Un peu plus de trois ans après le rachat par le groupe français BNP Paribas, la banque Fortis -dont l’Etat belge est actionnaire à hauteur de 25%- a aujourd’hui renoué avec la stabilité et joue pleinement son rôle de soutien de l’économie, même si le contexte macro-économique belge reste incertain.
Tel est le message rassurant qu’ont tenu à faire passer les dirigeants de la banque belge, auditionnés vendredi par la commission de suivi de la Chambre sur la crise financière de 2008.
Devant les députés, Herman Daems et Max Jadot, respectivement président du CA et président du comité de direction de la banque, ont détaillé comment celle-ci avait, en l’espace de trois ans, réduit son bilan de 41%, le faisant passer de 586 milliards à 346 milliards d’euros. Cette réduction substantielle de voilure s’est concrétisée par un fort désengagement de sa présence aux USA, et ce pour se recentrer sur la Belgique qui représente aujourd’hui plus de trois quarts de son bilan.
Malgré cette cure d’amaigrissement, la banque a préservé son volume d’emploi -qui tourne autour de 17.000 travailleurs, avec de nouveaux engagements encore prévus cette année- et continue pleinement à soutenir l’économie, selon ses dirigeants. Jouissant de dépôts en progression constante, Fortis n’a pas réduit ses prêts, son taux de refus de crédit évoluant depuis 2009 dans une fourchette de 4 à 6% seulement, soit bien moins que la moyenne dans le reste de l’Europe (10%).
Grâce à ces efforts, la banque jouit aujourd’hui d’un ratio de fonds propres durs (core tier 1) très confortable de 16,5%, soit bien plus que la moyenne européenne qui tourne autour des 10%, ainsi que d’une bonne liquidité. Concernant ce dernier point néanmoins, les dirigeants de Fortis ont toutefois tenu à faire part de leur “grande préoccupation” quant aux exigences de liquidités prévues par la future réglementation dite “Bâle III”.
Ainsi, pour Herman Daems, ces nouvelles règles pourraient “menacer le modèle bancaire belge”, et assécher à long terme les possibilités de crédits, ce qui impacterait inévitablement l’économie du pays, a-t-il averti.
Interrogé sur la politique de rémunération et bonus des cadres, le président du CA de Fortis a assuré que celle-ci avait été revue au lendemain de la crise: “Il y a eu des changements fondamentaux. On n’est plus au niveau (de rémunérations) où on était dans le passé…”. Vu les velléités de légiférer en matière de rémunérations pour ce secteur, M. Daems a préconisé une réglementation européenne plutôt que nationale, au risque au sinon de voir “l’expertise financière quitter Bruxelles au profit de Paris ou Londres”, selon lui.
Quant au projet de séparation d’activités entre banques de dépôt et banques d’affaires, Fortis n’y est clairement pas favorable. “Le modèle séparé n’est pas exempt d’accident”, a objecté Max Jadot, prenant pour exemple les naufrages récents de deux banques non-universelles, la banque britannique de dépôt Northern Rock et la banque d’affaires américaine Lehman Brothers. “La séparation n’est donc pas une garantie contre les échecs. (…) Ce qu’il faut, c’est de la régulation”, a-t-il plaidé.
Selon Herman Daems, séparer les activités bancaires en Belgique pourrait même sérieusement compliquer le financement des PME belges, très présentes à l’international, a-t-il justifié.
Interrogé enfin sur de prétendus flux financiers de la filiale belge Fortis vers sa maison-mère française BNP Paribas, Max Jadot a tenu à les relativiser fortement: ceux-ci existent, mais ne s’élèvent qu’à 25 milliards d’euros, dont 1,9 milliard de Fortis vers BNP Paribas. “C’est marginal au regard du bilan de la banque…”, a rassuré le patron de la banque belge.
Il a également démenti toute externalisation de certains services aujourd’hui propres à la banque vers l’étranger. “Aucun out-sourcing n’est engagé pour le moment”, a garanti M. Jadot. Mais sans présager pour l’avenir toutefois: “L’avenir est ce qu’il y a de plus incertain au monde…”, a-t-il conclu.
Trends.be, avec Belga.