Belfius veut devenir en trois ans leader de la banque mobile

Marc Raisière, patron de Belfius. © BELGA/Jasper Jacobs

C’est un important virage, une mutation stratégique majeure qui a été présentée à la presse ces jeudi et vendredi à Londres par Marc Raisière, le patron de Belfius. Le bancassureur détenu par l’Etat vise tout simplement à devenir l’application la plus importante de votre smartphone et à être le leader du “mobile banking”.

Belfius va en effet investir 100 millions d’euros ces trois prochaines années pour faire de notre smartphone une agence bancaire complète et tirer pleinement profit de ce que représente aujourd’hui le téléphone mobile dans notre vie quotidienne. Cela ne signifie pas l’abandon du réseau d’agences, mais une transformation de la fonction et abandonner tout document papier. “Nos clients pourront acheter tous les produits bancaires et d’assurance via leur mobile”, souligne Dirk Vanderschrick, membre du comité de direction et responsable du “retail et commercial banking” de Belfius.

La première Fintech du pays

Dans la foulée, la banque publique a signé un partenariat avec Accenture pour développer des solutions technologiques (dans des domaines, comme les services de paiement, les applications financières pour smartphone ou les services financiers robotisés) et les vendre à l’étranger. Enfin, Belfius va aussi décliner cette stratégie “tout digital” sur son marché historique, celui du financement des pouvoirs locaux. La banque lance en effet un projet, baptisé “Smart Belgium”, qui vise à soutenir l’innovation en Belgique. Belfius lance notamment un laboratoire dans lequel les entreprises innovantes et les pouvoirs locaux pourront se rencontrer pour développer des solutions dans divers domaines (transport, soins de santé, signalétique…) et bâtir ainsi “une ville virtuelle idéale”. Bref, Belfius veut devenir la principale “Fintech” (société financière spécialisée dans les applications innovantes) du pays.

Par ailleurs, pour compléter cette ambitieuse feuille de route, l’institution publique revoit aussi sa stratégie de banque privée. Belfius qui avec 32 milliards d’actifs sous gestion est la troisième banque privée du pays, va cibler désormais trois catégories d’épargnants : ceux ayant un patrimoine mobilier compris entre 0,1 et 0,5 million. Ceux dont la fortune est comprise entre 0,5 et 1,5 million, et ceux dont le bas de laine dépasse 1,5 million. Pour ces derniers, et afin de combattre les taux bas, Belfius va s’associer avec quelques promoteurs pour développer avec eux des projets immobiliers de qualité dans lesquels les clients aisés de la banque pourront investir, la banque offrant aussi, naturellement, la gamme de services associés à ces produits (financement, assurances…)

Cette stratégie devrait permettre à Belfius de tirer son épingle du jeu dans un monde qui est devenu très difficile pour les institutions financières, prises en tenaille entre, d’une part, les taux bas, qui réduisent les revenus des banques et, d’autre part, une réglementation de plus en plus sévère, qui exige de renforcer les fonds propres et pèse donc, là aussi, sur la rentabilité.

Un bénéfice de plus de 600 millions en 2020

Johan Vankelecom, le directeur financier de Belfius, a cependant indiqué que le groupe de bancassurance devrait pouvoir dégager une centaine de millions d’euros de bénéfice supplémentaire d’ici à 2020 et voir donc son résultat net consolidé passer de 506 millions en 2015 à plus de 600 millions dans quatre ans. Une performance qui devrait être rendue possible grâce à une hausse des revenus (Johan Vankelecom table sur une progression de 2% par an) et à la capacité à stabiliser ses frais (la hausse des coûts devrait être limitée à 0,5%).

Le bilan de la banque, lui, devrait se réduire et passer de 175 milliards d’euros aujourd’hui à 165 milliards d’euros en 2020. Car d’un côté, Belfius s’attend à ce que sa nouvelle stratégie lui permettre d’augmenter son portefeuille de crédits (la banque table sur une hausse de 8 milliards de ses engagements, provenant de l’augmentation de ses crédits hypothécaires et de ses crédits aux entreprises). Mais de l’autre, Belfius achève la gestion de l’héritage Dexia et s’attend à ce que l’extinction naturelle de ces actifs hérités de son ancienne maison-mère allège son bilan de 18 milliards.

Trois “canards”

Et puis, Marc Raisière a profité de cette réunion avec la presse spécialisée pour couper les pattes à trois canards. Un, Belfius ne va pas répercuter les taux négatifs sur la clientèle. “Non, il n’y aura pas de taux négatifs sur le compte d’épargne”, souligne le patron de Belfius. Deux, pas question d’abandonner le modèle de bancassurance. “Belfius Insurance n’est pas à vendre.” On peut d’autant mieux le comprendre quand on sait que Belfius Insurance a un portefeuille d’obligations qui, aujourd’hui, affiche une plus-value potentielle de… 2,6 milliards d’euros. Trois, non, l’apparition des Fintech ne signifie pas l’apocalypse pour le monde bancaire. Ces sociétés financières offrent des solutions dans les paiements, l’analyse des données, la sécurité… qui révolutionnent certes le contact avec la clientèle. Mais elles sont davantage des partenaires que des concurrents. Et ce plan visant à faire de Belfius un leader du mobile banking et “la première application de votre smartphone” en est la preuve.

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