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Pourquoi le gouvernement fait-il tout à l’envers?
Pour un gain budgétaire infime, le gouvernement a pris le risque d’abandonner une mesure utile et structurante.
Pourquoi faire tout à l’envers? Le gouvernement vient de décider d’abandonner les intérêts notionnels, à un moment où l’Europe veut les adopter, où l’argent recommence à devenir cher parce que les taux d’intérêt remontent et où les entreprises, encore ébranlées par le choc du covid, doivent investir massivement dans la transition énergétique.
Certes, cette suppression permettra d’alléger un peu le budget: elle devrait faire gagner 126 millions en deux ans au budget de l’Etat. Certes, ces intérêts notionnels avaient aussi été critiqués parce qu’ils n’avaient pas été construits pour vraiment inciter à injecter du capital frais, et parce qu’ils permettaient à quelques multinationales de trouver une petite compensation à la disparition du régime des centres de coordination.
Nous n’allons pas nier ces faiblesses. Mais il était possible de les faire disparaître sans dynamiter l’entièreté du régime. On pouvait le limiter aux petites entreprises qui sont celles qui en ont vraiment besoin, particulièrement au sud du pays.
En présentant sa proposition, en mai dernier, la Commission européenne avait d’ailleurs fait la même analyse que la Belgique en son temps: de nombreux pays traitent la dette plus favorablement que les capitaux propres d’un point de vue fiscal, en autorisant la déduction des paiements d’intérêts du revenu imposable. Un tel biais fiscal incite les entreprises à s’endetter plutôt qu’à renforcer leurs capitaux propres, alors qu’il faudrait au contraire les inciter à doper leur capital.
D’abord parce que favoriser les fonds propres rend les entreprises plus fortes et plus résilientes aux chocs. Ensuite parce que, comme le souligne la Commission, les fonds propres sont particulièrement importants pour les entreprises innovantes à croissance rapide et pour celles qui souhaitent se développer mondialement. Enfin parce que la transition énergétique nécessite de nouveaux investissements dans les nouvelles technologies. Selon la Commission, “plus de 50% des investissements verts dans les années à venir proviendront de nouvelles technologies, ce qui nécessite un financement plus risqué”.
Pour un gain budgétaire infime, le gouvernement a pris le risque d’abandonner une mesure utile et structurante pour les années qui viennent. Une mesure qui devrait, en outre, revenir sous peu par le biais d’une directive européenne. La crédibilité du politique prendrait alors un nouveau coup. Mais pourquoi donc tout faire à l’envers?
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