La Belgique rappelée à l’ordre par l’Europe ? Personne n’en a cure!

Georges-Louis Bouchez et Alexander De Croo © belga
Amid Faljaoui

Malgré le rappel à l’ordre de l’Europe concernant les déficits budgétaires, la Belgique et d’autres pays semblent peu concernés. La Commission européenne pointe du doigt, mais ses sanctions restent théoriques, inefficaces face à l’inertie politique. Seuls les marchés financiers peuvent réellement influencer les gouvernements à agir.

L’Europe a décidé de nous rappeler à l’ordre.  Nous, c’est certains pays comme la Belgique, la France, la Hongrie, la Slovaquie, Malte et la Pologne. En Belgique, cette information n’a pourtant pas retenu l’attention des médias très longtemps, pas plus qu’en France, d’ailleurs. C’est compréhensible : lorsqu’une institutrice punit un élève devant toute la classe, celui-ci a tendance à se souvenir de la sanction et à modifier son comportement. Cependant, quand une grande partie de la classe est punie, la sanction collective atténue l’effet de l’humiliation. C’est précisément ce qui se passe actuellement. La Commission européenne a reproché cette semaine à tous ces pays, et donc aussi à la Belgique, d’avoir des déficits budgétaires excessifs. Elle peut le faire, car, ne l’oublions pas, dans la zone euro, nous sommes tous liés par une monnaie commune, l’euro. Nous fonctionnons donc comme une copropriété : si l’un des copropriétaires n’entretient pas son appartement, c’est l’ensemble de l’immeuble qui en pâtit.

Toutefois, le rappel à l’ordre de la Commission européenne ne servira à rien – vraiment à rien – pour la simple raison que la Commission européenne ne sanctionne pas en pratique les pays qui ne gèrent pas leur dette publique ou leurs déficits. La France en est la preuve la plus éclatante : ce grand pays a été rappelé à l’ordre par la Commission européenne de 2009 à 2018. Tous ces rappels sont restés lettre morte sans que la France ne soit sanctionnée. Pas d’amende, rien du tout ! Il est clair qu’un pays comme la France, qui se permet de donner des leçons sans être sanctionné, ne peut pas ensuite exiger de plus petits pays, tels que la Belgique ou la Slovaquie, de maintenir un budget équilibré alors que le sien ne l’a jamais été. En résumé, les politiques utilisent parfois l’Europe pour brandir la menace d’une sanction, sauf que ni l’opposition ni le gouvernement, selon les cas, ne s’en préoccupent réellement. La Commission brandit une menace qui n’est qu’une épée de bois.

Il existe par contre une sanction capable de faire réagir un gouvernement. C’est celle des marchés financiers. Quand les grandes entreprises cotées en bourse subissent de lourdes pertes ou que les taux d’intérêt augmentent tellement qu’ils rendent le remboursement de la dette impossible, alors le gouvernement prête l’oreille. Et il finit par prendre les mesures de rigueur nécessaires. C’est exactement ce qui se passe en ce moment en France. C’est pourquoi le Rassemblement National est en train de réviser ses positions et de déclarer qu’il ne pourra pas réaliser en trois ans ce qui n’a pas été accompli en trente ans. Manière polie de dire : votez pour nous, mais nous ne pourrons pas tenir toutes nos promesses. Car il faudra d’abord corriger les erreurs du passé –  celles des autres – avant de mettre en œuvre les promesses faites aux électeurs. Je crois que c’est Talleyrand qui disait : “On n’a qu’une seule parole, c’est pourquoi il faut la reprendre si on veut la redonner !”

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