D’ici 2050, la consommation des centres de données en Belgique pourrait connaître une hausse de 25 à 40 % par rapport à la consommation totale actuelle d’électricité du pays. Une croissance tirée par l’IA générative qui impose à la Belgique des choix structurants en matière d’énergie, d’aménagement du territoire et de souveraineté numérique.
Selon un récent rapport publié par le Boston Consulting Group intitulé The Power of Compute – The Effects of Data Center Growth on Belgium’s Energy System, la capacité installée des data centers en Belgique pourrait être multipliée par 2 à 4 d’ici 2050, et atteindre entre 1 et 4 GW. Cette croissance s’accompagnerait d’une demande électrique estimée entre 18,5 et 34 TWh — soit une augmentation de 25 à 40 % par rapport à la consommation électrique nationale actuelle.
Google en tête
En 2024, les centres de données belges ont consommé 3,2 TWh, ce qui correspond à 4% de la consommation belge totale d’électricité cette année-là. La moyenne européenne tourne autour de 2%. Le marché belge des data centers est encore modeste à l’échelle européenne, mais il affiche une croissance solide : +10 % par an depuis 2018, principalement grâce à Google, dont le campus de Saint-Ghislain (Hainaut) est passé de 51 MW à 223 MW. Le géant du web a également acquis un terrain à l’Ecopôle de Farciennes, pour lequel il a reçu l’autorisation d’y construire trois mégas data centers. Trois autres data centers opérés par Microsoft, via des contrats de colocation, sont attendus d’ici l’automne 2025. Autour de Bruxelles, des acteurs comme Digital Realty ou EdgeConneX étendent, par ailleurs, leurs capacités pour répondre à la demande croissante de services cloud, de calcul haute performance et d’IA.
Une pression croissante sur le réseau
Mais cette expansion ne va pas sans conséquences. D’après le rapport de BCG, les data centers pourraient devenir l’un des principaux moteurs de la demande électrique en Belgique. À moyen terme, leur consommation pourrait dépasser 12 TWh dès 2035, soit près de quatre fois leur niveau de 2024 (3,2 TWh).
Trois grands risques
Trois grands risques sont identifiés par le rapport du BCG. La saturation du réseau, notamment dans les zones déjà tendues comme Bruxelles, Anvers ou le Hainaut. La pénurie d’électricité bas carbone, l’offre renouvelable étant encore insuffisante pour répondre à une telle hausse de la demande. La pression sur les prix, car une demande plus rapide que l’offre pourrait renchérir l’électricité pour les ménages et les entreprises.
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Les data centers ne sont toutefois pas qu’un poids sur le réseau. Ils peuvent être un levier de modernisation industrielle. Selon BCG, les installations prévues pourraient générer plusieurs milliers d’emplois directs et indirects en Belgique d’ici 2030, notamment lors des phases de construction. Ils contribuent aussi à attirer des projets d’énergie renouvelable et à renforcer la souveraineté numérique du pays. Encore faut-il que leur développement soit maîtrisé et orienté stratégiquement. Le rapport préconise notamment d’identifier des zones adaptées avec suffisamment de capacité réseau, de favoriser l’intégration de production locale d’énergie verte, et de réformer les règles d’accès au réseau, aujourd’hui fondées sur le “premier arrivé, premier servi”.
Une opportunité à encadrer
La Belgique, située au cœur du cluster FLAP-D (Francfort, Londres, Amsterdam, Paris, Dublin), bénéficie d’un emplacement stratégique. Mais face à la montée en puissance de l’IA et à la numérisation croissante des services publics et privés, elle ne pourra se permettre une croissance anarchique de ces infrastructures, alerte le Boston Consulting Group. Les data centers peuvent devenir des accélérateurs de transition énergétique et numérique, à condition que leur consommation reste compatible avec les objectifs climatiques et la compétitivité industrielle.