Geoffroy Vermeire (Lombard Odier): “Nous voulons devenir la référence en matière de gestion de fortune en Belgique”
La banque privée suisse Lombard Odier voit un potentiel dans le marché belge. “La disparition des banques par le biais de fusions et d’acquisitions et la standardisation des offres nous offrent la possibilité de croître plus rapidement”, selon son nouveau responsable pour la Belgique, Geoffroy Vermeire.
Geoffroy Vermeire a rejoint Lombard Odier au début de l’année. L’homme a fait ses armes dans le secteur financier chez Delta Lloyd, Petercam et Van Lanschot. “Lombard Odier, c’est comme faire partie de la Champions League de la banque privée, explique cet Anversois de 59 ans. La banque jouit d’une réputation et d’une présence internationale. De plus, son modèle de partenariat, que j’ai connu chez Petercam, me plaît beaucoup. Les dirigeants sont également les propriétaires de la banque, ce qui permet d’entretenir des relations très étroites et constitue un gage de stabilité et de vision à long terme.”
Lombard Odier a l’ambition de devenir un acteur de premier plan en Belgique. L’année prochaine, cela fera 20 ans que la banque privée suisse est présente dans notre pays. Le bureau de Bruxelles compte une trentaine de collaborateurs. La Belgique fait partie des six marchés principaux de Lombard Odier, avec la France, le Royaume-Uni, la Suisse, l’Asie et le Moyen-Orient.
Le nombre de clients ou d’actifs gérés par la banque dans notre pays n’est pas divulgué. Selon Geoffroy Vermeire, il s’agit du segment supérieur du marché, des personnes fortunées dont les portefeuilles s’élèvent en moyenne à 3 ou 5 millions d’euros. “En réalité, nous visons encore plus haut, c’est-à-dire les clients dont les actifs dépassent 5 millions d’euros, précise-t-il. C’est cette tranche de clientèle que nous voulons encore mieux servir. Elle attend une large gamme de produits d’investissement.”
Gâteau de plus en plus gros
Si Geoffroy Vermeire voit des opportunités de croissance pour Lombard Odier en Belgique, c’est pour deux raisons. La première, c’est la consolidation du secteur. Ces dernières années, un grand nombre d’acteurs de la banque privée ont disparu à la suite de fusions et d’acquisitions. La Société Générale Private Banking Belgium, par exemple, a été absorbée par ABN Amro. L’entreprise familiale Mercier Vanderlinden a rejoint Van Lanschot Kempen. L’acquisition la plus spectaculaire date d’il y a quelques mois à peine: Degroof Petercam est passée dans les mains du groupe français Crédit Agricole (Indosuez).
En outre, aucun nouvel acteur n’est entré sur le marché belge, constate Geoffroy Vermeire. “En cela, la Belgique diffère d’un pays comme la France, où le nombre de banques privées a augmenté ces dernières années. La France a bénéficié du Brexit et d’un certain nombre de mesures fiscales du président Macron qui lui ont permis d’attirer de nouveaux acteurs. Sur le marché belge, on ne trouve pas ce genre de nouveauté ni ce type de dynamisme.”
Moins d’acteurs signifie que le gâteau doit être partagé par moins de personnes. Et le gâteau est de plus en plus gros, car le nombre de personnes fortunées ne cesse d’augmenter dans notre pays. “La Belgique compte beaucoup d’entrepreneurs, de PME et de personnes qui ont fait fortune, expose Geoffroy Vermeire. Les entrepreneurs, qui ont parfois leur propre family office, sont notre principal groupe cible. Nos banquiers les servent à domicile et sur mesure. Notre modèle repose à 100% sur la croissance organique ; nous ne sommes pas dans la course aux acquisitions. A l’heure où de nombreuses banques sont vendues ou fusionnées, les clients recherchent de la stabilité et sont donc plus enclins à s’adresser à nous.”
Chez nous, tous les modèles de gestion sont possibles.
Approche différenciée
La deuxième raison pour laquelle Lombard Odier voit des opportunités en Belgique est ce que Geoffroy Vermeire appelle la «standardisation de l’offre»: “Le marché belge se réduit de plus en plus à une offre d’un seul fonds patrimonial ou d’un seul produit pour tous les types de clients de 10.000 à 10 millions d’euros. Que ce soit dans le domaine de la banque privée ou les grandes banques, de nombreux acteurs proposent une gestion discrétionnaire via un nombre limité de fonds”.
La gestion conseil est en train de disparaître, juge Geoffroy Vermeire. «Seuls quelques acteurs dont Lombard Odier semblent vouloir continuer à l’offrir. Les autres abandonnent progressivement la gestion conseil. La plupart des grandes banques ont un modèle universel et généraliste. De nombreux clients cherchent cependant à rejoindre un gestionnaire de fortune spécialisé.”
