Emmanuel de Merode: “Le parc des Virunga peut être le moteur d’une nouvelle économie congolaise”

Emmanuel de Merode: "Il faut créer une industrie alternative pour contrer l'exploitation illégale du parc." © Getty Images
Christophe De Caevel
Christophe De Caevel Journaliste Trends-Tendances

L’anthropologue belge Emmanuel de Merode dirige le parc national des Virunga depuis quinze ans. Dans l’émission Trends-Talk, il explique comment il mise sur le développement économique pour apaiser la région et préserver les nombreuses espèces qui y vivent, notamment les grands primates.

Éléphants des savanes, hippopotames, okapis, gorilles des montagnes… le parc national des Virunga, dans l’est de la République démocratique du Congo, recense de nombreuses espèces animales en voie de disparition. Son importance pour la préservation de la biodiversité sur la planète lui a valu d’être inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO.

Le parc national des Virunga s’étend sur près de 800.000 hectares. Depuis quinze ans, l’anthropologue belge Emmanuel de Merode est chargé de sa gestion. Une tâche cruciale et, surtout, dangereuse, car des groupes paramilitaires rivaux occupent plusieurs zones de ce parc. La faune du parc fait l’objet de trafics importants et l’habitat de ces animaux, en particulier les grands primates, est saccagé par la déforestation. Les arbres sont transformés en charbon de bois, qui sera expédié vers les villes alentours. « Il servira à cuire les aliments et à faire bouillir l’eau pour la stériliser, explique Emmanuel de Mérode, au cours de l’émission Trends-Talk, diffusée sur Canal Z. Ce n’est pas un luxe, c’est une nécessité absolue pour ces gens. » Il a donc décidé de construire une alternative au charbon de bois : des centrales hydroélectriques, financées notamment par l’Union européenne.  « Nous ne sommes pas simplement un parc national qui protège ses écosystèmes par des méthodes policières classiques, nous voulons qu’il devienne le moteur d’une nouvelle économie, dit-il. L’électricité que nous produisons alimente les hôpitaux, les écoles, mais aussi les entreprises. Chaque MWh produit permet la création de 800 à 1000 emplois. »

Emmanuel de Merode prolonge le raisonnement et veut que les Virunga développent des activités industrielles, qu’on y transforme les matières premières locales. Il a créé la marque Virunga Originis qui propose des produits textiles, du café et, surtout, du chocolat. « Je n’ai jamais vécu en Belgique, mais c’est plus fort que moi : j’aime le chocolat, sourit Emmanuel de Merode. Le Congo est en train de devenir l’un des trois plus grands producteurs de cacao au monde, dit-il. Il ne faut pas l’exporter dans sa forme brute, mais le transformer au Congo. Il est important de construire toute la filière au Congo et, en particulier la production du chocolat. » Les produits estampillés Virunga Origins s’écoulent principalement en RDC. Leur confection fournit du travail notamment aux veuves des quelque 200 rangers tués depuis vingt ans dans l’exercice de leur fonction de protection de la biodiversité du parc

Au cours de l’entretien pour Canal Z, Emmanuel de Mérode évoque également les relations belgo-congolaises. « Si la Belgique cherche à avoir une influence positive dans le monde, ça doit être avant tout au Congo, dit-il. Mais ça doit être un partenariat moderne, fondé sur le respect mutuel. Aujourd’hui, l’engagement mondial vis-à-vis de l’Afrique est insuffisant. Des opportunités sont perdues, y compris sur le plan économique, car nous ne faisons pas les efforts requis et c’est dommage. »

Retrouvez tous les Trends Talk

Partner Content