Le manager de demain sera hybride
Les algorithmes intelligents débarquent en force dans les entreprises et, avec eux, leur lot de bouleversements. Cette nouveauté technologique nourrit pas mal de fantasmes et d’incertitudes. Au point que certains observateurs prédisent la disparition des managers et des CEO puisque l’intelligence artificielle sera en mesure de digérer et d’interpréter des montagnes de données. Et de prendre des décisions. Est-ce possible ? Et, si les managers demeurent, quelles seront les compétences requises pour diriger des équipes ou des entreprises ?
Les développements de l’intelligence artificielle (IA) suscitent autant d’interrogations et de peurs que de fantasmes. Si l’on s’attend à de nombreux progrès au quotidien, les futurologues et les gourous pointent surtout la disparition de nombreux métiers, totalement laminés par des machines et algorithmes qui seront capables de réaliser de plus en plus de tâches sans intervention humaine. Ainsi, les plus pessimistes enterrent d’ores et déjà les chauffeurs de taxi, les camionneurs, les comptables ou les radiologues. Les technologies laissent, de fait, penser que des voitures et des camions seront en mesure de rouler tout seuls. La numérisation des données comptables tend à réduire à néant l’intérêt des professionnels du chiffre tandis que des IA se montrent d’ores et déjà capables d’analyser des radios ou des grains de beauté sur la peau des patients.
Selon Jack Ma, d’ici une trentaine d’années, c’est un robot que le “Time Magazine” mettra en couverture lorsqu’il célébrera le CEO de l’année.
“Le prochain CEO de l’année ? Une IA !”
Certains observateurs vont même plus loin : ils imaginent, ni plus ni moins, la disparition des managers et des CEO. C’est le cas de Stéphane Mallard, auteur français du livre Disruption (*). Pour lui, les années à venir vont se caractériser par la disparition totale des managers. ” Pendant des décennies, le manager a structuré les rapports de production dans l’entreprise. Il représentait l’échelon à atteindre, la reconnaissance et venait récompenser les performances passées avec un titre social prestigieux. La disruption digitale rend les managers caducs au profit de l’intelligence collective dans les équipes. ” Et d’évoquer une interview de Steve Jobs qui, dès 1985, affirmait ” les meilleurs employés s’auto-managent. Ils n’ont pas besoin d’être dirigés. Dès lors qu’ils savent quoi faire, ils trouvent comment le faire “. Et le gourou français de théoriser : ” le système produit de l’ordre, de la structure et donc une organisation observable et un équilibre de fonctionnement à un niveau global. (…) Dans un système auto-organisé, le leader propose une vision et les employés agissent comme des entrepreneurs pour l’atteindre en s’organisant et en agissant comme ils le souhaitent “.
Les développements de l’intelligence artificielle et des algorithmes intelligents viendraient, selon lui, soutenir cette évolution. Capables d’analyser un nombre colossal de données et, surtout, de les interpréter pour prendre des décisions, les intelligences artificielles rendraient progressivement le rôle des managers obsolète. Stéphane Mallard n’est pas le seul à prédire la disparition des décideurs au sein des entreprises. Jack Ma, l’emblématique patron d’Alibaba, le géant de l’e-commerce chinois qui prévoit d’investir pas moins de 15 milliards en R&D et en IA dans les cinq prochaines années, s’était déjà laissé aller à quelques prédictions en 2017. Selon l’emblématique patron, d’ici une trentaine d’années, c’est un robot que le Time Magazine mettra en couverture lorsqu’il célébrera le CEO de l’année. Rien que cela.
Impensable ? Irréaliste ? En tout cas, le hedge fund Bridgewater s’évertue depuis plusieurs années à faire disparaître ses managers, voire son CEO. Le hedgefund américain avait recruté l’ancien responsable du développement de Watson (l’IA d’IBM) pour mettre en place l’automatisation du management quotidien de la firme, en ce compris les engagements, les licenciements ou la prise de décisions stratégiques. C’est la vision poursuivie par le boss de Bridgewater, Ray Dalio, pour qui la société doit être en mesure de tourner même s’il n’est pas là. Depuis 2015, une équipe de développeurs avance sur cet ambitieux projet, note le Wall Street Journal. Le quotidien américain croit d’ailleurs savoir que le rôle des êtres humains qui resteront chez Bridgewater consistera à déterminer les critères selon lesquels la machine prendra ses décisions et d’intervenir si quelque chose tourne mal. Mais non plus de trancher eux-mêmes. Du bluff, pour certains experts. De la communication, pour d’autres.
