Méthanol : Un bateau, mais pas d’usine
Anvers vient de lancer en primeur mondiale un remorqueur fonctionnant au méthanol mais – les temps ayant changé – ne construira pas d’usine-pilote appelée à promouvoir ce nouveau type de carburant.
Après l’hydrothug, un remorqueur fonctionnant à l’hydrogène lancé en primeur mondiale fin de l’année dernière, le port d’Anvers-Bruges poursuit son cheminement vers une neutralité climatique à l’horizon 2050 avec le lancement, également en première mondiale, du metathug, le premier remorqueur au monde propulsé au méthanol. Liquide à température ambiante, ce dernier peut être produit à partir de sources éternellement renouvelables : l’air et l’eau. Par électrolyse, cette dernière se décompose en effet en oxygène et hydrogène. Combiné au dioxyde de carbone (CO2), ce dernier gaz est alors transformé en méthanol vert, communément appelé e-méthanol.
Confiant dans l’avenir de ce nouveau type de carburant, le port d’Anvers ainsi que le gouvernement flamand s’étaient engagés dans Power to Methanol, un consortium au sein duquel chacun des sept partenaires apportait son savoir-faire : Engie, sa connaissance du marché de l’électricité ; Indaver, sa maîtrise en matière de captation de CO2 et Fluxys, son expérience en gaz verts. La Vlaamse Milieuholding assurait une partie du financement tandis que le port d’Anvers servait de pont entre le secteur privé et les pouvoirs publics. Oiltanking – aujourd’hui Advario – veillait sur la logistique, la production et le stockage. Inovyn enfin, une filiale d’Ineos, mettait un terrain à disposition pour la construction d’une usine-pilote capable de produire 8.000 tonnes de méthanol durable par an avec à la clé, une réduction équivalente de CO2.
Le port d’Anvers-Bruges poursuit son cheminement vers une neutralité climatique à l’horizon 2050.
Dans un premier temps, le méthanol ainsi produit était destiné à l’industrie chimique locale, grande consommatrice de cette molécule et ne deviendrait carburant qu’après un changement d’échelle. Mais le covid s’est mis en travers. Les prix ont explosé et en ce début d’année le projet, désormais considéré comme financièrement irréalisable, a été arrêté. Ce semi-échec n’occulte en rien la prestation de l’entreprise à la base des deux primeurs mondiales évoquées en début d’article : l’Anglo Belgian Corporation (ABC). Constituée en 1912 par neuf industriels belges ou britanniques – d’où son appellation – intéressés par les moteurs diesels alors naissants, ABC est aujourd’hui filiale d’Ogepar, un groupe familial qui a réalisé en 2022 un chiffre d’affaires consolidé de 478 millions d’euros, en progression de 50%. Spécialisé dans les moteurs lents, ABC produit en interne 85% des composants nécessaires et possède, ce qui fait sa force, ses propres fonderies.
En début d’année, ABC a signé avec Jan De Nul un contrat visant à permettre aux différents moteurs du câblier le plus récent du groupe (Fleeming Jenkin) de fonctionner au (bio)diesel, à l’huile végétale hydrotraitée (HVO) ainsi qu’au méthanol. Et voici quelques semaines, il a pris le contrôle du suisse Hug Engineering, un des acteurs majeurs dans les systèmes de dépollution pour moteurs à forte puissance. En juin 2022, l’actuel CEO de l’entreprise est devenu président d’Agoria Vlaanderen.
Par Guillaume Capron
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