Carte blanche
Open-banking: nous payons trop souvent le coût de la lenteur
L’ouverture des données financières prévue dans la directive PSD2 a permis d’atteindre une meilleure visibilité sur nos comptes de paiement. De nouvelles applis ont vu le jour pour jouer un rôle de banquier ou comptable ” de poche “. Cependant, bien que ces nouvelles fintechs aient amélioré l’expérience client, l’open-banking est toujours en chantier et tarde à délivrer ses promesses.
Moyennant une intégration bancaire et financière de bout en bout, fintechs et banques pourraient véritablement développer ce “conseiller” bancaire numérique disponible 24h/24. Elles permettraient ainsi aux citoyens de mieux utiliser leurs finances et aux entreprises de diminuer les risques liés à leur cashflow. Aujourd’hui, nos PME belges payent trop souvent le coût de la lenteur des processus de décisions financières.
Une décision financière, prise sur un coup de tête ou basée sur des informations périmées, peut ébranler les économies personnelles et la trésorerie des entreprises. A l’opposé, une vaste majorité d’investissements demande d’être le plus réactif possible avant de perdre en intérêt. Faire le bon choix au bon moment n’est pas toujours évident. C’est là que l’open-banking a une réelle carte à jouer grâce à l’intégration de l’ensemble de vos données financières, de vos paiements en attente et de votre profil financier actuel.
Sous forme d’application, un conseiller numérique aiderait à prendre des décisions réfléchies sans friction. Plus besoin de se détourner du parcours de décision : la réponse à toute question financière serait désormais accessible en temps réel, au moment où la décision doit être prise. L’open-banking encouragerait ainsi une utilisation plus responsable de son argent, pour les entreprises comme pour les individus. Cela éviterait à coup sûr bon nombre de surendettements ou de faillites.
Des dépenses plus responsablesEn parallèle, nous constatons aussi une demande croissante pour une gestion plus durable de l’argent. L’objectif serait de favoriser les investissements plus soucieux de l’environnement et plus conscients de l’impact sur nos sociétés. Selon nos critères choisis dans nos outils financiers, nous devrions être parfaitement en mesure d’intégrer, entre autres, un facteur écologique dans nos prises de décisions. Pourquoi ne pas rajouter à son navigateur une extension basée sur nos données bancaires pour un shopping en ligne plus éco-responsable ? Par exemple, ce plugin pourrait transformer les prix affichés en rouge ou en vert. Ainsi, cela indiquerait instantanément si un achat constitue un choix raisonnable selon le profil du consommateur, ou qu’il correspond à ses moyens. L’outil serait capable de mieux guider nos décisions, sans avoir besoin que chaque plateforme d’e-commerce dans le monde n’intègre un accès aux informations bancaires des clients.
D’une façon, de telles astuces, voire plateformes de coaching financier personnel, sont déjà disponibles. Les deux fintechs belges Cake et Accountable, par exemple, montrent clairement les possibilités d’une finance plus ouverte. La prochaine étape consisterait à enrichir davantage les données pour une finance instantanée et une prise de décision financière plus facile. D’ici aux réels guides financiers basés sur les critères définis par les acheteurs et les services financiers des entreprises, il n’y a qu’un pas.
Notre système financier ferait alors réellement peau neuve. Concrètement, nos applications bancaires seraient capables de choisir un nouveau fournisseur d’énergie à notre place, selon nos finances et nos valeurs. Ce type de services existe déjà chez la banque belge Aion, mais celle-ci oriente plutôt vers le fournisseur le moins cher, sans évaluer d’autres critères. En France, c’est l’inverse : certaines fintechs proposent des services spécifiquement concentrés sur la durabilité des dépenses via un système d’éco-score.
Une demande à la haussePetit à petit, les banques se font à l’idée d’une finance davantage basée sur l’ouverture des données. Si elles entrent dans le bain, c’est qu’elles y voient un intérêt. Limiter les risques de faillites ou d’endettements, grâce à de meilleurs conseils basés sur le rapprochement des données, est déjà un argument suffisamment motivant en soi.
L’open-banking ouvre la voie à une gestion de l’argent plus transparente, plus responsable et éco-responsable. A côté des fintechs qui travaillent déjà activement dans cette direction, les banques ont brandi pendant longtemps le spectre de la désintermédiation. Pourtant, elles détiennent les clés pour le développement de cette “intimité client” poussée à l’extrême. Les banques qui misent sur l’intégration d’une telle offre dans leurs services parviendront à ce niveau d’expérience personnalisée qui semble devenir la norme. En revanche, celles qui cherchent à tout ramener dans leurs applications créent, au final, plus de confusion dans les choix de leurs clients.
La crise de la COVID aura joué un rôle de catalyseur de cette tendance. Plusieurs sociétés ont été contraintes de prendre des décisions plus rapidement qu’avant. Cela a nécessité une automatisation plus poussée que ce dont elles avaient l’habitude auparavant. La pandémie aura ouvert grand la porte vers une finance instantanée qui, dans un futur plus ou moins proche, aidera à faire de meilleurs choix en matière de dépenses, d’épargnes et d’investissements.
Marc Lainez, VP API Marketplace chez Isabel Group.
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