La fin des managers ? “Un fantasme !”
Ces prédictions sur la fin des managers ont de quoi laisser perplexe. Laurent Alexandre, célèbre observateur français des évolutions technologiques et particulièrement de l’intelligence artificielle, n’y croit pas une seule seconde. Il n’est pourtant pas le dernier à prédire la disparition totale d’un certain nombre de métiers comme les comptables, les chauffeurs ou la mutation de dizaines d’autres, du radiologue au dermatologue en passant par les avocats ou les opérateurs des services clients.
Mais quand il s’agit des managers, l’homme s’emporte devant ” les fantasmes ” et extrapolations douteuses que certains peuvent faire pour prédire la fin des managers. ” Je ne vois absolument pas comment le décideur peut disparaître, s’interroge-t-il. Il y a un moment où il faut arrêter les fantasmes : on est loin, très loin, d’une technologie d’intelligence artificielle qui pourrait faire ce que fait un manager ou un patron. Ce n’est pas parce qu’une IA est bien meilleure qu’un humain pour détecter un cancer, pour examiner des scanners et reconnaître des patterns qu’elle peut être capable de gérer madame Michu dans une entreprise. Le manager décisionnel qui prend des décisions multi-sectorielles et qui a un métier transversal et multi-disciplinaire ne sera pas remplacé par des algorithmes. Pour cela, il faudrait une IA forte, ce qu’on n’est pas près d’avoir. On ne sait même pas si on y arrivera. ”
Cécile Dejoux, professeur des universités au Cnam et auteur du livre Métamorphose des managers, abonde également dans ce sens. Impensable que les décisions stratégiques dans nos entreprises ne soient plus, un jour, entre les mains de leurs décideurs. ” L’intelligence artificielle prend des décisions rationnelles, rétorque-t-elle. Or, on le sait bien : les décisions des managers intègrent les dimensions politiques, émotionnelles et relationnelles. L’IA est incapable de se comporter dans des situations aléatoires et ne sait pas faire face à la complexité de nouvelles situations… ”
Rajeunir son “comex”
Reste que l’avenir que dessinent l’intelligence artificielle et le numérique s’annonce différent. Vraiment très différent. Cela changera sensiblement la donne et l’on peut aisément anticiper de lourds bouleversements pour les managers actuels. ” Il faudra rajeunir les dirigeants des entreprises et les managers, prévoit Laurent Alexandre. Les patrons actuels ne seront plus adaptés. Il vaut mieux, dès à présent, avoir des jeunes aux postes clés des entreprises plutôt que des vieillards cacochymes face aux défis de plus en plus numériques et complexes du business de demain. La technologie devient tellement forte et stratégique qu’on assistera à de profonds changements dans les comex ( comités exécutifs, Ndlr). ”
Les nouveaux managers devront apprendre l’alphabet numérique et comprendre comment il fonctionne, puis former leurs équipes.
Et surtout, les managers qui veulent réussir à l’avenir devront aligner de nouvelles compétences pour faire face à ce monde en changement. ” L’IA aura de nombreux impacts dans la vie du manager, analyse Cécile Dejoux. D’abord, elle remplacera certaines de ses tâches : elle le rendra plus efficace en fixant pour lui des rendez-vous ou en priorisant ses e-mails. Elle va aussi l’assister dans certaines tâches voire… l’augmenter. En effet, certaines des tâches de manager, à l’avenir, ne seront possibles que grâce à l’IA. Par exemple la curation, à savoir la possibilité de scanner toutes les infos présentes dans des bases de données et d’en faire des analyses. Imaginez le cas d’une compagnie d’assurance : l’IA pourra scanner toutes les offres en temps réel chez les concurrents, les analyser et faire des offres de prix en conséquence. Cela constituera inévitablement une aide à la décision. ” Et une manière, pour le manager, de ne plus se concentrer sur les décisions du day to day mais sur les grandes orientations stratégiques de l’entreprise.
