La mer du Nord bientôt la plus grande centrale électrique du monde ?

macron de croo von der leyen
Le 20 février dernier, 73 CEO d’industrie avaient remis une liste de 10 "actions urgentes" afin de restaurer la compétitivité au sein de l’UE. Ursula Von der Leyen, présidente de la Commission européenne, et Alexander De Croo, Premier ministre d’une Belgique qui préside actuellement l’UE, avaient promis d’apporter une réponse.

Ce lundi en Belgique, neuf pays d’Europe se sont réunis lors d’un sommet pour sceller leur ambition commune de décupler leurs capacités en énergie éolienne en mer du Nord. Ce défi industriel colossal vise à accélérer la décarbonation du continent.

Ce lundi à Ostende, les dirigeants de neuf pays européens, dont Emmanuel Macron (président français), Olaf Scholz (chancelier allemand) et Mark Rutte (Premier ministre néerlandais), se sont réunis pour développer des champs d’éoliennes, des infrastructures de connexion, des chaînes industrielles, des projets d’hydrogène vert, et pour accélérer les procédures d’autorisation et mieux coordonner les appels d’offres.

“C’est un jour décisif pour faire de cette mer du Nord la plus grosse centrale électrique verte du monde”, a insisté Alexander De Croo, à l’issue de ce sommet à Ostende sur la côté flamande.

Le mot d’ordre, désormais, est une mise en œuvre rapide des intentions affichées. “Maintenant, il faut avancer rapidement”, a exhorté le Premier ministre Alexander De Croo. Cela peut se faire, par exemple, en coordonnant mieux la construction des parcs éoliens ou en rendant le financement plus stable, selon le Belge. La sécurité des infrastructures doit également faire l’objet d’accords, car les câbles et autres pipelines au fond de la mer du Nord “pourraient être la cible de sabotage”.

Sept pays de l’Union européenne

Sept pays de l’Union européenne (France, Allemagne, Pays-Bas, Belgique, Irlande, Danemark, Luxembourg) ainsi que la Norvège et le Royaume-Uni se sont engagés à porter collectivement leurs capacités d’énergie éolienne en mer du Nord à 120 gigawatts en 2030, puis au moins 300 GW en 2050, contre des capacités actuelles cumulées d’environ 30 GW. Champs d’éoliennes, mais aussi infrastructures de connexion, chaînes industrielles, projets d’hydrogène vert… Au-delà des partenariats qu’esquisse leur déclaration finale, les neuf États signataires veulent coordonner leurs politiques et appels d’offres, renforcer les chaînes de production ou encore simplifier les procédures administratives.

ostende

La mer du Nord, une mer peu profonde

En mer du Nord, peu profonde, des éoliennes peuvent être installées en nombre important pas trop loin des côtes, dans des conditions de vent permettant de produire de l’électricité à des coûts jugés très compétitifs. Les objectifs visés s’avèrent très ambitieux: si le Royaume-Uni compte déjà 14 GW d’éolien en mer et l’Allemagne 8 GW, les capacités du Danemark, de la Belgique et des Pays-Bas s’établissent entre 2 et 3 GW, et celles en France et Norvège à environ 0,5 seulement.

Dans la déclaration, la France vise au moins 2,1 GW d’ici 2030, et “entre 4,6 et 17 GW” d’ici 2050 en mer du Nord et dans la Manche. Paris a précédemment annoncé viser 40 GW d’éolien offshore sur l’ensemble des côtes françaises en 2050. Pour concrétiser cette accélération, le président français Emmanuel Macron a appelé à Ostende à “sécuriser toute la filière industrielle”. “Nous voulons une industrie européenne pour produire” éoliennes et infrastructures, “et ne pas répliquer les erreurs que nous avons pu faire” dans le passé en important massivement composants et matériaux pour le déploiement du photovoltaïque, a-t-il insisté.

