The Botanist: des herbes sauvages

Le phénomène de la cueillette sauvage est né dans le secteur de la restauration. © The Botanist

Les botanicals constituent des ingrédients importants dans la fabrication du gin. Ce terme est souvent traduit par ” herbes “, mais pas toujours à raison car il peut aussi désigner des zestes de fruits ou des fleurs. THE BOTANIST utilise pas moins de 22 plantes que l’on peut cueillir en toute simplicité dans la nature. Trends Style s’est livré à une séance de cueillette sauvage dans la forêt de Soignes.

The Botanist est, à maints égards, un gin hors du commun. En premier lieu, il s’agit non pas d’un London Dry mais plutôt d’un Islay Dry, distillé sur l’île écossaise d’Islay par Bruichladdich, connu pour ses single malts. Cette distillerie apporte à ses gins le même soin qu’à ses whiskys. Et pour conserver son cachet local, elle utilise uniquement la flore de l’île, à l’exclusion de toute herbe exotique.

Les botanicals de The Botanist ont été sélectionnés par foraging, terme que l’on pourrait traduire librement par ” cueillette sauvage “. Il suffit de se promener sur l’île et de récolter 22 herbes poussant dans la nature sauvage : ce sont elles qui détermineront le goût du gin. Une méthode particulièrement efficace. Assurément, The Botanist a de quoi convaincre : il s’agit d’un gin bien équilibré, au caractère aromatique prononcé.

BALADE COOL

Pour prouver qu’il est possible de trouver une foule de plantes comestibles et distillables dans la nature, la marque The Botanist a convié Trends Style à une cueillette sauvage dans la forêt de Soignes. A quoi pouvait-on s’attendre ? A devoir se battre, hors des sentiers battus, avec des branches, des plantes et autres lianes ? Mais l’organisateur a été clair : ni chaussures adaptées, ni rations de survie, ni boussole, ni fusées de détresse… de simples baskets suffiront pour cette ” expédition ” en forêt de Soignes.

L’abbaye médiévale du Rouge-Cloître, à l’orée de la forêt, offre une vue pittoresque. Une expression à prendre au pied de la lettre puisque ce fut un lieu de travail pour le peintre primitif flamand Hugo van der Goes. C’est sur la pelouse ensoleillée, devant l’abbatiale, que l’on rencontre Joanne Brown, ambassadrice de la marque The Botanist, et Geert Heyneman, herborisateur, botaniste, écologue de la ville de Gand, et adepte enthousiaste de la cueillette sauvage.

C’est éclairé par les explications de ce dernier que l’on va s’aventurer dans la rangée d’arbres à la recherche d’herbes et d’autres plantes secrètes. ” Tout ce dont nous avons besoin se trouve en fait sur cette pelouse et tout autour “. Le gazon qui s’étend là, ne semble être pourtant qu’un champ de pissenlits, de pâquerettes, de trèfles et d’autres mauvaises herbes. Commencent alors deux heures d’initiation et de découvertes botaniques aussi étonnantes que passionnantes.

DÉFENSE DE CUEILLIR DES FLEURS

Le phénomène de la cueillette sauvage est né dans le secteur de la restauration. Nombre de chefs, en quête constante de saveurs et de textures nouvelles, font appel à des botanistes avec lesquels ils écument les bois pour concocter des recettes originales. Et certains restaurants étoilés entretiennent de vastes potagers d’herbes aromatiques – un phénomène très tendance, lui aussi.

Il est préférable de ne rien cueillir aux abords des voies ferrées et sur les berges des cours d’eau.

Autrefois, la cueillette sauvage n’était pas aussi répandue car elle était interdite – elle l’est d’ailleurs toujours en Belgique, seul pays d’Europe où cette activité est strictement réglementée. Qu’on se le dise : dans notre pays, cueillir des fleurs reste une pratique in-ter-dite ! Mais la situation évolue peu à peu, même si elle est encore très loin de celle de la France, par exemple, où les cueilleurs peuvent laisser libre cours à leur passion. Cela étant, la cueillette sauvage n’est-elle pas une pratique dangereuse ? ” Pour soi, éventuellement, mais certainement pas pour l’environnement. Il faut, bien entendu, connaître les plantes. On ne ramasse pas ce que l’on ne connaît pas. ” Un conseil plus que judicieux.