Réapprendre à penser
Le professeur ne croit donc pas à la disparition des managers et décideurs en entreprises. ” Les IA, il faudra les contrôler, prédit Cécile Dejoux. On verra moins de managers comme on les connaît aujourd’hui, mais plus de contrôleurs : l’IA risque d’avoir des biais, il faudra lui fournir plus de données. Ce seront d’autres types de managers : des éleveurs d’IA, des gardiens de la connaissance. Ils devront être plus formés, agiles d’esprit… ”
Et surtout, ils devront apprendre l’alphabet numérique et comprendre comment il fonctionne, puis former leurs équipes. Pour la spécialiste, le manager devrait également aller plus vite et se placer dans une logique où il teste et apprend. Et ” détenir les compétences de management de l’innovation, le design thinking, pour penser différemment et innover au quotidien. Ces compétences sont fondées sur l’observation empathique, la créativité et le prototypage “. Cécile Dejoux lie par ailleurs ces compétences à l’agilité, une notion à laquelle elle réserve la part belle dans son livre. ” Etre agile signifie qu’il faut s’adapter et innover plus vite que les autres, écrit-elle, ce qui implique que l’on peut se tromper mais qu’il faut s’en apercevoir vite. Dès qu’une opportunité se présente, il devient important de la tester et, si cela se justifie, d’apporter une proposition avec un MVP ( produit minimum viable, Ndlr) qui symbolise un prototype, une proposition non finalisée qui peut être améliorée. Ce principe est directement relié au droit à l’échec : quand on va vite, il faut accepter de se tromper. ”
Fabrice Enderlin, ancien chief talent officer d’UCB devenu dirigeant de Discern Yard, observe lui aussi les grands bouleversements du numérique dans les organisations, et l’impact qu’il peut avoir sur les relations de travail. La connexion permanente des managers au travers des outils numériques a d’ores et déjà changé la donne dans la manière d’interagir avec les équipes, de réagir, de partager l’information ou de piloter les travailleurs. Il souligne, comme beaucoup, l’accélération des technologies et insiste sur le discernement (et donc l’esprit critique) dont doivent désormais faire preuve les CEO et managers. ” Les algorithmes sont et resteront des outils d’aide à la décision, insiste-t-il. Le manager aura la possibilité d’avoir accès à beaucoup plus de données prédigérées et cela doit le pousser à être plus intelligent. Il doit pouvoir en discuter la pertinence, faire appel à son intelligence de situation, prendre de la distance. Le discernement devient une notion fondamentale. Et certaines entreprises n’hésitent pas à organiser des formations pour réapprendre à penser ou sur l’art du questionnement. ”
Laurent Alexandre anticipe, lui aussi, l’apparition d’une série de nouvelles tâches ou missions dans le chef des décideurs de demain, qui impliqueront de nouvelles compétences. Car outre les fondamentaux (savoir prendre des décisions, motiver les équipes, gérer les conflits, etc.), les managers ” devront intégrer et maîtriser, à l’ère de l’IA, l’éthique, la compliance juridique, la cybersécurité ou l’espionnage industriel, nous glisse l’auteur du best-seller La guerre des intelligences. Et surtout, le nouveau manager devra être en mesure de développer des plans technologiques puissants, prévoir les évolutions technologiques dans son business. Il devra être en mesure de voir arriver un Amazon sur son marché et de proposer une stratégie adéquate en réaction. Le manager devra avoir une bonne connaissance des codes et pratiques des Gafa et devra devenir un fin stratège d’entreprise. ”
“Bon et bien payé “vs” moyen sous-payé”
Cela fait dire au futurologue français que l’on va au-devant ” d’énormes problèmes pour les cadres pas très qualifiés, s’inquiète-t-il, avec une nette diminution de leur salaire, voire la disparition de nombreux cadres moyens parasites qui ne génèrent pas de valeur mais s’inscrivent simplement dans des process et de la bureaucratie… Il y a fort à parier qu’à l’avenir, une entreprise fonctionnera avec moins de cadres moyens, mais avec quelques dirigeants bien payés et transversaux. ”
Une tendance que l’on observe d’ores et déjà à l’heure des Gafa qui comptent parmi les entreprises qui paient le mieux leurs salariés. Le salaire médian chez Google culmine, d’après l’indice S&P 500, à 240.000 dollars par an. Et 197.000 dollars chez Alphabet, la maison mère de Google. Les sociétés de la tech qui dégagent de plantureux bénéfices n’hésitent pas se montrer généreuses pour débaucher les meilleurs talents. Mais ce phénomène n’est pas limité aux géants du Net. La tendance serait générale.
