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Privatiser Proximus et bpost, une manoeuvre purement idéologique ?

Ainsi donc, le gouvernement serait en passe de déposer un projet de loi qui lui autoriserait à réduire sa participation dans Proximus et bpost en deçà de 50% + une action. Si tel est bien le cas, il ne fait plus aucun doute que le gouvernement de Charles Michel envisage sérieusement de réduire la voilure dans ces deux “bijoux de famille”.

Privatiser Proximus et bpost ne serait pas une décision étonnante dans le chef d’un gouvernement libéral dont les grandes composantes – NV-A en tête – ont souvent plaidé pour une diminution de l’interventionnisme public.

Se posent toutefois les questions suivantes: Vendre tout ? Une partie ? Et à qui ? Mais aussi et surtout, avec quels avantages à court et long termes ?

1. Tout vendre. C’est la mesure one shot par excellence. L’Etat empoche bon an, mal an 8,6 milliards d’euros (6 milliards pour Proximus dont il détient 53% et 2,6 pour bpost, dont il détient un peu plus de 50%), ce qui lui permet de réduire sa dette de grosso modo 2%. L’opération ne peut en effet pas servir à combler le déficit actuel, en raison des normes SEC, la référence utilisée par la Commission européenne en matière d’objectifs budgétaires fixés pour ses Etats membres. Ce faisant, l’Etat se prive néanmoins de dividendes futurs (280 millions en 2014 rien que pour Proximus) qui, eux, viennent toujours bien à point dans l’élaboration du budget annuel.

2. Vendre une partie. L’Etat pourrait envisager de réduire sa participation dans Proximus et bpost afin de rester premier actionnaire, mais pas majoritaire. Il garderait alors le contrôle et engrangerait au passage quelques milliards d’euros ; ses dividendes futurs seraient évidemment réduits. Mais les analystes préviennent: en vendant par tranches plutôt qu’en bloc, l’Etat belge risque d’empocher une plus faible plus-value, les valorisations étant dans ce cas généralement plus faibles.

3. A qui vendre ? A priori, à des acteurs privés, en tout cas s’il s’agit de vendre l’entièreté des participations détenues. Mais Dominique Leroy a déjà prévenu : si un opérateur privé – Altice, le groupe qui détient Numericable, dont l’appétit n’est un secret pour personne ? – rachète la part de l’Etat dans Proximus, ça va saigner. Car avec plus de 14.000 salariés pour un chiffre d’affaires de 6,1 milliards d’euros en 2014, Proximus n’est effectivement pas le champion de la maîtrise des coûts – même si elle y travaille. A titre de comparaison, son concurrent Telenet (entièrement privatisé) emploie un peu plus de 2000 personnes pour 1,7 milliard d’euros de chiffre d’affaires. Une efficacité presque double.

La revente de Proximus et bpost semble être avant tout une manoeuvre idéologique

La revente de ces deux participations semble donc avant tout idéologique: réduire l’intervention de l’Etat dans les entreprises exposées à la concurrence et réduire (un peu!) la dette, autrement dit, soumettre l’appareil public à une forte cure d’amaigrissement, cela plaît aux libéraux.

Si la manoeuvre a du sens sur le plan économique, elle risque de susciter un gros retour de flamme politique et social. Car même en injectant une partie des bénéfices tirés de l’opération dans des politiques de relance économique, en particulier de création d’emplois, les coupes sombres plus que probablement effectuées par les acquéreurs potentiels viendraient réduire d’autant – et directement – leurs effets escomptés.

A cela, le gouvernement répondra sans doute qu’il aurait mieux valu agir en période de (plus) haute conjoncture, ce que ses nombreux prédécesseurs ont manqué de faire, mais que les indicateurs actuels plutôt encourageants justifient malgré tout l’opération. Risqué. Mais ce gouvernement semble bien décidé à en prendre, des risques.

Les syndicats ne veulent pas d’une privatisation de bpost et Proximus

L’objectif du gouvernement fédéral de privatiser bpost et Proximus est “une stratégie irréfléchie où il n’y a que des perdants: l’Etat belge, les employés et le citoyen”, estime mercredi le syndicat ACOD (CGSP). Le syndicat chrétien ACV (CSC) Transcom juge également que les deux entreprises “sont mieux avec le soutien des autorités”.

Les syndicats ne voient aucun intérêt à la privatisation des deux sociétés. “Ces deux entreprises publiques se portent très bien et génèrent du profit tout en assurant des services à prix raisonnables aux citoyens. Les plans de privatisation sont donc conduits par des motivations purement commerciales, sans aucune vision sur l’importance des fonctions que bpost et Proximus remplissent actuellement”, dénonce le syndicat socialiste.

Selon lui, l’Etat belge donnerait au privé “les instruments qui régulent actuellement les deux plus importants marchés des communications”.

L’emploi serait également menacé en cas de privatisation, prévient-il encore. “Au final, personne ne sort gagnant d’une telle stratégie. L’Etat belge perd ses dividendes annuels au profit d’un ‘one shot’; le citoyen risque de payer plus pour des services de moindres qualités et le personnel se retrouve dans une situation professionnelle incertaine.” (Belga)

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