Les milliards du bon d’État : la bataille pour les récupérer a commencé

Sebastien Buron
Sebastien Buron Journaliste Trends-Tendances

Les comptes à terme, les bons de caisse et les assurances-épargne sont au centre de l’attention alors que les banques et les compagnies d’assurance se préparent à capter une grande partie des 22 milliards d’euros collectés par le bon d’État à un an, qui arrivera à échéance le 4 septembre.

Voici un an, le ministre des Finances Vincent Van ­Peteghem lançait son fameux bon d’Etat à un an. Le 4 septembre exactement, l’Etat remboursera les quel­que 600.000 Belges qui ont placé une partie de leur épargne dans l’offre du gouvernement. D’ici quelques semaines, ils récupéreront le capital bloqué pendant 12 mois ainsi que les intérêts promis, soit 2,81 % de la somme investie. Ce sera alors le jour J pour les banques qui ont vu près de 22 milliards – du jamais vu dans l’histoire financière du pays – quitter en quelques jours leur bilan alors qu’elles ne s’y attendaient pas. Et donc, environ 10 % du volume total de l’épargne des Belges sera bientôt libérée avant ensuite de chercher à se réinvestir auprès du plus offrant.

Les banques se préparent

Voilà pourquoi les offres promotionnelles se multiplient ces dernières semaines du côté des ban­ques. But de la manœuvre ? Attirer les clients pour récupérer l’argent qu’ils ont investi dans le bon Van Peteghem à la fin de l’été dernier. La première à avoir lancé le mouvement, c’est Belfius. Face aux succès des bons d’Etat, la ban­que publique a remis les bons de caisse en bonne place dans sa vitrine. Le taux de celui à un an s’élève actuellement à 3 % brut, soit 2,10 % net de précompte mobilier. Elle a par ailleurs relevé les taux pour tous ses autres bons de caisse allant de deux à dix ans.


En face, BNP Paribas Fortis se montre aussi très active. Outre l’émission de plusieurs nouveaux bons de caisse, le leader du marché a aussi lancé trois nouvelles obligations : à 15 mois, 3 et 5 ans. Tiens, tiens… Le rendement net de l’obligation à 15 mois se monte à 2,11 %, juste au-dessus du rendement du bon de caisse à un an de Belfius. Autre particularité de l’offre : les clients intéressés ont jusqu’au 31 juillet pour y sous­crire, soit un mois avant l’échéance du bon d’Etat Van Peteghem. Mais, petite astuce marketing de plus, il ne faut verser le montant sonnant et trébuchant de son placement que le 5 septembre, soit le lendemain de l’échéance du bon d’Etat, au moment où l’argent sera disponible sur son compte.


Autre exemple : vdk. Voulant elle aussi être en bonne position pour profiter de cette manne de 22 milliards du bon Van ­Peteghem qui reviendra sur le marché à la fin de l’été, la petite banque gantoise propose pour sa part, jusque début septembre, de nouveaux bons de caisse verts (à impact énergétique) d’une durée allant de un à dix ans, celui à un an étant assorti d’un rendement de 3 % brut, soit 2,10 % net.


Dans un autre registre, la banque en ligne Keytrade a pour sa part choisi d’accorder un rendement supplémentaire de 0,50 % aux épargnants disposant d’un bon d’Etat qui expirera en septembre, s’ils le transfèrent chez elle, espérant ainsi qu’ils choisiront ses produits de placement au moment de recycler leur épargne. Quant à Beobank, elle a décidé de ren­dre publics les taux de ses comptes à terme. Dans un souci de transparence, “pour faciliter également la comparaison et permet­tre de faire un choix éclairé”, dit la banque, les taux de ses comp­tes à terme sont dorénavant clairement affichés sur son site internet, alors qu’ils étaient jusqu’ici confidentiels.


Mais une banque n’est pas l’autre. Si tout le monde se prépare activement, certaines institutions comme KBC ne souhaitent pas en dire trop sur d’éventuelles initiatives commerciales spécifiques. “Pour des raisons liées aux règles de la concurrence et en matière de compliance, nous ne souhaitons pas divulguer plus de détails de notre stratégie commerciale”, nous explique le service de presse du bancassureur. Idem chez ING ­Belgique qui offre un bonus, en plus des intérêts obtenus, sur un compte à terme numérique promotionnel, mais pour lequel il faut s’inscrire avant le 20 août et dont le rendement final ne sera dévoilé que quelques jours avant la date d’échéance du bon d’État, le 4 septembre.

Olivier Delfosse (Deutsche Bank Belgium)
© PG


Rien d’étonnant à cela, estime Olivier Delfosse, le CEO de Deutsche Bank Belgique : “On voit bien que certains s’échauffent et testent le marché, observe-t-il. Les épargnants ne font pas encore leur shopping. Ils attendent de voir. La vraie bagarre va commencer aux alentours du 15 août”. C’est à ce moment-là que les ban­ques essaieront d’afficher les condi­tions les plus intéressantes. “La période des soldes sera alors vraiment lancée. Il faudra avoir les meilleures offres en magasin. Je peux vous assurer que nous serons très agressifs sur les comptes à termes et certains types d’obligations”, promet Olivier Delfosse.

Les assureurs aussi

Bien sûr, les banques ne sont pas les seules à fourbir leurs armes. Certains assureurs se sont également déjà positionnés pour profiter du remboursement du bon Van Peteghem. Ethias a par exem­ple annoncé le lancement de deux nouveaux produits d’assurance épargne en branche 21 et en branche 26 (Ethias Savings 21 et Ethias Savings 26). Et ce, avec des taux qui oscillent entre 2,90 % et 3,20 % brut, selon la durée du placement et selon le type de produit souscrit. Une offre qui entre directement en concurrence avec les produits bancaires similaires, carnets de dépôt et aux autres produits d’épargne sans risque.

On est également sur le qui-vive chez AG Insurance où deux produits ont vu leurs conditions être adaptées : l’AG Invest+ (commercialisé via les courtiers) et le Future Invest Bon (commercialisé via BNP Paribas Fortis, partenaire bancaire de la compagnie). La nouvelle version offre désormais 3,50 % pendant les deux premières années puis 2,25 % pendant six ans. Les deux produits “pourraient bien répondre aux besoins de nombreux clients qui ont souscrit un bon d’Etat à un an” et qui “vont donc rechercher de nouvelles solutions d’investissement pour leur argent libéré”, avance AG Insurance, qui parle d’une “tarification inédite sur le marché”.


Bref, c’est clair : à quelques semaines de l’échéance du bon Van Peteghem, la drague aux épargnants a bel et bien commencé. Reste pour ces derniers à bien comparer toutes les offres, y compris celles qui devraient encore fleurir d’ici septembre, histoire de faire le bon choix.


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