Comment le gouvernement place la balle dans le camp des entreprises

Le gouvernement Michel. © Belga

La coalition de Charles Michel baisse substantiellement le coût du travail. Elle espère maintenant que les entreprises saisiront l’occasion pour investir et créer de l’emploi. Les mesures sont notamment financées par le retour d’une TVA à 21% sur l’électricité et une hausse du précompte mobilier de 25 à 27%.

“Nous avons fait le premier pas, j’invite les employeurs à faire le deuxième et à créer les emplois”, a déclaré le vice-Premier ministre Jan Jambon (N-VA), ce jeudi midi lors de la présentation des mesures fiscales fédérales pour les prochaines années. Ces mesures constituent “un moteur pour la croissance et l’emploi”, clame le gouvernement. Mais ce sont maintenant les entreprises qui doivent empoigner le volant pour faire tourner ce moteur.

De quoi bénéficient-elles donc ? De la confirmation d’une baisse des cotisations patronales de 33 à 25%, ce qui réduira considérablement le coût du travail (-1,3 milliard en deux ans) et devrait, espère le gouvernement, contribuer à mieux positionner la Belgique aux yeux des groupes industriels qui cherchent à investir en Europe. A cela s’ajoute une enveloppe de 430 millions spécifiquement dédicacées aux PME. Elle permettra d’augmenter la déductibilité des investissements et de réduire encore les cotisations sociales sur les trois premiers emplois. Ces mesures doivent toutes entrer en vigueur l’an prochain, afin de “donner un gros coup de boost” au moment où l’économie semble redémarrer, a précisé Alexander De Croo (Open VLD).

Par ailleurs, les dispenses de versement de précompte professionnel pour le travail de nuit et en équipe (qui privent déjà aujourd’hui l’Etat d’un milliard d’euros) seront élargies. Des dispositions particulières devraient en outre être prises pour l’industrie de haute technologie et la construction, a ajouté le Premier ministre Charles Michel, sans entrer dans de plus amples précisions.

Cet ensemble de mesures pour la compétitivité de l’économie belge représente un budget de 2 milliards d’euros à l’horizon 2018. Il se complète par une enveloppe de 1,7 milliard, afin d’accorder un gain mensuel net de 100 euros pour les bas et moyens revenus. Comment ? Le gouvernement décidera après concertation avec les Régions, désormais impactées par toute baisse de l’impôt des personnes physiques (elles se financent par des additionnels). Cela pourrait être une hausse de la quotité exonérée, une révision des barèmes ou une augmentation du bonus à l’emploi (cotisations personnelles du travailleur). La dernière piste n’impacte pas les Régions mais elle ne profite qu’aux travailleurs salariés.

Trois sources de recettes

Comment finance-t-on ces 3,7 milliards ? Une partie (15% ou 550 millions) viendra de nouveaux efforts dans l’efficacité de l’appareil d’État. Pour le reste, trois sources alimenteront les recettes supplémentaires :

La TVA sur l’électricité. Le taux passera de 6 à 21%, comme c’était le cas avant 2013. Cela doit rapporter 712 millions en 2018. La Belgique se range ainsi à la recommandation de nombreuses instances internationales, qui estiment qu’un taux réduit de TVA sur l’énergie est une aberration environnementale (comme le régime fiscal des voitures de société, auquel le gouvernement ne touche pas).

Le gouvernement Di Rupo avait baissé la TVA sur l’électricité, avant tout pour réaliser un saut d’index sans le dire. Le retour à un taux de 21% va maintenant accélérer le franchissement de l’indice-pivot. Mais comme un saut d’index a déjà été décidé, les salaires ne vont pas suivre.

Les accises. Le gouvernement Michel table sur une recette de 900 millions, en relevant les accises sur le tabac (+0,7 € le paquet de cigarettes), l’alcool (+0,1€ la bouteille de vin, +2,5 € la bouteille d’alcool fort), les sodas (modalités à définir avec le secteur, en fonction de la nocivité des ingrédients) et le diesel (il augmentera en même temps que les taxes sur l’essence diminueront afin d’arriver à un équilibre entre les deux carburants).

Le capital. C’est peut-être la mesure la plus surprenant de la part de cette coalition de centre-droit : la hausse du précompte mobilier de 25 à 27% (sauf pour le carnet d’épargne) doit rapporter 350 millions d’ici 2018. Une taxe sur la spéculation est par ailleurs amorcée. Elle frappera les plus-values sur les actions détenues moins de six mois. Le rendement escompté est d’à peine 28 millions d’euros, on est donc là plutôt dans le symbole. Le gouvernement Michel table aussi sur un meilleur rendement de la lutte contre la fraude fiscale (+175 millions en deux ans), une réforme de la fiscalité des fonds d’investissement immobilier (390 millions) et même le versement de dividendes par Belfius (75 millions).

Lors de son conclave budgétaire, le gouvernement s’est aussi accordé sur les efforts supplémentaires de 978 millions en 2015 et 782 millions en 2016, afin de rester sur la trajectoire de retour à l’équilibre en 2018. Ces efforts sont réalisés quasi-exclusivement en comprimant les dépenses de la sécurité sociale. ” Le respect de cette ligne budgétaire est la meilleure garantie de continuer à avoir des charges de dettes les plus basses possibles “, a commenté le ministre des Affaires étrangères, Didier Reynders (MR). Le gouvernement table sur une réduction cumulée de ses charges d’intérêt de 950 millions d’ici la fin de la législature.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content