Scholz à Ostende

La Première ministre danoise Mette Frederiksen a appelé à “sécuriser les approvisionnements” en matériaux critiques (terres rares notamment) pour lesquels l’Europe reste fortement dépendante des importations, notamment de Chine. Le Luxembourg, sans façade maritime, veut contribuer aux financements. “J’apporte des sous et je récupère un peu d’énergie”, s’est amusé son Premier ministre Xavier Bettel.

Investissements colossaux

Après une première réunion de quatre pays en mai 2022 au Danemark, ce second “sommet de la mer du Nord” s’inscrit dans les objectifs climatiques de l’Europe comme dans la volonté de réduire drastiquement sa dépendance aux énergies fossiles importées à la suite de la guerre en Ukraine. L’UE s’est récemment entendue pour doubler, à 42,5%, la part des renouvelables dans sa consommation énergétique d’ici 2030, notamment en accélérant les procédures d’autorisation des infrastructures. Bruxelles a également proposé mi-mars des allègements réglementaires pour les industries vertes.

Cependant, pour réaliser les objectifs d’Ostende, “de nouveaux investissements majeurs sont nécessaires dans la capacité de production et les infrastructures de soutien (…) Les politiques prévues sont insuffisantes pour l’instant”, ont réagi dans une déclaration commune une centaine d’entreprises. “L’Europe a un leadership technologique et industriel, mais ne produit pas assez de certains éléments cruciaux (nacelles, pales, câbles). Pas mal de financements vont déjà à l’innovation, l’enjeu est d’investir dans des structures de production existantes dont il faut doubler, tripler la capacité”, a expliqué à l’AFP Pierre Tardieu, de la fédération industrielle WindEurope.

L’industrie européenne devrait ainsi fabriquer d’ici cinq ans l’équivalent de 20 GW d’éoliennes offshore par an, contre une capacité d’environ 7 actuellement, au risque d’usines saturées et de goulets d’étranglement.

“Les turbiniers fonctionnent actuellement à perte, frappés durement par les dérèglements logistiques à la suite du Covid, il faut un soutien public ponctuel”, insiste M. Tardieu, notant aussi les besoins massifs de formation et recrutement: l’éolien en mer nécessitera 250.000 emplois en 2030, contre 80.000 aujourd’hui.

Le coût total s’annonce colossal: fin 2020, Bruxelles chiffrait à 800 milliards d’euros les besoins d’investissements si l’UE visait 300 GW d’éolien offshore d’ici 2050. Les ONG environnementales appellent, elles, à ne pas précipiter les études d’impact sur la biodiversité marine et WindEurope pointe du doigt les contraintes liées à la pêche et au transport. “Mais pour réaliser ces objectifs d’éoliennes, on n’a besoin que de 7% à 10% du bassin maritime”, tempère Pierre Tardieu.

Dans une tribune publiée sur Politico, les dirigeants ont déclaré leur objectif commun d’atteindre une capacité de 120 gigawatts d’énergie éolienne en mer du Nord en 2030, puis d’au moins 300 GW en 2050. Les capacités actuelles cumulées sont d’environ 30 GW. Ils souhaitent également diversifier les approvisionnements de composants critiques pour réduire leur dépendance à la Chine et renforcer les chaînes de production.

“Les ordres de grandeur sont gigantesques (…) L’éolien en mer deviendra vraisemblablement la principale source de production d’énergie renouvelable, loin devant le solaire et l’éolien terrestre”, observe-t-on à l’Elysée.

L’UE s’est récemment entendue pour doubler, à 42,5%, la part des renouvelables dans sa consommation énergétique d’ici 2030, notamment en accélérant les procédures d’autorisation des infrastructures. Bruxelles a également proposé mi-mars des allègements réglementaires pour les industries vertes. Cependant, pour réaliser les objectifs d’Ostende, “de nouveaux investissements majeurs sont nécessaires dans la capacité de production et les infrastructures de soutien (…) Les politiques prévues sont insuffisantes pour l’instant”, ont réagi dans une déclaration commune une centaine d’entreprises du secteur.

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