Certaines plantes peuvent s’avérer dangereuses. Tout comme l’endroit où elles sont cueillies, du reste. La pollution du sol peut être fatale au cueilleur, ou en tout cas lui faire passer de très mauvais moments. Car une plante parfai-tement comestible peut devenir toxique suite à une contamination du sol. Les voies ferrées, par exemple, s’avèrent particulièrement risquées, non seulement en raison des trains qui y passent mais aussi des déchets qui s’en écoulent. Il en va de même des cours d’eau. Il est fortement déconseillé de pratiquer la cueillette sur leurs berges car, durant longtemps, elles ont été un lieu de dépôt des boues de dragage. En revanche, la cueillette le long d’autoroutes est sans risque, les émissions de particules fines n’affectant pas trop les herbes. De là à s’accroupir le long de l’E40…

The Botanist est un gin bien équilibré, au caractère aromatique prononcé.
The Botanist est un gin bien équilibré, au caractère aromatique prononcé.© The Botanist

CHARDON AU GOÛT D’ASPERGE

L’idéal est de se mettre à la pratique de la cueillette dans son propre jardin ou sur une simple pelouse telle que celle du Rouge-Cloître. Première découverte : un chardon. Après l’avoir soigneusement épluché, on goûte un morceau de la tige qui, aussi étrange que cela puisse paraître, a la saveur de l’asperge – avec une petite pointe d’amertume. Les restaurants l’utilisent pour aromatiser certains plats. Un goût qui devrait faire merveille dans un cocktail. Nick Baeyens, l’expert de The Botanist, le confirmera plus tard : ” Surtout si l’on parvient à extraire l’essence par pression à froid “.

Autrefois, la cueillette sauvage n'était pas aussi répandue car elle était interdite
Autrefois, la cueillette sauvage n’était pas aussi répandue car elle était interdite© TB Flora

Jusqu’il y a peu, les chardons étaient tenus pour de mauvaises herbes. Ils figurent d’ailleurs certainement encore sur une liste de ” plantes à éradiquer “, alors qu’en réalité, ils sont délicieux. Même constat pour les pissenlits : depuis toujours, ils sont associés à quelque chose de désagréable, ne fût-ce qu’en raison de leur étymologie… Leur ancien nom de ” dent-de-lion ” est depuis longtemps oublié. Durant des siècles, le pissenlit a été considéré comme un remède efficace contre les troubles du système digestif. Il était aussi réputé pour ses vertus diurétiques (d’où son nom). La preuve de ses effets curatifs réside dans son appellation latine : taraxacum officinale. Ce deuxième terme signifie ” tiré de l’officine “, c’est-à-dire de l’endroit du monastère où étaient conservés les remèdes – autrement dit, la pharmacie. Toutes les fleurs, plantes et (mauvaises) herbes dont le nom comporte le terme officinale ou officinalis y étaient stockées. Le pissenlit est un aliment très énergétique et délicieux préparé sous forme de pesto ou en salade. En Angleterre, on l’utilise encore pour confectionner une boisson rafraîchissante très ancienne : le Dandelion & Burdock.

Même la pâquerette, toute simple, se révèle délicieuse en sirop ou comme garniture de salade. Le nom de chaque plante, pour peu qu’on le connaisse, éclaire souvent sur sa saveur ou son utilisation potentielle. L’herbe à ail, par exemple, possède une appellation assez éloquente : elle a le goût de l’ail mais elle n’en est pas. Légèrement amère, elle ne donne pas mauvaise haleine et sa racine ressemble très fort à celle du raifort.

L’AMERTUME, SAVEUR DE LA NATURE

Geert Heyneman ne fait pas deux pas sans se pencher et pointer du doigt une herbe aux mille et un usages. ” Il nous faut rompre avec l’image négative qui colle aux mauvaises herbes. C’est de la nourriture, tout simplement. ” Et si elles pullulent, c’est que les humains ne les consomment pas suffisamment.

Il faut se défaire de l’image négative que l’on a des mauvaises herbes.

Car presque toutes ces plantes peuvent se manger, selon des arômes et des usages qui leur sont propres. En voici quelques exemples. La corne-de-cerf, sorte de cresson de fontaine dont on peut préparer un délicieux pesto. Le lierre terrestre, une ” herbe à boire ” qui, jadis, avant la découverte du houblon, entrait dans la composition de la bière. Dans la même catégorie, on a l’absinthe que l’on retrouve dans la boisson homonyme mais aussi dans le vermouth.

Après un certain temps passé à cueillir et à goûter, on finit par se rendre compte que de nombreuses (mauvaises) herbes dévoilent un goût amer, ou en tout cas une pointe d’amertume. ” Cela s’explique par le fait que les goûts dans la nature sont plus prononcés. L’amertume est une saveur dominante de la plante à l’état sauvage “. Et qui incite presque naturellement à croire que celle-ci n’est pas destinée à être consommée. Ce serait oublier le dicton selon lequel ” Ce qui est amer à la bouche, est doux au coeur “.

Cette promenade de 75 minutes, qui n’a consisté en fait qu’à traverser la pelouse et à faire le tour d’un étang, s’est révélée riche en découvertes. Il est à présent l’heure de déguster quelques cocktails. Nick Baeyens, le barman de The Botanist, a réalisé trois préparations à base de gin et de sirop d’herbes, notamment de pimprenelle sauvage, de pissenlit et d’aubépine. Le Collins, composé à partir d’un mélange d’herbes écossaises et d’herbes belges, s’avère particu-lièrement réussi.

De toute évidence – et cette après-midi a contribué à le démontrer – les mauvaises herbes sont bel et bien tendance. Et fort heureusement, il n’en manque pas.

www.thebotanist.com

TEXTE ROLF SCHOLLAERT

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