Carlos Brito (CEO AB InBev): “La direction aussi subit les effets néfastes de la faiblesse du cours”
L’assemblée générale des actionnaires d’AB InBev a une fois de plus été placée sous le signe de l’endettement élevé et de la faiblesse du cours. Mais le CEO Carlos Brito et sa direction en acceptent les conséquences. “La direction souffre autant que vous actionnaires de ces récoltes peu abondantes. La majeure partie de notre rémunération est constituée d’un salaire variable, qui est lié au cours de l’action.”
Les actionnaires d’AB InBev qui détiennent ensemble 77% des deux milliards d’actions (soit 1,55 milliard) se sont réunis le 24 avril dernier en assemblée générale. Pendant près de deux heures, ils ont soumis la direction à rude épreuve. Le CEO Carlos Brito, le CFO Felipe Dutra et le président sortant Olivier Goudet ont été interrogés à maintes reprises sur l’endettement élevé et l’évolution négative du cours de Bourse.
AB InBev a clôturé 2018 avec une dette de 110 milliards de dollars. Afin d’accélérer la réduction de celle-ci, le dividende a déjà été réduit de moitié l’année dernière à 1,80 euro brut. “L’état de nos liquidités n’est pas un sujet de préoccupation”, a rassuré le directeur financier Felipe Dutra. “La dette est contractée à 94% à taux fixe. Nous devons rembourser environ 6 milliards de dollars par an, ce qui est largement réalisable avec notre flux de trésorerie. Nous réalisons chaque année un cash-flow solide.” Fin 2018, le géant brassicole disposait de 16 milliards de dollars de liquidités.
Le CEO Carlos Brito n’a pas commenté le cours de l’action. “Mais il va de soi que la faiblesse du cours n’est pas une bonne chose pour la direction non plus. Nous souffrons autant que vous actionnaires de ces récoltes peu abondantes. La majeure partie de notre rémunération est constituée d’un salaire variable, qui est lié au cours de l’action.” L’an dernier, le prix d’exercice de nos options était supérieur au cours de Bourse. La direction a donc plongé également. Mais ces options sont versées à plus long terme, après cinq à dix ans. Nous avons une vision à long terme.”
Croissance du chiffre d’affaires et des volumes
Ce long terme signifie une croissance du chiffre d’affaires et des volumes, notamment par le biais de la vente de marques premium. “Nous nous efforçons bien entendu d’augmenter les volumes, mais sans mettre à mal la rentabilité”, souligne le CEO. “Aujourd’hui, il est bien plus difficile de soutenir la croissance dans de nombreux pays. Nous segmentons beaucoup plus le marché, nous créons des niches et nous élargissons la gamme avec de nouvelles catégories, comme les bières sans alcool.”
Depuis quelques mois, des rumeurs circulent à propos d’une possible introduction en Bourse des activités asiatiques. L’an dernier, l’Asie a représenté un volume de 104 millions d’hectolitres (18% du total) et un chiffre d’affaires de 8,5 milliards d’euros (plus d’un sixième du chiffre d’affaires consolidé). Le groupe brassicole est le leader du marché en Australie et le numéro deux en Chine en termes de volume. La Chine est le quatrième marché du groupe, après les États-Unis, le Brésil et le Mexique.
“En Chine, nous sommes le brasseur le plus rentable et le leader du marché dans le segment premium”, ajoute Carlos Brito. “Une entrée en Bourse en Asie ? Il ne s’agit que de rumeurs véhiculées par des journalistes et des analystes, elles ne proviennent pas de chez nous. Nous détenons également le leadership en Corée du Sud. Le Japon, le Vietnam et l’Inde sont aussi des marchés prometteurs. L’Inde possède à nos yeux le même potentiel qu’un pays comme la Chine. Nos marques premium en particulier y enregistrent une belle progression.”
“Vous allez vous mettre à vendre des voitures?”
Un actionnaire a interrogé la direction sur l’élargissement de l’objet social du groupe qui inclut désormais “la production et le commerce de toutes espèces de produits” et “la fourniture de tous types de services”. Le premier brasseur mondial pourra également vendre des sous-produits et accessoires. “Que signifie ce changement ? Vous allez vous mettre à vendre des assurances et des voitures ?”, a demandé l’actionnaire sur un ton ironique.
“Bien sûr que non”, a rétorqué Carlos Brito. “Mais nous nous sentions à l’étroit dans notre objet social. Dorénavant, nous avons également la possibilité de vendre les résidus issus de notre processus de brassage. Ces résidus contiennent par exemple des protéines. Nous envisageons également des biens et des services complémentaires pour nos distributeurs et commerçants en boissons.”
Marty Barrington
Cette AG était la dernière du président sortant Olivier Goudet. Le Franco-Américain, ancien CEO du groupe agroalimentaire Mars, a été administrateur indépendant d’AB InBev pendant huit ans, dont quatre en tant que président. “Ce qui m’a le plus impressionné en huit ans ? La culture d’entreprise, le leadership d’AB InBev. Carlos Brito est un CEO incroyable. Le groupe brassicole est le leader mondial dans le segment haut de gamme. Je suis très optimiste quant à l’avenir de cette entreprise.”
Son successeur à la présidence est l’Américain Marty Barrington (63 ans), ancien CEO et président d’Altria. Cette holding cotée en Bourse est propriétaire du fabricant de cigarettes Philip Morris. Avec 50% et la marque Marlboro, ce producteur de tabac est le leader du marché aux États-Unis. Altria détient un dixième des actions d’AB InBev.
Traduction : virginie·dupont·sprl
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