“Il faut d’urgence réindustrialiser la Wallonie !”

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En trois ans et demi, Bernard Delvaux a réussi à faire redécoller la Sonaca et à lui redonner des ailes. Toutefois, estime le CEO du sous-traitant aéronautique carolo, si l’on veut maintenir ou redéployer une activité industrielle dans le sud comme dans l’ensemble du pays, il faut absolument diminuer le coût salarial des ouvriers.

Lisez l’intégralité de cette interview dans le magazine Trends-Tendances daté du 8 mars 2012.

Bernard Delvaux a rejoint la Sonaca, en septembre 2008, au plus fort de la crise bancaire et financière. A l’époque, le sous-traitant aéronautique, basé à Gosselies et spécialisé dans les bords d’attaque des ailes et les pylônes intérieurs, était proche de la faillite. “Les résultats étaient catastrophiques mais on avait l’impression qu’il y avait moyen de faire mieux”, explique cet ancien directeur de Belgacom et Bpost. De fait.

Grâce à un plan de relance (réduction d’emplois, délocalisation d’activités au Brésil, augmentation de la productivité, etc.) qui a permis “de mettre de l’ordre dans la maison”, la société a remonté la pente.

“Aujourd’hui, affirme-t-il, la Sonaca est plus saine et plus stable financièrement.” Et grâce à une communication interne intense, la paix sociale y est revenue. Mais “cela reste un combat de tous les jours”, ajoute Bernard Delvaux qui estime qu’il faut réindustrialiser la Wallonie. Comment ? En réduisant massivement les cotisations sociales et les taxes sur les bas salaires.

Doit-on réindustrialiser la Wallonie et produire wallon comme le préconisent les Français dans l’Hexagone ?

Oui, comme on doit le faire avec la Flandre, la Belgique et l’Europe et il faut le faire d’une façon extraordinairement urgente et cruciale. Ces dernières années, on a cru que l’on était riches car les banques gagnaient beaucoup d’argent et avaient vu se développer toute une série de services autour de leurs activités. Mais ce que les banques avaient gagné était artificiel et la bulle s’est dégonflée entre 2008 et maintenant.

A l’autre extrémité de la chaîne, la Belgique n’a pas de matières premières, de métaux précieux ni d’énergie. La seule chose qui lui reste pour garder demain un niveau de richesse acceptable, c’est l’industrie. Or, aujourd’hui c’est un énorme problème à cause des coûts salariaux élevés, les plus hauts d’Europe.

On a beau améliorer la productivité, on n’arrivera jamais à compenser le coût salarial horaire que l’on a en Belgique. Celui d’un ouvrier belge est de 37,70 euros, à comparer à 28,90 euros en Allemagne, 24 euros en Italie et 4 euros en Roumanie. Rien qu’en Europe, nous avons un désavantage compétitif énorme qui est aussi un problème social. S’il n’y a plus d’emplois pour les cols bleus, que va-t-on faire avec nos ouvriers ?

Pour des raisons autant économiques que politiques, il faut réindustrialiser le pays. Mais pour avoir une chance de maintenir ou redéployer une activité industrielle sur nos terres, il faut absolument réduire massivement les cotisations sociales et les taxes sur les bas salaires. Ayons ce débat rapidement. Aux Etats-Unis, l’effort de réindustrialisation est en cours et il est colossal.

Que manque-t-il à la Wallonie aujourd’hui ?

Une prise de conscience commune du besoin de changement. Je crois beaucoup en une concertation des forces vives autour d’une série de thèmes comme la diminution de la taxation sur les bas salaires. Par ailleurs, je trouve que l’on a parfois un problème de motivation car on s’est habitué à un certain niveau de confort et de richesse. Or, on réalise de plus en plus que ce niveau de richesses est loin d’être garanti pour les générations futures. On doit dès lors avoir plus de volonté et d’énergie pour se battre et se dépasser. Le monde change autour de nous et si on nous ne nous remettons pas en question, nous allons être largués.

Votre nom est régulièrement cité comme successeur à Didier Bellens chez Belgacom ou à Johnny Thijs (bpost)…

Je dirige une entreprise active au niveau mondial dans un domaine passionnant pour un ingénieur et qui, de surcroît, a son centre de décision en Belgique. J’y consacre tout mon temps et mon énergie. Personne ne peut prédire de quoi l’avenir sera fait !

Propos recueillis par Sandrine Vandendooren

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