Gaz et électricité : la concurrence sur le marché belge reste enrayée

Baptiste Lambert

En Belgique, les marchés de l’électricité et du gaz restent dominés par une poignée d’acteurs historiques. Malgré la libéralisation, le renouvellement de l’offre reste limité, en particulier à Bruxelles, où les cinq principaux fournisseurs occupent le terrain depuis une décennie. L’indice de concentration dépasse le seuil d’alerte.

En 2024, le marché belge de l’énergie a vu repartir à la hausse le taux de changement de fournisseur : +0,8 point pour l’électricité, +0,3 point pour le gaz naturel. Un signe, en apparence, de dynamisme concurrentiel. Mais derrière ces chiffres se cache une autre réalité : le nombre de fournisseurs actifs recule et la concentration du marché reste élevée, révèle un rapport des 4 régulateurs de l’énergie en Belgique, la Creg, la CWaPE, brugel et VREG.

HHI : des valeurs préoccupantes

L’indice Herfindahl-Hirschman (HHI), qui mesure le niveau de concentration d’un marché, reste supérieur à 2.500 pour l’électricité comme pour le gaz. Cette valeur est considérée comme problématique dans les standards européens. Depuis 2020, aucun recul significatif de cette concentration n’est observé.

La cause ? Une série de faillites et de rachats, mais aussi une réglementation devenue dissuasive pour les nouveaux entrants. Les obligations de service public, notamment en Wallonie et à Bruxelles, s’alourdissent d’année en année. Et les marges se réduisent.

Le marché bruxellois est le plus figé. Les cinq principaux fournisseurs d’électricité y sont restés inchangés depuis près de dix ans. Engie Electrabel et TotalEnergies Power & Gas Belgium y occupent toujours une position dominante. Un manque de renouvellement qui interroge sur la capacité du marché à s’ouvrir à l’innovation et à des offres alternatives.

Sur l’ensemble du marché belge, c’est toujours Engie qui domine (44,7% des clients pour l’électricité et 42,7% pour le gaz), devant Luminus (environ 20% des clients).

Concurrence et durabilité : un équilibre fragile

Le paradoxe est patent : la libéralisation du marché de l’énergie a bel et bien eu lieu. Les consommateurs peuvent changer de fournisseur, les offres se multiplient en apparence. Mais le fonctionnement structurel du marché reste dépendant de quelques grands acteurs, souvent peu incités à l’innovation par une concurrence moribonde.

Les régulateurs préviennent : “Une pression excessive sur les marges pourrait à terme décourager les nouveaux fournisseurs et compromettre la durabilité du marché.” En d’autres termes, plus de concurrence ne signifie pas toujours un marché plus sain.

Le renouvelable monte, mais reste concentré

Sur le plan purement énergétique, la bonne nouvelle vient de la progression du renouvelable. En 2024, 43,5 % de l’électricité fournie était d’origine renouvelable, en hausse par rapport à l’année précédente. Cette part grimpe à 61,3 % à Bruxelles, contre 44,1 % en Flandre et 38,5 % en Wallonie. Les deux principales sources sont l’éolien (50 %) et l’hydroélectricité (31 %).

Mais là aussi, les grands acteurs conservent une longueur d’avance. Près de la moitié des garanties d’origine proviennent de l’étranger, et la majorité des flux verts restent contrôlés par les principaux fournisseurs. La transition énergétique progresse, mais dans un cadre de marché encore verrouillé.

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