” L’époque est idéale pour les personnes exceptionnelles et désastreuse pour les individus moyens, écrit le professeur américain Scott Galloway dans son livre The Four. C’est un des effets majeurs de l’environnement disruptif créé par la montée d’une économie de la loterie où la technologie numérique dessine un marché unique sur lequel un seul leader peut rafler l’écrasante majorité des gains. (…) Ce phénomène a un corollaire : un marché sur lequel la valeur des produits haut de gamme explose tandis que celle des produits inférieurs s’écroule. (…) Le même phénomène se produit dans le milieu professionnel. Grâce à LinkedIn, nous sommes tous constamment sur le marché mondial du travail. Si vous êtes exceptionnel, des milliers d’entreprises vous cherchent et vous trouvent. Si vous êtes bon, vous entrez en concurrence avec des dizaines de millions d’autres ‘bons’ candidats et votre salaire risque de stagner ou de décliner. ” A bon entendeur…
Dans son best-seller The Four récemment traduit en français ( The Four, le règne des quatre – La face cachée d’Amazon, Apple, Facebok et Google), Scott Galloway consacre, après une longue étude des pratiques des géants du Net, un important chapitre sur les compétences nécessaires à développer pour gérer sa carrière au sein du monde de l’entreprise d’aujourd’hui. Morceaux choisis.
Aller à l’université. ” Si vous voulez devenir un col blanc prospère à l’ère du numérique, le passage par des études universitaires prestigieuses sera le meilleur marqueur de votre ambition. Oui, Zuckerberg, Gates et Jobs ont abandonné leurs études. Mais vous et vos enfants n’êtes pas Mark Zuckerberg. Et même si aucun d’entre eux ne détient un diplôme universitaire, leur passage par les campus a été essentiel à leur succès. ”
L’habitude de la réussite. ” Les personnes qui atteignent leurs objectifs dans un domaine réussissent souvent dans tous les autres. La réussite est une habitude qui doit être cultivée et répétée. Pour réussir, il faut avant tout être un compétiteur. Vous ne pouvez pas gagner sans monter sur le ring et ce n’est qu’en prenant un risque, en vous exposant à l’échec que vous pouvez véritablement réussir. ”
S’installer en ville. ” Nous avons cru que l’ère numérique permettait de travailler n’importe où. En fait c’est l’inverse qui s’est produit. La santé, les informations, le pouvoir et les possibilités se sont concentrés car l’innovation naît de l’accouplement d’idées. Plus de 80 % du PIB mondial est généré dans les centres urbains et 72 % des villes présentent une croissance supérieure à celle de leur pays. ”
Etaler sa carrière et ses réussites. ” Comment vous distinguer de vos brillants congénères ? Exposez vos attributs, écrit Scott Galloway. Quel est l’environnement idéal pour révéler votre identité ? Vous avez le choix : Instagram, Twitter, les équipes de sport des entreprises, les discours, les bouquins, etc. Vous avez besoin d’un médium pour exposer votre génialitude car le chemin de la discrétion mène directement à une faible rémunération. ”
Monogamie en série. ” La monogamie en série est la meilleure stratégie. Trouvez un bon employeur chez qui vous pourrez développer de nouvelles compétences, gagnez le soutien d’un cadre de l’entreprise (qui se battra pour vous), faites-vous rémunérer en partie par des actions ou des épargnes forcées, et donnez-vous à 100 % pour l’entreprise pendant trois ou cinq ans. ”
Soyez fidèle aux gens, pas aux organisations. ” Les personnes dépassent les entreprises et, à l’inverse de celles-ci, elles attachent de l’importance à la loyauté. Les bons managers savent que leur valeur dépend de celle de leur équipe. (…) Si votre patron ne se bat pas pour vous, soit vous avez un mauvais patron, soit vous êtes un mauvais employé. ”
Scott Galloway, ” The Four, le règne des quatre “, éditions Quanto, 382 p.
“Les entreprises qui ont besoin de managers ont mal recruté leurs employés”
TRENDS-TENDANCES. Comment, selon vous, les managers sont-ils mis sous pression avec l’intelligence artificielle ?
