La robotisation menace les travailleurs… même en Chine

Une usine de bras motorisés, à Shanghai. © REUTERS

En Chine, l’augmentation des salaires pousse de plus en plus les entreprises à investir dans la robotique, au détriment des employés peu qualifiés encore massivement présents sur les chaînes d’assemblage.

La ville de Kunshan est un pôle économique important pour l’industrie électronique chinoise et mondiale. Baignée par l’investissement taïwanais, elle héberge notamment une des trois usines chinoises de Foxconn, le groupe qui sous-traite notamment la production de plusieurs produits Apple. On y trouve encore Compal Electronics, deuxième producteur mondial d’ordinateurs portables, produisant pour des clients comme Acer ou Lenovo.

Autrefois élue par Forbes comme une des ville-district les plus performantes de Chine, cette ville connaît une forte baisse de production En 2014, une explosion dans l’usine Zhongrong (fournisseur pour le constructeur automobile GM) avait provoqué la mort de 146 personnes. Ce tragique évènement a poussé le pôle industriel à revoir sa stratégie de développement économique. Aujourd’hui, près de 600 entreprises basées dans le pôle de production pourraient, selon une enquête, envisager de se débarrasser massivement de leurs employés au profit de robots. C’est déjà ce qu’a fait l’antenne locale de Foxconn, qui est récemment passée de 110.000 à 50.000 employés, rapporte le South China Morning Post, quotidien chinois basé à Hong Kong. Foxconn compris, ce sont 35 entreprises taïwanaises du bassin industriel de Kunshan qui ont investi près de 600 millions de dollars dans le développement de l’intelligence artificielle pour leurs usines.

Vers une robotisation à grande échelle

L’exemple de Kunshan illustre à son échelle le large mouvement d’automatisation de l’industrie chinoise. Depuis 2013, “l’usine du monde” a acheté plus de robots chaque année que n’importe quel autre pays, devançant ainsi l’Allemagne, le Japon ou la Corée du Sud, rapporte le Financial Times. D’ici la fin de l’année, la Chine volera au Japon le rôle de premier employeur de robots industriels, selon la Fédération international de la robotique (IFR). En 2014, c’est le Président Xi Jiping qui lançait un appel pour une révolution de la robotique industrielle, en proposant des incitants fiscaux censés encourager l’automatisation des entreprises. Selon l’agence de presse Xinhua, la ville de Guangzhou (Canton), 3ème ville du pays en nombre d’habitants, chercherait à automatiser 80% de sa production manufacturée d’ici 2020.

Une des raisons principales de ce changement de stratégie : l’augmentation des salaires des ouvriers manufacturiers, diminuant de plus en plus l’avantage comparatif de la Chine face au reste du monde. Selon un rapport de L’Organisation Internationale du Travail (OIT), les salaires chinois ont triplés entre 2000 et 2010. Dans certaines villes, comme à Zhejiang, le salaire minimum atteint aujourd’hui l’équivalent de 220 euros. Soit plus que certains pays d’Europe de l’Est, comme la Roumanie ou la Bulgarie, souligne Le Monde. Cette hausse des salaires est aussi accompagnée par une baisse du nombre de jeunes employés. “Les jeunes ne veulent plus travailler sur les chaînes de production, comme leurs parents dans le passé “, expliquait Lui Hui, un entrepreneur chinois, au Financial Times.

Selon le Bureau du Labor Statistics (BRL) basé aux Etats-Unis, les usines chinoises emploient aujourd’hui près de 100 millions d’ouvriers. A l’échelle du monde, un bien manufacturé sur quatre a été fabriqué en Chine. Globalement, le boom économique chinois a signifié une baisse significative des coûts de nombreux biens de consommation.

Alors que ces dernières décennies, des millions de travailleurs non-qualifiés ont migré des campagnes vers les pôles industriels, la robotisation croissante de la production chinoise devrait pousser le gouvernement à relocaliser ces emplois. Notamment dans le secteur des services, et plus particulièrement dans le milieu de la recherche et du développement.

A.S.

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