Lombard Odier adopte une approche différente, souligne Geoffroy Vermeire: “Chez nous, tous les modèles de gestion sont possibles et notre gamme de produits est extrêmement large. Lombard Odier opère à l’échelle mondiale dans les domaines des actions, des obligations, du private equity et de la dette privée, ce qui nous permet d’offrir à nos clients une grande variété d’options d’investissement. Comme la banque est présente dans plus de 20 pays, nous disposons de l’expertise nécessaire pour constituer des portefeuilles sur mesure. Dans le sud de l’Europe, par exemple, un portefeuille typique est différent de celui de la Belgique: plus d’obligations, moins d’actions.”
En ce qui concerne les ambitions de Lombard Odier en Belgique, Geoffroy Vermeire est clair: “Nous voulons devenir la référence en Belgique en matière de gestion de fortune (clients disposant d’un minimum de 5 millions d’euros d’actifs, Ndlr). Nous visons une croissance annuelle nette des actifs sous gestion de 5 à 7%. C’est plus que l’objectif international du groupe, qui est de 5% de croissance.”
Equipe renforcée
Pour atteindre l’objectif, Lombard Odier se veut plus offensif dans les années à venir. Ainsi, l’équipe de banquiers belges sera portée à 18 personnes. “Dans un premier temps, ce sera le tour de Bruxelles, où nous avons actuellement sept banquiers et où trois autres viendront s’ajouter d’ici le début de l’année 2024, confie Geoffroy Vermeire. Mais nous souhaitons également renforcer notre présence dans le nord du pays.”
Le bureau belge de Lombard Odier est situé avenue Louise à Bruxelles. Il y a quelques années, il était question que la banque ouvre une succursale en Flandre, mais Geoffroy Vermeire ne confirme pas cette intention: “Nous envisageons toutes les possibilités. Nous étudions principalement les régions où l’esprit d’entreprise est très présent. Cela inclut la Flandre, mais aussi le Brabant wallon et Liège, où nous voyons de plus en plus de jeunes entrepreneurs avec un potentiel de croissance. Nous n’avons pas encore pris de décision concrète.”
La «banque suisse»: un atout après la débâcle de Credit Suisse?
L’un des atouts de Lombard Odier dans sa communication, c’est son pays d’origine. Les enseignes suisses ont la réputation d’être compétentes, saines et solides. Une réputation qui a pourtant été mise à mal cette année avec la chute de Credit Suisse. “Nous avons effectivement reçu des questions à ce sujet de la part de nos clients”, admet Geoffroy Vermeire, managing director de Lombard Odier en Belgique.
“Nous leur avons expliqué qu’il existait des différences importantes au niveau des modèles d’affaires. Les racines de Lombard Odier sont celles d’une maison d’investissement de plus de 225 ans – et ceci a toujours été notre unique métier. Nous mettons l’accent sur la protection des actifs, la solidité de notre bilan et la maîtrise des risques. Notre modèle de gouvernance est celui du partenariat. Six associés contrôlent et gèrent la banque. Avec un ratio de capital Tier 1 de 30,1%, Lombard Odier est l’une des banques suisses les plus solides.
La Suisse reste en outre un pays doté d’une grande expertise dans le domaine de la finance et, de loin, le plus grand centre de gestion de fortune transfrontalière au monde affirme Geoffroy Vermeire: «Le label ‘banque suisse’ demeure un label de qualité. Plus de 5% de la population travaille dans le secteur financier. La banque est une compétence essentielle en Suisse, dans un environnement stable, avec une fiscalité et une sécurité juridique bien plus grandes que dans d’autres pays. C’est un environnement exceptionnel pour la gestion de patrimoine et la planification successorale”.
Profil
· 1964: Naisance à Anvers
· Master en sciences économiques appliquées (UAntwerpen) et master en finance (Vlerick Management School).
· 2000: devient CEO de Delta Lloyd Securities et CEO de Nagelmackers deux ans plus tard.
· 2007: directeur exécutif chez Petercam. Travaille principalement au réseau de la banque privée.
· 2014: directeur commercial et membre du comité de direction de Van Lanschot Kempen en Belgique
· 2023: managing director de Lombard Odier
En chiffres
– 1796 année de fondation
– 3 domaines d’activité: banque privée, gestion d’actifs, technologie bancaire
– 6 associés-gérants, qui contrôlent et dirigent l’entreprise
– 26 bureaux dans 20 pays
– 2.790 employés
– 323 milliards d’euros d’avoirs
– 1,7 milliard d’euros de fonds propres sur un total de bilan de 16,2 milliards d’euros
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