Ivan Vandermeersch
Homo Digitalis: pas de progrès sans imagination
Le dernier livre de Thierry Geerts, le directeur Belgique de Google, est pour moi un grand moment. Il traite à nouveau de ce petit village de presque 8 milliards d’habitants qu’est le globe. Parce que s’il y a une chose que le numérique aura fait dans cette crise, c’est réduire les distances. Avec cette crise, on s’est mieux rendu compte que nos voisins de l’autre bout du monde sont accessibles sans se déplacer physiquement. Grâce aux réunions en ligne, on peut leur vendre des produits à distance. Le marketing devient plus international que jamais.
Dans son livre dont la parution vient à point nommé, Thierry Geerts tente de démystifier nos craintes de la numérisation, et il décrit les innombrables opportunités qu’elle offre aux personnes et à la société. Son message principal est que la technologie elle-même est neutre. Ce sont les individus à qui il appartient de saisir les opportunités qu’elle offre et de convertir la numérisation en plus de bien-être et de bonheur.
Pour moi j’en retiens ce qui suit.
Au niveau marketing, les petites et moyennes entreprises qui se sont lancées dans le e-commerce se rendent compte que le client potentiel ne se trouve plus uniquement dans le périmètre de 20 km du point de vente, mais également de l’autre côté du globe. Lorsque l’on va commencer à sortir de cette crise, que ce soit dans trois mois ou après l’été, ce sera le moment de reconquérir le monde. Et le marketing y sera tout à fait différent.
S’il y a une réalité, dont on se rend compte plus que jamais en en regardant dans la direction d’une sortie de la crise, c’est que nous sommes tous encore plus connectés par l’Internet qu’auparavant. En même temps, il s’agit plus que jamais de réinventer le monde. Et dans “Homo Digitalis”, l’auteur nous explique bien ce que ce réinventer peut signifier pour l’être humain, notre consommateur.
La route du changement qu’on devra emprunter se dessine déjà avec UBER et AIRBNB. La révolution technologique bouleverse le vieux monde et le fait s’effacer. Nous devons repenser notre monde avec la technologie qui est disponible aujourd’hui.
La question dans le livre est cependant de savoir si l’être humain veut bien de cela. Il est vrai que souvent l’être humain est un peu réfractaire par rapport aux changements. Et la quatrième révolution industrielle c’est celle du numérique. Mais chaque révolution industrielle réveille ce spectre noir des pertes d’emploi et de faillites d’entreprise. Alors que c’est le contraire qui s’est avéré pour chaque révolution industrielle.
Cette révolution numérique aura ainsi, par exemple, un impact majeur sur la mobilité, et sur le marketing qui devra accompagner ce bouleversement. Les maîtres mots deviendront sécurité et modularité. Les voitures autonomes de demain seront des voitures connectées. De ce fait elles éviteront beaucoup d’accidents parce qu’elles communiqueront entre elles et respecteront scrupuleusement les règles de roulage. Ceci signifie moins d’accidents, moins de morts et de blessés à vie.
Pourtant, les gens ne sont pas toujours optimistes lorsqu’une nouvelle technologie se présente. Les voitures à conduite autonome illustrent parfaitement la façon dont les gens et les sociétés réagissent aux nouvelles technologies. Au début, tout le monde pense que c’est une idée folle, puis il devient évident que l’idée est loin d’être aussi folle qu’elle le semblait au départ, et tout le monde essaie de prouver que c’est dangereux. Maintenant c’est le stade où en sont les voitures à conduite autonome aujourd’hui : “Regardez, elles renversent aussi les piétons”. Il est clair que les voitures conduites de façon autonome renverseront à terme beaucoup moins de gens que la voiture actuelle.
Et la digitalisation aidera la problématique du climat. Il est clair que la technologie va nous aider avoir accès à plus de sources d’énergies dont la production n’émet pas de CO2. Pensons seulement aux panneaux solaires. Pensons aux éoliennes. Toutes des technologies où le digital joue un rôle énorme. Aussi en nous aidant à être plus économes avec les matières premières. Pensons par exemple à la disparition des lampes à incandescence depuis l’année 2000, remplacées par des Lampes LED intelligentes et durables. Et l’obsolescence programmée doit aujourd’hui faire place à des produits plus durables, réparables et recyclables dans une économie dite circulaire. Ça aussi c’est la technologie.
Ce que cette crise COVID 19 nous a appris avec l’enseignement à distance, c’est que l’on pourrait fondamentalement réformer la façon d’enseigner. Pourquoi faut-il encore enfermer des enfants à temps plein dans les écoles ? Est-ce qu’une solution ne consisterait pas à enseigner la théorie à distance, et à faire venir les enfants dans les écoles pour des expériences pratiques et l’apprentissage du vivre-ensemble ?
En effet, la technologie peut faire peur. Or, la peur a toujours été mauvaise conseillère. Le danger est que cette peur ouvre la porte au populisme qui se réfère au bon vieux temps de la souveraineté et du protectionnisme. Et soyons clair, l’ouverture au monde que donne la technologie va tout à fait à l’encontre du nationalisme. De là qu’il est important pour la démocratie de donner confiance aux citoyens en ce qui concerne la technologie, et la gouvernance des systèmes multilatéraux, depuis le commerce jusqu’à celui de l’Internet.
Et donner confiance commence par l’information et la communication : la transparence. Et cela passe par aussi par un minimum de savoir, et donc l’éducation. Nous devons inspirer à nos enfants le futur en leur enseignant le présent, c’est-à-dire tous les potentiels qui sont à portée de main et ne demandent qu’à être saisis, au lieu de toujours se focaliser sur le passé comme référence. Pour aller de l’avant, nos enfants doivent comprendre ce qui se passe aujourd’hui et pour imaginer ce qui serait possible à l’avenir.
La Belgique doit jouer un rôle clé dans la révolution numérique. La Belgique a toujours été un acteur capital dans chacune des révolutions industrielles, et nous devons continuer à l’être. Nous avons des capitaux, notre enseignement et notre recherche sont réputés mondialement, nous sommes multilingues. Jusqu’à aujourd’hui, nous avons construit un énorme savoir-faire, et la Belgique n’a pas à rougir de son infrastructure pour la connexion à un Internet à haut débit. L’enjeu est bien de pouvoir maintenir ce niveau en nous ne laissant pas dépasser, notamment sur le dossier de la 5G. Des infrastructures de téléphonie mobile à la pointe sont cruciales pour rester dans le peloton de tête. Réinventer le monde autour des technologies devient un devoir car c’est l’unique voie pour permettre de créer plus de sécurité, d’emplois et de durabilité.
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