STéPHANE MALLARD. Le phénomène de la disparition des managers dépasse la question de l’IA. Les équipes qui fonctionnent bien n’ont en réalité pas besoin de managers. Dans les boîtes tech performantes, il y a un leader visionnaire et les équipes. Et pas des armées de managers bourrés d’ego. Ce sont les gens mauvais qui ont besoin de managers. Si une entreprise a besoin de faire appel à des managers, c’est surtout qu’elle n’a pas recruté les bonnes personnes.
Par ailleurs, c’est vrai que l’IA signe la fin des managers parce qu’elle prendra des décisions à leur place en analysant toute une série d’indicateurs, de KPI ( indicateurs clés de performance, Ndlr), de données du marché, etc. Aujourd’hui, beaucoup de managers justifient leurs décisions sur la base de données chiffrées. Or, on le sait, les intelligences artificielles seront bien meilleures que les hommes pour l’interprétation de ces données. Dans beaucoup de cas, les managers servent aujourd’hui à envoyer des e-mails et à assister à des réunions. Cela n’aura plus de sens à l’heure de l’intelligence artificielle.
Dans ce cas, comment voyez-vous nos grandes entreprises à l’avenir ? Des géants sans structure hiérarchique ?
A très long terme, je vois surtout des structures qui ne sont plus des entreprises mais qui se développent en mode ” projets dynamiques “. C’est-à-dire qu’on verra se développer des formes hybrides constituées de pactes d’actionnaires et d’algorithmes qui appelleront les forces de travail. Un peu comme les groupes d’indépendants que l’on voit apparaître aujourd’hui. D’ailleurs, le salariat en tant que tel est amené à disparaître. Rassembler au sein d’une entreprise tous les besoins sous forme de salariés avec un contrat unique ne sera plus nécessaire : avec l’IA et les plateformes, trouver les bons prestataires devient facile et de moins en moins cher.
Si les algorithmes sont capables de remplacer des managers, voire des CEO, cela vaut-il aussi pour nos dirigeants politiques ? Prédisez-vous également la disparition du poste de président de la République par exemple ?
On aura toujours besoin de représentants politiques parce que nous sommes des humains. Mais ce n’est plus l’humain qui prendra les décisions de politique publique. Comme un médecin qui s’appuiera sur l’intelligence artificielle pour la détection de maladies, leur diagnostic et le traitement le plus adapté, les hommes politiques s’appuieront sur des algorithmes. Demain, la démocratie consistera surtout à faire le choix des algorithmes, des critères de décisions. Il faudra surtout permettre au citoyen de choisir les outils qui vont gouverner ou qui vont aider les politiques à gouverner ! Parce qu’il y a en aura plusieurs : n’oubliez pas qu’une intelligence artificielle s’éduque et qu’elles auront toutes des ” personnalités ” construites sur la base de leurs interactions…
” Lorsque l’appareil photo numérique est arrivé (qu’ils ont eux-mêmes inventé et breveté), les responsables de Kodak se sont dit que c’était une bonne nouvelle pour leur métier, qui consistait à imprimer des photos, écrit Stéphane Mallard dans son livre Disruption. Erreur fatale : Kodak n’a pas compris que c’est le comportement des utilisateurs qui avait changé : regarder ses photos sur un smartphone est devenu la norme, imprimer ses photos est devenu obsolète. ”
L’auteur pointe l’arrivée violente du phénomène de disruption qui n’est, pour lui, plus un cas particulier mais la norme. ” La disruption est universelle. ” Il insiste donc : il faut penser comme un entrepreneur et plus comme un gestionnaire. Pour cela, les managers doivent être prêts à se saborder et à pivoter. ” Il faut s’imaginer déjà mort pour penser autrement son activité et se demander où sera la valeur dans le futur. ” Mais pour y parvenir, il faut une vision. Pas un plan stratégique à trois ou cinq ans mais savoir où va le marché à long terme car, comme l’illustre l’exemple Kodak, le marché peut disparaître. L’entrepreneur ” voit ce que personne d’autre n’a vu, continue Stéphane Mallard. Il imagine là où sera la valeur avant tout le monde et va la chercher “. Mais être précurseur a un prix : celui d’avoir raison contre et avant tout le monde…
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