pas à nous de faire des efforts alors que c’est eux-mêmes qui sont responsables de cette situation”, pouvait-on alors entendre comme piques de la part des Grecs.
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