Les bioplastiques: l’alternative fantastique ?
Le développement des bioplastiques peut-il nous permettre de réduire notre impact sur l’environnement? Alors que 9 millions de tonnes de plastique finissent chaque année dans les océans, l’idée séduit de nombreux acteurs en Belgique et ailleurs. Pourtant, les critiques se multiplient. Alors, fantasme ou opportunité? Tout dépend des applications visées.
Qu’est-ce qu’un bioplastique? A priori, la réponse est simple. Le terme désigne deux grands types de matériaux: d’un côté, les plastiques biosourcés, produits à partir de matières organiques renouvelables ; de l’autre, les plastiques biodégradables, qui doivent pouvoir se décomposer à 90% dans les six mois. Mais ces deux catégories sont loin de coïncider. Un plastique biosourcé n’est pas forcément biodégradable. Quant au plastique biodégradable, il peut être entièrement pétrosourcé.
La Belgique en pointe
La législation européenne progresse en matière de collecte des biodéchets, et donc des bioplastiques. Mais les critères de fabrication, eux, restent très vagues. Pas de seuil minimal dans la composition des plastiques biosourcés, ni d’interdiction de recourir à des engrais ou à la déforestation pour en produire les matières premières. Pas d’obligation non plus pour un bioplastique biodégradable de l’être dans la nature ou dans un compost domestique. Pour éviter les confusions, la Belgique a donc pris les devants. Depuis 2008, toute mention “biodégradable” sur un emballage plastique est interdite, seule la mention “compostable” est autorisée.
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Recherche académique
La recherche en matière de bioplastiques foisonne, y compris en Belgique. Le 4 juillet prochain, Michiel Dusselier et Bert Sels, professeurs à la KU Leuven, seront d’ailleurs en lice pour remporter le Prix de l’inventeur européen 2023. Leur innovation: un procédé catalytique en une étape unique pour produire l’acide polylactique (PLA). “Ce bioplastique est l’un des plus utilisés. Il présente des propriétés intéressantes en matière d’émissions de CO2 par exemple, mais il a toujours coûté très cher à produire. Nous avons élaboré un procédé pour rendre cette production plus abordable, plus facile et plus verte”, explique Michiel Dusselier.
100% soluble
Même s’ils gagnent en popularité dans l’automobile ou même la construction, c’est à 48% dans le secteur de l’emballage que les bioplastiques sont utilisés. PolyPea n’a d’ailleurs pas choisi ce créneau par hasard. Créée en 2020, la société wallonne développe un film bioplastique à base d’amidon de pois. “Sa particularité, c’est qu’il est parfaitement soluble dans l’eau et donc idéal pour les pods de lessive ou de lave-vaisselle”, précise Gilles Crahay, son fondateur. Détenue à 75% par Cosucra, le spécialiste de la protéine d’amidon, PolyPea bénéficie aussi, depuis ses débuts, du soutien de la Région wallonne. Prochain étape: une levée de fonds de 1,5 million d’euros. “L’argent va nous permettre d’acheter une machine et d’embaucher pour commencer à commercialiser notre produit au plus tard début 2025.”
Applications de niche
Si les bioplastiques comptent aujourd’hui pour moins de 1% des plastiques produits dans le monde, les capacités de production devraient augmenter de 184% d’ici 2027 d’après European Bioplastics. Mais attention aux applications visées, prévient Gilles Crahay: “Les bioplastiques doivent faire partie du panel de solutions dans le futur mais ne sont pas la solution miracle. Ils ont un intérêt uniquement si le plastique ne peut être ni évité, ni réutilisé, ni recyclé, ou que des particules se retrouvent dans l’environnement”. Exemples: les plastiques solubles justement, les fibres textiles ou encore les films de paillage agricole. “L’idée n’est pas de remplacer tous les plastiques conventionnels par des bioplastiques. En simplifiant la composition des produits, en adaptant leur design et en développant les filières de collecte, on peut espérer que 90% des plastiques seront recyclés d’ici 50 ou 100 ans. En revanche, pour les 10% restants, les bioplastiques auront clairement un rôle à jouer”, conclut le professeur Dusselier.
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