Emergence des obligations vertes
Tant sur les obligations que sur les actions, les possibilités d’investir “vert” sont nombreuses.
Depuis le sommet de Paris sur les changements climatiques en 2015 (Cop21), l’environnement est devenu un sujet central dans l’industrie des fonds de placement. Si pratiquement tous les gestionnaires proposent aujourd’hui des fonds ISR (investissement socialement responsable) et appliquent des critères ESG (environnement, social, gouvernance) dans la sélection de leurs différentes lignes individuelles, il existe toutefois des produits qui permettent de s’exposer de manière beaucoup plus directe sur les thématiques environnementales.
Secteur porteur
Du côté des placements boursiers, les fonds “écologiques” font partie du paysage depuis de nombreuses années, les plus anciens affichant déjà des historiques de performance supérieurs à 10 ans. Sur un horizon de cinq ans, les meilleurs fonds affichent des progressions annualisées largement supérieures à 10 %, le fonds de Nordea (Nordea 1 – Global Climate Change and Environment) menant la danse avec une progression annuelle proche de 15 %, et des actifs sous gestion qui ont doublé durant les six derniers mois.
Le gestionnaire base sa philosophie d’investissement sur les difficultés qu’éprouvent généralement les analystes boursiers à analyser correctement les flux de trésorerie futurs des sociétés exposées sur ces thématiques environnementales. Il se distance également des secteurs trop fortement soutenus par les subsides publics et qui ne seraient pas capables de survivre sans une intervention externe. Typiquement, les meilleurs fonds de cette catégorie jouent sur de nombreux sous-secteurs liés à la protection de l’environnement et à une utilisation plus efficaces des ressources naturelles, plus particulièrement l’eau et l’électricité.
Croissance rapide
La plupart de ces fonds obtiennent également quatre à cinq étoiles Morningstar, leur performance ayant été historiquement supérieure à celle de l’indice MSCI World. Pour Gabriel Micheli, cogestionnaire du fonds Pictet-Global Environment Opportunities, les perspectives restent très favorables pour ces fonds. “Tous les segments dans lesquels nous sommes investis ont enregistré une croissance très largement supérieure à celle affichée par l’économie globale, soit autour de 6 % par an. Et nous anticipons que la tendance restera positive durant les prochaines années.”
“Nous apprécions par exemple des sociétés qui développent des logiciels spécialisés permettant de réduire l’utilisation de ressources (Ansys, Keyence), des groupes exposés sur l’électrification des transports (Infineon), des spécialistes de la sécurité alimentaire (ThermoFischer, Agilent) ou une meilleure utilisation des ressources d’eau potable (Xylem, Ecolab).” En outre, Gabriel Micheli souligne qu’en dépit de la forte performance de ces dernières années, la valorisation du secteur demeure encore en ligne avec le reste du marché, en raison de la forte croissance des résultats. “Enfin, le profil est également nettement meilleur en termes d’émissions de carbone, avec une diversification géographique bien répartie sur l’ensemble des grandes zones géographiques.” Si les marchés émergents représentent seulement 5 % des actifs sous gestion du fonds, en termes de chiffre d’affaires, l’exposition sur ces marchés approche plutôt 25 %.
Classe émergente
Pour ce qui est des marchés obligataires, la dynamique est beaucoup plus récente. Le marché des green bonds n’existait en effet tout simplement pas il y a 10 ans et le volume d’obligations vertes ne dépassait pas 12 milliards de dollars il y a cinq ans. “Nous avons terminé l’année à plus de 135 milliards de dollars, avec une augmentation de plus de 50 milliards de dollars par rapport à 2016.”
Sur les derniers mois, ce sont ainsi trois fonds qui ont été lancés sur cette classe d’actifs émergents, notamment chez NN Group (NN Euro Green Bonds), BNP Paribas Asset Management (Parvest Green Bonds) et Allianz Global Investors. Chez ce dernier gestionnaire, Julien Bras, cogestionnaire du fonds Allianz Green Bonds, souligne toutefois que rien ne distingue fondamentalement une obligation verte d’une obligation classique. “Fondamentalement, le risque reste celui de l’émetteur de l’obligation, si ce n’est que les fonds récoltés par ces émissions sont destinés à financer des projets ayant pour objectif d’avoir un impact positif au niveau environnemental.”
Diversification
Alors que cette classe d’actifs était auparavant surtout utilisée par des banquiers internationaux (Banque mondiale, IFC), le marché s’est fortement diversifié ces dernières années, avec de plus en plus d’émetteurs corporate qui sont venus lever des fonds sur ce segment du marché. “L’intérêt est élevé en provenance de certains secteurs très spécifiques, comme les utilities (pour financer leurs investissements dans les énergies renouvelables), les transports (électrification de lignes ferroviaires) ou le secteur financier (financement de projets). Nous avons également vu un groupe comme Apple venir financer son projet de transition énergétique visant à ne plus être dépendant de sources d’énergie fossiles dans le futur”, indique encore Julien Bras.
Il souligne que les émissions corporate représentent aujourd’hui 60 % des actifs sous gestion dans son fonds, lequel dispose également d’une possibilité de s’exposer à hauteur de 5 % sur les obligations vertes à haut rendement. Et sur les marchés émergents, le marché des green bonds devrait également se développer rapidement durant les prochaines années (lire l’encadré).
Réglementations
Il est encore fondamentalement trop tôt pour pouvoir juger de l’intérêt des investisseurs de s’exposer sur cette classe d’actifs, les performances risquant d’être décevantes dans un contexte de redressement des taux d’intérêt. Mais pour les investisseurs soucieux d’avoir un impact environnemental positif, l’émergence de ces produits permet aujourd’hui de pouvoir adopter un comportement “vert” sur l’ensemble d’un portefeuille investi sur des classes d’actifs classiques (actions, obligations).
“Endéans les deux prochaines années, nous devrions également voir l’apparition d’un cadre réglementaire, vu que cette forme d’investissement ne fait aujourd’hui l’objet d’aucune définition précise, notamment au niveau européen, souligne encore Julien Bras. Une fois ce cadre établi, je m’attends à voir un grand intérêt de la part des sociétés industrielles, qui devraient utiliser cette nouvelle forme de financement pour restructurer leur outil de travail.”
Amundi lance le plus gros fonds en obligations vertes émergentes
Amundi vient de lancer le plus gros fonds en obligations vertes sur les pays émergents, lequel a souscrit environ 2 milliards d’euros pour son lancement. Amundi Planet-Emerging Green One est un fonds fermé, destiné principalement aux investisseurs institutionnels et qui sera dans un premier temps principalement exposé sur des obligations gouvernementales. D’ici sept ans, il devrait être toutefois complètement investi en green bonds émergents, sur des projets sélectionnés en collaboration avec IFC, un spécialiste du financement dans ces pays. Ensuite, ce fonds (dont l’échéance est fixée à 2030) devrait passer les cinq dernières années de son existence à rembourser ses investisseurs, en visant une rentabilité annuelle nette de frais tournant autour de 4 %. Si ce produit contribue à la création d’une nouvelle classe d’actifs, nul doute que des produits destinés aux investisseurs retail verront le jour durant les prochaines années.
Fonds 2018
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