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Les assureurs sont-ils vraiment capables de gérer nos pensions ?
Si les assureurs n’adaptent pas leur modèle, leurs clients en concluront qu’ils sont capables de mieux placer leur argent eux-mêmes. C’est ce que prétend Patrick Claerhout, journaliste chez Trends.
La pension complémentaire des belges sera à l’avenir réduite. Le rendement minimum garanti de 3,75% (les cotisations de l’employeur) et de 3,25% (part de l’employé) est devenu intenable du fait des taux d’intérêt faibles. Les partenaires sociaux se sont accordés un délai d’un mois pour mettre en palce un nouveau système. Il est probable qu’ils décideront d’un minimum au-dessus duquel un rendement variable viendra s’additionner en fonction du taux du marché.
Les garanties de rendements tombent à charge des employeurs. Ceux-ci risquaient en effet d’être aux prises avec une grande réserve d’urgence endéans quelques années. Mais ces employeurs sont eux-mêmes endettés. Lorsque, en des temps plus favorables, les assureurs sont arrivés avec la promesse de prendre en charge les rendements garantis, ils ont massivement mordu à l’hameçon. C’est ainsi que près de 80% de l’argent des pensions complémentaires belges se retrouvent dans une assurance groupe. Seul un cinquième est géré par un fonds de pension.
Maintenant que les taux d’intérêt sont bas depuis quelques années, les assureurs ne peuvent plus honorer ces rendements garantis. Les compagnies d’assurance se montrent désormais plus prudentes. En fait, elles ne se comportent plus comme des investisseurs à long terme. Elles chargent leurs portefeuilles de nombreuses obligations d’états et d’obligations d’entreprises soit-disant sans risque. Mais qui dit sans risque et prudent, dit immédiatement aussi: peu de rendement.
Les assureurs sont-ils bien aptes à gérer l’argent des pensions?
Les statistiques démontrent bien que ce sont les actions qui offrent les plus hauts rendements à long terme. Pourtant, les assureurs investissent encore à peine en actions. Il y a quinze ans, les portefeuilles d’investissement des assureurs belges se composaient encore pour un quart en actions. En 2007, la proportion était encore supérieure à 10%, maintenant à peine 5%. Résultat : ces dernières années, ils sont passés à côté d’une grande partie des gains potentiels, que d’autres investisseurs ont cependant comptabilisés sur les marchés financiers.
Pour expliquer leur aversion au risque, les assureurs montrent toujours du doigt la réglementation que le gouvernement leur impose. Ils se disent ‘pénalisés’ lorsqu’ils achètent des actions. Mais la réglementation ne fait rien d’autre que de fournir de plus grandes exigences de capital pour les risques plus élevés. Ensuite, on revient à ce qu’il se passe dans le secteur bancaire: les institutions financières ne travaillent pas volontiers avec de grands ‘capital buffers‘ parce que cela équivaut pour leurs actionnaires à un rendement plus faible sur les capitaux propres.
Si les compagnies d’assurance ne parviennent pas à réaliser un rendement à long terme convenable, nous devons nous poser la question de savoir si elles sont bien aptes à gérer l’argent de nos pensions. Un investisseur avec des objectifs sur le long terme peut cependant tout à fait prendre certains risques. Si cela va de pair avec des exigences en capital plus élevées et éventuellement moins de dividendes pour l’actionnaire. Il est grand temps que les compagnies d’assurance adaptent leur modèle dans ce sens. Si elles ne sont pas prêtes à le faire, leurs clients en arriveront à la conclusion qu’ils sont plus aptes à investir leur argent eux-mêmes.
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