Un possible eldorado d’hydrogène blanc dans le nord-est de la France

La Moselle, connue pour sa sidérurgie et ses mines de charbon, attire désormais les investisseurs porteurs de projets plus verts. © Getty Images

Un gaz recherché pour décarboner l’industrie et les transports : des scientifiques ont potentiellement découvert “la plus grande réserve du monde” d’hydrogène blanc, ou natif, dans le sous-sol houiller de la Moselle, dans le nord-est de la France.

Un possible espoir pour le bassin minier de la Lorraine, après 150 ans d’exploitation du charbon qui participa à l’essor de la région avant d’entrer en déclin et s’arrêter. Une perspective sur laquelle travaillent depuis quatre ans des chercheurs du Centre national de la recherche scientifique (CNRS) français, via un projet de recherche baptisé Regalor.

Avec une sonde, descendue jusqu’à plus de 1.000 mètres de profondeur dans le sous-sol de Folschviller (département de la Moselle), les chercheurs, qui étaient en quête de méthane, ont en fait découvert d’importantes quantités d’hydrogène blanc, gaz qui se forme naturellement dans les sous-sols.

Si les concentrations de cet hydrogène natif sont identiques dans tout le bassin houiller lorrain, la découverte représenterait “60 millions de tonnes” de cette ressource générée naturellement par la Terre, soit potentiellement “la plus grande réserve mondiale”, selon Jacques Pironon, directeur de recherche, géologue de formation, lors d’une conférence à Petite-Rosselle début février.

Ces premières estimations seront toutefois “à affiner avec d’autres forages”, a-t-il précisé. L’hydrogène natif se forme naturellement dans le sous-sol, via des réactions chimiques, entre l’eau et des minéraux par exemple.

Décarbonation

“Depuis deux ans, on mesure en continu, toutes les 30 minutes, les gaz” présents dans le sous-sol, créant ainsi “l’une des plus grosses banques de données” du monde sur ces concentrations en hydrogène natif, a expliqué Philippe de Donato, également directeur de recherches au CNRS.

Les puits traversent les veines de charbon autrefois exploitées en Moselle, et d’autres couches de minéraux où les concentrations d’hydrogène blanc augmentent au fur et à mesure de la profondeur de la sonde. Pour l’heure, les scientifiques ont atteint 1.250 mètres de profondeur avec une sonde “unique au monde” de six centimètres de diamètre, souligne M. de Donato. “A 1.250 mètres de profondeur, on a découvert une concentration de 20% d’hydrogène blanc dans les mélanges de gaz”, a précisé Jacques Pironon. Et d’après plusieurs modélisations, la teneur en hydrogène pourrait atteindre 90% à 3.000 mètres de profondeur.

L’hydrogène naturel suscite un intérêt grandissant pour la décarbonation de l’industrie et des transports. Ce gaz est actuellement principalement utilisé pour la production d’ammoniac, de méthanol, de carburants ou de raffinage de produits pétroliers.

Regalor II

Le premier gisement d’hydrogène naturel a été découvert au Mali. Il est exploité depuis 2011, à raison de 90 tonnes par an de production, ce qui permet l’électrification d’un village. L’Union européenne souhaite produire, à horizon 2030, 20 millions de tonnes d’hydrogène renouvelable. Mi-décembre, le président Emmanuel Macron a annoncé le lancement de “missions d’exploration” de réservoirs d’hydrogène naturel sur tout le territoire français, promettant “des financements massifs” dans le domaine.

“On ne peut pas laisser dormir cette ressource”, avait-t-il lancé. “On y va à fond sur les électrolyseurs, mais maintenant on y va deux fois plus vite sur l’hydrogène naturel”. “Des demandes de permis de recherche sont en cours pour des gisements potentiels” dans les Pyrénées-Atlantiques (sud-ouest) et la région Auvergne-Rhône-Alpes (centre-est), indique le site internet du ministère de la Transition écologique.

Les chercheurs et leurs partenaires, parmi lesquels La Française de l’Energie, déposeront le 29 avril la demande d’autorisation pour le projet Regalor II, qui devra permettre de déterminer de quelles façons pourra être exploité cet hydrogène. Le site de Folschviller, où se déroulent les opérations de mesure, “ne donnera jamais lieu à l’exploitation”, ont toutefois précisé les chercheurs, et restera un site dédié à la recherche.

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