BNB: “La crise attendue ne se produira pas”.
“Nous ne voyons pas de crise et nous n’en verrons pas”, a déclaré Geert Langenus, spécialiste de la conjoncture à la Banque nationale de Belgique (BNB), suite à la nouvelle estimation des chiffres du PIB belge. Au premier trimestre, l’économie belge a connu une croissance modeste de 0,4 % par rapport au trimestre précédent, exactement comme l’avait prédit la Banque nationale au mois de mars. Sur une base annuelle, cela donne une croissance économique de 1,3 %.
Les chiffres de la croissance sont remarquablement bons. On avait longtemps craint, l’année dernière, que la crise énergétique, sans précédent que nous avions connue, ne provoque un fort ralentissement de cette croissance, voire même une récession. Ce sombre scénario avait particulièrement affecté les ménages. La reprise de la consommation au premier trimestre a principalement stimulé l’activité du secteur des services. La vigueur persistante du marché du travail et les mesures de soutien aux ménages afin de les aider face à la crise énergétique ont incité ceux-ci à continuer à consommer. La baisse des prix de l’énergie ensuite a renforcé la confiance des consommateurs.
En 2023, l’économie belge devrait donc continuer à tourner à un rythme relativement élevé. Dans le pire des cas, un léger ralentissement est à prévoir, mais une fois de plus, l’amélioration des indicateurs de conjoncture dans la zone euro, même si elle est légère, relègue le danger de récession à l’arrière-plan. La crise n’a pas seulement été reportée, elle semble avoir été réglée.
Des risques en embuscade
Cependant, afin de maîtriser l’inflation encore trop élevée, la Banque centrale européenne (BCE) fait de son mieux pour stabiliser l’économie avec une politique monétaire plus stricte. “Mais l’impact de la remontée des taux directeurs semble se limiter au secteur de la construction et aux marchés immobiliers. Les carnets de commandes des entreprises de construction se sont clairsemés cet hiver. Pourtant, nous entendons dire que le pire est derrière nous, même s’il faut rester sur ses gardes”, déclare Geert Langenus.
Outre cette remontée des taux voulue par la BCE, il existe d’autres risques qui pourraient partiellement freiner l’élan de notre économie. Par exemple, les entreprises ont accumulé d’importants stocks à la fin de l’année dernière à cause d’un affaiblissement de la demande, combiné à une normalisation de l’offre, maintenant que la plupart des retards et pénuries dans les chaînes d’approvisionnement ont été éliminés. “Il est possible que les entreprises réduisent ces stocks au cours des prochains mois, ce qui les amènera à produire moins”, explique Geert Langenus.
L’indexation automatique des salaires pourrait aussi bientôt peser sur le pouvoir d’achat et la consommation. En effet, l’année dernière, les salaires ont augmenté plus vite que l’inflation parce que cette dernière avait été calculée sur la base des nouveaux contrats énergétiques bien plus chers, alors que tout le monde n’a pas dû souscrire à ces contrats. Cette année, l’effet inverse se produira et les salaires augmenteront moins vite que le coût de la vie. Selon Geert Langenus : “Cela pourrait peser sur la consommation et donc sur l’activité économique”.
L’affaiblissement de la compétitivité ne se paie pas encore cash
Même si la forte hausse de l’inflation et des salaires a déjà affecté la compétitivité des entreprises belges, cela ne se traduit pas encore par un affaiblissement du cycle conjoncturel.
“N’oublions pas que les salaires augmentent également dans les pays voisins. Ce n’est pas aussi rapide que chez nous, mais en Allemagne, par exemple, il y a des augmentations salariales substantielles. En outre, l’affaiblissement de la compétitivité ne fait sentir ses effets qu’à moyen terme”, déclare Geert Langenus.
À plus long terme, la position énergétique de l’Europe et l’écart de prix persistant, avec les États-Unis et l’Asie, sont particulièrement préoccupants. Les prix du gaz naturel ont beau avoir fortement baissé ces derniers mois, les entreprises européennes continuent de payer leur gaz naturel deux à trois fois plus cher que leurs concurrentes américaines. “Cela commence à se faire sentir. Dans l’industrie européenne à forte intensité énergétique, il y a des signes que les grandes entreprises déplacent leurs investissements vers les États-Unis”, déclare Geert Langenus.
De plus, ces derniers mois, l’industrie belge a connu une période plus difficile que le secteur des services, et ce à cause de la pression des prix élevés de l’énergie, de la forte hausse des coûts salariaux et de l’environnement géopolitique très incertain. Alors que le secteur des services a connu une croissance de 0,7 %, l’industrie manufacturière belge a quant à elle enregistré une baisse de 0,7 % au premier trimestre. La confiance des industriels s’est légèrement redressée ces derniers mois, mais reste à un niveau relativement bas. Cependant, les investissements des entreprises se maintiennent malgré tout et devraient repartir à la hausse.
“Les investissements dans l’automatisation des processus de production augmentent car les entreprises manquent de personnel. Et la transition énergétique provoque également davantage d’investissements, surtout après la forte hausse des prix de l’énergie en 2022″, explique Geert Langenus.
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