La chaîne belge Tom&Co modernise ses magasins et s’étend en France

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Jérémie Lempereur Journaliste Trends-Tendances - retail, distribution, luxe

Dans un contexte de forte concurrence, notamment en ligne, Lionel Desclée est en train de repositionner Tom&Co sur le service et le conseil.

Il y a tout juste un an, le groupe Delhaize vendait son enseigne spécialisée dans les articles pour animaux domestiques à l’un de ses jeunes cadres, Lionel Desclée. Dans un contexte de forte concurrence, notamment en ligne, ce dernier est en train de repositionner l’animalerie sur le service et le conseil. Un webshop est par ailleurs en cours de préparation.

“Le supermarché de la croquette, il est derrière nous ! ” Alors que Tom&Co vole de ses propres ailes depuis un an, racheté à Delhaize par Lionel Desclée (lire l’encadré ” Quand l’ex-CEO rachète ‘son’ enseigne “), le leader belge des animaleries, avec près de 200 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2016 et un Ebitda de 4 %, est en train d’effectuer sa mue. ” Nous devons nous réinventer par rapport à des acteurs qui ne fonctionnent que sur le prix “, explique le jeune patron de 38 ans. C’est que la concurrence est rude sur ce marché estimé à environ 1,3 milliard d’euros. En plus des autres animaleries ou jardineries-animaleries comme Aveve, Maxi Zoo, Animal Confort, etc., en plus des discounters non-food vendant aussi des produits pour animaux, et en plus de tous les supermarchés qui disposent pour la plupart d’un rayon consacré à ces articles, de nouveaux acteurs uniquement en ligne (des pure players, comme on les appelle) font leur apparition. On peut penser notamment à Zoofast.be ou Zooplus.be. ” Avec leur business model basé sur les volumes et des marges inexistantes, les pure players sont nos principaux concurrents, n’hésite pas à affirmer Lionel Desclée. Ils offrent à la fois le prix et la facilité. ”

“Le magasin reste un lieu d’expertise”

Comment Tom&Co a-t-il décidé de se démarquer dans ce contexte hyper-concurrentiel ? ” Au niveau du prix, nous avons une offre de produits bien positionnée, lance le responsable. Nos marques propres sont 20 à 30 % moins chères que les grandes marques pour une même qualité, voire supérieure. En ce qui concerne la facilité, beaucoup de nos magasins proposent la livraison à domicile. Aujourd’hui, l’ensemble de l’assortiment (7.000 à 8.000 produits) est disponible en ligne, mais pas encore à l’achat. Nous sommes en train de travailler sur une offre omnicanal : l’idée étant de permettre aux clients d’acheter en ligne et de se faire livrer à domicile ou en magasin, ou d’acheter en magasin et de se faire livrer à domicile, etc. Toutes les possibilités sont ouvertes. Nous pourrons alors augmenter considérablement le nombre de références. ”

Les magasins seront-ils toujours utiles lorsque la chaîne aura lancé son site d’e-commerce ? La question est légitime quand on sait que les achats effectués pour son animal de compagnie sont la plupart du temps toujours identiques. ” Tout cela est vrai, reconnaît Lionel Desclée. Mais le magasin reste un lieu d’expertise important. Nos points de vente physiques représentent un atout que n’a pas l’e-commerce. ” Pour autant que leur rôle évolue. Tom&Co l’a bien compris. La chaîne assure vouloir plus que jamais mettre l’accent sur le conseil et le service. ” Nos magasins ne peuvent plus ne vendre que des produits, assure le big boss. Ils doivent être des lieux de plaisir, de découverte. Ils doivent présenter un large assortiment et des animaux vivants. Par ailleurs, le personnel doit être passionné et doit pouvoir fournir une vraie expertise. En Belgique, beaucoup de nos collaborateurs sont assistants vétérinaires. En France, il faut carrément suivre trois ans d’études en animalerie. ”

“Un carrefour pour les prestataires de services”

Lionel Desclée
Lionel Desclée© PG

Pour conserver une pertinence à l’heure de l’e-commerce, Tom&Co développe en outre toute une panoplie de services. La chaîne dispose d’une vingtaine de centres de toilettage pour laver son chien. Elle permet aussi de contracter des assurances, d’adopter en collaboration avec des refuges, de garder les animaux, d’accéder à des cours d’éducation canine, etc. ” Nous souhaitons nous positionner comme un carrefour pour l’ensemble des prestataires de services dans notre secteur “, affirme le CEO.

