Les start-ups financières peuvent-elles vraiment éradiquer les banques ?
Bousculer le secteur bancaire traditionnel, tel est le pari de dizaines de start-ups financières, surnommées les Fintech. De petites entreprises, mais avec un grand potentiel.
Lending Club, Square, Banking Up ou encore Epiphyte, ces noms ne vous disent peut-être rien. Pourtant, ces start-ups seraient en train de révolutionner le monde de la finance. Dans le jargon, on les appelle les “Fintech”. Comprenez, de jeunes start-ups, qui allient technologie de pointe et services bancaires (presque) classiques.
De nouveaux services
Des coûts plus faibles, une plus grande proximité entre le client et le conseiller, alliée paradoxalement à une forte dispersion géographique permettant de diversifier les portefeuilles d’investissements, les atouts des Fintech ne manquent pas. Certaines proposent aussi de repenser la manière dont les banques classiques évaluent les risques de défaut de paiement de leurs clients. Parmi elles, il y a OnDeck. La firme offre des prêts à des entrepreneurs, non pas en regardant leur cote de solvabilité personnelle, mais plutôt la santé de leur business, y compris via une étude approfondie des réseaux sociaux. Une pratique bien souvent écartée par les banques américaines. L’idée semble en tout cas séduire puisqu’OnDeck a déjà octroyé 1,7 milliard de dollars de crédits à travers le pays.
Dans un autre registre, certaines Fintech se sont lancées sur le marché des paiements internationaux, qui serait contrôlé par les banques à hauteur de 85%. Basée à Londres, The Currency Cloud fait partie de ces pionniers qui favorisent les échanges d’un pays à l’autre. Il y a aussi Afrimarket, qui nous permet d’envoyer de l’argent en Afrique, via un commerçant partenaire sur place. En d’autres termes, on lui envoie l’argent, et il le transmet à nos proches, sous la forme d’un bien.
Le secteur bancaire traditionnel en danger ?
Ces Fintech viseraient d’après The Economist “le coeur de l’industrie“. Et des “revenus que Goldman Sachs {estimerait} à 4.700 milliards de dollars“. Depuis leur avènement, elles n’en démordent pas. Rien que durant l’année 2014, elles auraient attiré douze milliards d’investissements, soit quatre de plus qu’en 2013. Leurs levées de fonds se comptent ainsi par dizaines, voire centaines de millions de dollars pour certaines. Le fief de ces start-ups, sans vraiment de surprise, est la Silicon Valley, qui concentrerait d’après une étude d’Accenture 32% des investissements du secteur. L’Europe, elle, arrive loin derrière, avec ses 13%. Mais les espoirs sont de plus en plus tournés vers elle, grâce à l’attractivité de Londres. L’an dernier, la capitale aurait raflé pas moins de la moitié des investissements réalisés dans les Fintech du continent, soit environ 539 millions de dollars (475 millions d’euros).
Surnommées par Libération la “nouvelle poule aux oeufs d’or des investisseurs“, les Fintech font parler d’elles depuis quelques années. Pour Philippe Herlin, économiste interrogé par le magazine, elles proposeraient “un vrai service, et moins cher“. Il va jusqu’à dire que “si le secteur bancaire n’agit pas, il deviendra la sidérurgie de la prochaine décennie“.
Mais ces start-ups ont-elles réellement les moyens de détrôner les grandes institutions financières ? Rien n’est moins sûr… D’après The Economist, elles “ne {seraient} pas en train de tuer les banques traditionnelles“, par exemple. En effet, aussi florissant soit-il, le business des Fintech reste assez limité en comparaison de ces dernières. Lending Club, une start-up financière parmi les plus avancées, a vu passer sur sa plate-forme neuf milliards de dollars. Un chiffre en apparence énorme, mais qui n’a encore rien à voir par exemple avec les 885 milliards de dettes contractées par cartes de crédit aux États-Unis.
Deux services complémentaires
Certains arguent que plutôt que de supplanter les banques les Fintech leur seraient plutôt complémentaires. Square, qui a lancé un petit lecteur de carte bleu mobile, en facilitant l’accès aux paiements bancaires pour les petites entreprises, va notamment booster le volume des transactions financières des banques. La complémentarité entre les deux serait parfois si forte que des banques n’hésiteraient plus à racheter des start-ups pour améliorer leur qualité de service. En effet, une petite firme américaine, est ainsi passée sous le joug du groupe espagnol Banco Bilbao Vizcaya Argentaria (BBVA) en mars 2014, et ce, après un petit versement de 117 millions de dollars.
Pour The Economist, vouloir remplacer les institutions traditionnelles serait non seulement peu réaliste, mais aussi néfaste pour le consommateur : “si les Fintech devenaient un jour la principale source de capital pour les ménages et les entreprises, l’industrie établie se transformerait en une espèce de système bancaire limité“, explique le journal.
Perrine Signoret
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