« Taxe carbone » pour la voiture et le chauffage: 600 euros en plus par an pour les ménages à partir de 2027 ?
Dès 2027, la « taxe carbone » européenne ETS2 impactera les factures de chauffage et de carburant des ménages. Cette tarification carbone vise à réduire les émissions de CO₂ en augmentant progressivement le prix des énergies fossiles.
Ce sujet pourrait bien devenir l’un des dossiers brûlants des prochains gouvernements. À partir de 2027, la taxe carbone européenne frappera les ménages. Techniquement, il ne s’agit pas d’une taxe directe, mais d’un système de tarification européenne du carbone, un mécanisme de marché appelé SEQE (Système d’Échange de Quotas d’Émissions), ou ETS (Emission Trading System) en anglais. Il s’agit d’un marché de permis d’émission de CO2 (ou permis de polluer) alloués selon des critères définis, que les entreprises peuvent échanger entre elles.
Le premier ETS européen (ETS1) est déjà en place depuis 2005 et concerne les centrales électriques, les industries polluantes majeures, ainsi que l’aviation commerciale. En 2022, un second système, l’ETS2, a été adopté et doit entrer en vigueur en 2027. Contrairement à l’ETS1, ce second système vise principalement les bâtiments (dont les logements) et le transport routier (y compris les voitures particulières).
Qui sera touché par cette “taxe carbone” ?
Subtilité importante: les ménages ne paieront pas directement cette taxe. En réalité, ce sont les fournisseurs de combustibles fossiles qui devront acheter des droits d’émission pour chaque tonne de CO₂ qu’ils émettent. Cependant, il est probable que ces coûts supplémentaires soient répercutés sur les consommateurs.
Le prix de la tonne de carbone : un facteur clé
Le coût pour les ménages dépendra du prix de la tonne de carbone, qui peut être très volatil. Ce prix varie en fonction de l’offre, de la demande, et du plafond d’émissions de CO₂ fixé par l’Europe. Concrètement, plus la demande de carburants fossiles (diesel, essence, gaz) sera élevée, plus le prix des quotas augmentera. À l’inverse, si les ménages optent rapidement pour des alternatives plus écologiques, ce prix pourrait baisser.
Les projections indiquent que la tonne de CO₂ pourrait coûter entre 80 et 120 euros dans les prochaines années. Selon l’Institute for Climate Economics (I4CE), le prix du carbone pourrait se stabiliser autour de 70 à 75 euros la tonne d’ici 2030, atteignant jusqu’à 130 euros en 2040. D’autres études convergent vers les mêmes prévisions, suggérant que la facture pourrait facilement atteindre plusieurs centaines d’euros, surtout pour les ménages utilisant du gaz ou du mazout pour le chauffage.
Selon l’expert en énergie Damien Ernst, avec un prix moyen de 100 euros par tonne de carbone, un ménage pourrait payer jusqu’à 620 euros par an. Cela inclut 420 euros pour le chauffage au gaz et 200 euros pour une voiture essence.
Quel impact sur le prix des carburants et du chauffage ?
D’autres chercheurs estiment que le prix de l’ETS2 en 2030 pourrait varier entre 71 et 261 euros par tonne de CO₂. Déjà, avec un prix ETS2 de 45 euros par tonne, un litre d’essence ou de diesel deviendrait 10 à 12 centimes plus cher. Si ce prix grimpe à 261 euros par tonne, les prix à la pompe pourraient augmenter de 60 centimes pour l’essence et 70 centimes pour le diesel, précise De Standaard. Le chauffage serait également fortement impacté : une consommation moyenne de gaz coûterait 940 euros de plus par an, tandis que le mazout pourrait voir une hausse de 1 705 euros par an.
Un déploiement progressif pour limiter l’impact
Le système ETS2 sera introduit progressivement. Si le prix dépasse rapidement les 45 euros par tonne, des mesures seront prises pour ralentir l’augmentation. Cependant, aucun plafond absolu n’est fixé. Pour aider les ménages à réduire leurs émissions, l’Europe prévoit la création d’un Fonds social pour le climat (FSC), qui sera financé par 25 % des recettes de l’ETS2. En Belgique, cela représenterait environ 300 millions d’euros par an. Les 75 % restants seront laissés à la discrétion des gouvernements. Autant dire que les détails sur l’utilisation de ces fonds restent flous.
Les défis à venir pour les gouvernements
Les gouvernements devront rapidement choisir entre accélérer les plans climatiques (en favorisant l’isolation des logements et l’adoption des voitures électriques, par exemple) ou faire porter le coût de la transition aux citoyens. “Pour maintenir le prix de l’ETS2 à un niveau bas, les États membres doivent accélérer le déploiement des pompes à chaleur et des voitures électriques”, explique Pieter Vingerhoets, expert en climat chez Vito/Energyville, dans le journal De Standaard. Cependant, en Belgique, les taux de rénovation des logements et l’installation des pompes à chaleur sont encore trop bas.
Avec une exigence de réduction des émissions de CO₂ de 47 % d’ici 2030 pour la Belgique, les gouvernements devront prendre des mesures pour limiter l’impact de cette transition sur les ménages. Sans ces efforts, la facture risque d’être particulièrement salée pour les citoyens.
Le marché mondial de la tarification carbone
En Belgique, il n’y a pas de taxe carbone supplémentaire en dehors du SEQE. Une étude publiée en mars montre que si les entreprises du Bel 20 devaient payer la facture complète de leurs émissions de CO₂, moins de 50 % d’entre elles resteraient rentables. La Banque mondiale estime que les revenus générés par les 75 mécanismes de tarification carbone existant dans le monde ont atteint 104 milliards de dollars en 2023.
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