Alors qu’en Belgique, où il possède 130 magasins (surtout franchisés), le groupe adopte une stratégie de remodeling de ses points de vente, certains étant par la même occasion relocalisés; en France (20 magasins) et au Luxembourg (2 magasins), l’heure est aux ouvertures. Tom&Co est déjà présent dans l’Hexagone depuis 2011, mais la chaîne a décidé de pousser sur l’accélérateur. C’est que les perspectives de croissance y sont particulièrement alléchantes, avec un marché de l’animalerie pesant quatre fois plus que chez nous. ” Notre objectif est d’être le leader en franchise sur la France, affirme Lionel Desclée. Nous approcherons les 25 magasins pour la fin de l’année. ” Si pour grandir, l’enseigne a racheté quelques animaleries existantes, elle mise surtout sur une croissance organique (ouverture de nouveaux points de vente en franchise).

“Le challenger évolue plus vite que le leader”

La concurrence, en France, est plus variée que chez nous. Il y a des chaînes spécialisées comme Maxi Zoo ou Animalis, mais aussi de très nombreuses jardineries-animaleries. ” Le marché français des animaleries est très fragmenté, assure notre interlocuteur. Et nous arrivons avec un concept qui plaît car il est moderne, vivant et qualitatif, tout cela à des prix bien positionnés. ” Mais contrairement à chez nous, Tom&Co débarque en France en petit Poucet qui doit se faire une place. ” Cela permet de se remettre en question, répond le patron. Etre leader, ça ne dure qu’un temps. Le challenger évolue souvent plus vite que le leader. ”

Pour percer sur le marché français, notre pépite belge n’a pas spécialement dû adapter son concept. Une animalerie, c’est une animalerie ! En revanche, il a fallu s’adapter au degré d’exigence des clients. ” Le client français aborde beaucoup plus le personnel en magasin, explique Lionel Desclée. Le client belge, lui, est plus autonome. Notre personnel français doit donc avoir un degré d’expertise très élevé. ”

Pour l’instant, Tom&Co souhaite se centrer sur ses trois marchés actuels. ” Il n’est pas question d’ouvrir d’autres marchés, confirme le responsable. Mais nous souhaitons en revanche renforcer les liens qui existent entre les différents acteurs européens actifs dans notre industrie. “

Quand l’ex-CEO rachète “son” enseigne

En acquérant Tom&Co avec son associé Thierry le Grelle il y a un an, Lionel Desclée est loin d’acheter un chat dans un sac. L’homme travaille en effet depuis 12 ans pour le groupe Delhaize, propriétaire du leader belge de l’animalerie. En 2011-2012, il sera même CEO de l’enseigne spécialisée. “Quand Delhaize a souhaité se séparer de Tom&Co, il y avait un détricotage important à effectuer car la chaîne était totalement imbriquée dans le groupe, explique-t-il. Delhaize cherchait donc un profil pouvant mener à bien ce détricotage. Il s’agissait en outre d’une société saine, leader dans son domaine, avec de vrais axes de croissance. Je voulais reprendre une grosse société et mener à bien son développement.”

Avec son complice Thierry le Grelle, un ancien de la banque d’affaires Lazard, aujourd’hui CFO de Tom&Co, Lionel Desclée créera le véhicule d’investissement PetSerCo afin de conduire l’opération. Le trentenaire ne pipera mot en ce qui concerne le montant du rachat. “Nous sommes les actionnaires principaux, explique-t-il. Par ailleurs, nous avons le soutien d’investisseurs privés que nous avons choisis pour les compétences qu’ils pouvaient apporter dans la réalisation de notre projet. C’est un investissement à long terme, l’objectif n’est pas de revendre.”

A ce jour, l’entreprise a encore de nombreux contacts avec Delhaize. “Toutes les semaines, affirme le responsable. La plupart des services de support de Tom&Co sont organisés par Delhaize : l’informatique, les finances, l’expansion, les RH, l’import, l’immobilier, etc. Nous sommes en train d’engager des équipes, de développer des compétences, mais cela prend du temps. Delhaize continue donc d’être un prestataire de services. Chaque mois, nous prenons en charge un service, et d’ici la fin de l’année, il ne devrait plus y avoir de lien avec Delhaize.”

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