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Panique à bord du bateau Europe, qui se cherche un cap

Les événements tragiques du week-end dernier nous rappellent que l’actualité économique européenne ne rime pas seulement avec assouplissement et dévaluation monétaires, relance de l’inflation, taux d’intérêt négatifs, réduction de la dette, sans parler des sacro-saintes réformes structurelles.

L’Europe est frappée de plein fouet par un problème beaucoup plus terre à terre (l’expression est de circonstance), à savoir l’afflux d’hommes, de femmes et d’enfants désespérés au point de vendre leur sort à des trafiquants – la chance de le voir s’améliorer, si mince soit-elle, valant plus que tout le reste.

Panique à bord: un navire marchand passe, ces hommes à l’instinct de survie devenu presque animal se pressent d’un côté de leur embarcation de fortune pour lui faire signe de les secourir, et c’est le naufrage.

Panique à bord (bis): les sauveteurs italiens naviguent entre les cadavres, hissent quelques dizaines de survivants, se demandent comment ils vont faire pour absorber cette marée humaine qui, selon les termes européens, doit être prise en charge par le pays dans lequel elle déferle.

Panique à bord (ter): l’Europe, en proie à une crise économique qui n’en finit pas, engluée dans l’inextricable problème grec, doit maintenant affronter une crise humanitaire qu’elle ne peut plus faire semblant de ne pas voir.

Panique à bord (il paraît qu’on dit quater): la même Europe, appelée à gérer de façon concertée un phénomène d’immigration en plein boom suite à l’intensification des conflits au Moyen-Orient, doit composer avec la montée en puissance de partis xénophobes, le FN de Marine Le Pen en France et Pegida en Allemagne en tête.

Certes, le bateau européen tangue déjà sérieusement. Mais ce dont il a surtout besoin, c’est d’un cap

L’Allemagne, parlons-en ! Presque insolente avec ses prévisions de croissance relevées à la hausse à 2,1 %, alors qu’elles n’étaient encore que de 1,2 % aux dernières anticipations. Grâce au faible prix du pétrole qui stimule la consommation intérieure et à la faiblesse de l’euro qui continue de doper les exportations, l’Allemagne reste incontestablement la locomotive européenne, avec un chômage en baisse qui devrait se tasser jusqu’à 6,3 % à la fin de cette année. Mais le pays fait aussi face à un afflux massif de demandeurs d’asile: plus de 200.000 en 2014, probablement 300.000 cette année, soit un cinquième du total de demandeurs d’asile dans le monde. Et si l’accueil qui leur est réservé par le gouvernement est relativement chaleureux – Angela Merkel n’a d’autre choix que de favoriser cette Willkommenskultur si elle veut garder son économie vieillissante sur les rails – celui des Allemands l’est nettement moins: les attaques physiques de réfugiés aux abords des centres qui les hébergent se multiplient.

L’Europe n’est malheureusement pas en aussi bonne santé que l’Allemagne et ses pays membres n’ont pas tous sa capacité d’absorption d’immigrés. D’où la nécessité d’une politique d’immigration concertée, dignement budgétée, adaptée en fonction des pays d’accueil et canalisée au travers de voies d’accès légales et contrôlées. Certes, le bateau européen tangue déjà sérieusement. Mais ce dont il a surtout besoin, c’est d’un cap.

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