“Un petit pas pour la politique, un grand pas pour la concertation sociale”
Le gouvernement étudiera en comité restreint le premier accord intervenu au sein du Groupe des dix au sujet des adaptations pour la période transitoire des fins de carrière et l’harmonisation du statut ouvriers-employés. Il proposera dans les prochains jours un rendez-vous aux partenaires sociaux.
Le gouvernement recevra lundi prochain l’avis du Conseil d’Etat sur les six arrêtés royaux approuvés préalablement en première lecture. Le ministre de l’Economie et de l’Emploi Kris Peeters a confirmé jeudi que la représentante du groupe des dix, Michèle Sioen, lui avait annoncé un premier accord sur les fins de carrière et la finalisation de l’harmonisation du statut ouvriers-employés.
Ce premier accord a “un impact limité”, a admis Kris Peeters qui y voit plutôt une importance symbolique alors qu’il était devenu difficile de se faire rencontrer patrons et syndicats. “C’est un petit pas pour la politique mais un grand pas pour la concertation sociale”, a commenté M. Peeters. Le gouvernement examinera à présent s’il peut soutenir ce premier accord négocié entre partenaires sociaux.
Kris Peeters a également souligné l’importance du rapport technique du conseil central de l’économie qui doit permettre au patronat et aux représentants des travailleurs de se mettre à table sur une éventuelle négociation salariale.
Un peu plus tôt dans la journée, Kris Peeters avait annoncé sur son compte Twitter: “Groupe des 10 parvient à un accord statut ouvriers-employés + 6 Arr Royaux. Résultat très positif. #begov en discute”.
Le Groupe des 10, qui réunit au plus haut niveau les représentants du patronat et des syndicats, s’était réuni mercredi soir. A l’issue de cette entrevue, la président du Groupe des 10, Michèle Sioen, avait fait état de “progrès” enregistrés dans la concertation sociale. “Cette réunion est la preuve que la concertation sociale n’est pas morte”, avait-elle ajouté.
Le contenu de l’accord
Les partenaires sociaux réunis au sein du Groupe des 10 ont conclu un compromis sur les éléments manquants du statut unique ainsi que sur la prépension et les emplois de fin de carrière. Ces derniers éléments ont été coulés dans des arrêtés royaux.
Employeurs et syndicats ont convenu que chacun pouvait encore conclure, jusqu’au 30 juin 2015, une convention collective de travail (CCT) qui autorise la prépension à 60 ans. Le gouvernement Michel voulait ramener l’âge de la prépension à 62 ans à partir de 2015. Les candidats à la prépension reçoivent donc un répit de six mois.
Par ailleurs, des CCT-cadres ont été conclues au niveau du Conseil national du travail (CNT) pour la période 2015-2016. L’une d’elles confirme la prépension à 58 ans pour le travail lourd, le travail de nuit, la construction et en cas de carrière longue. Une autre CCT-cadre règle la prépension à 55 ans pour les entreprises en restructuration ou en difficultés. Ce type de prépension intervient un an plus tôt que le projet du gouvernement qui voulait porter cet âge à 56 ans.
“Avec une CCT-cadre, il existe une porte, mais qui ne sera pas automatiquement ouverte. La commission paritaire du secteur doit l’ouvrir via une CCT-sectorielle”, explique Marc Leemans, président de la CSC. Une CCT-cadre doit être adaptée ou prolongée tous les deux ans.
Enfin, deux autres CCT-cadres ont été conclues sur les emplois de fin de carrière, offrant la possibilité de réduire le nombre d’heures de travail jusqu’à la pension. Pour des groupes spécifiques comme les travailleurs exerçant un travail lourd, de nuit ou ayant une carrières longues, une possibilité d’emploi de fin de carrière est prévue à partir de 55 ans, si la commission paritaire du secteur donne son feu vert. Le gouvernement voulait amener cette éventualité à 56 ans. Pour les entreprises en difficultés ou en restructuration, ces emplois de fin de carrière sont possibles à partir de 55 ans.
Les partenaires sociaux ont enfin conclu un accord sur les éléments manquants de l’harmonisation des statuts ouvriers et employés.
“Un pas dans la bonne direction”
“Grâce à la mobilisation et aux actions des nombreux affiliés et militants, La FGTB se réjouit de voir la concertation sociale prendre la bonne direction”, indique le syndicat socialiste à l’issue de la concertation sociale du Groupe des 10.
“Les interlocuteurs sociaux au Groupe des 10 sont parvenus à un compromis sur la proposition du ministre de l’Emploi sur les principaux détails de la 1ère phase dans l’harmonisation Ouvriers/Employés et sur plusieurs arrêtés-royaux. La FGTB peut marquer son accord sur cette proposition parce qu’elle répond, en plusieurs points importants, aux attentes des travailleurs. Plus particulièrement en ce qui concerne le débat sur la fin de carrière, le ministre de l’Emploi et les organisations patronales ont fait preuve de perspicacité”, estime la FGTB.
Le syndicat socialiste estime que ce compromis a montré que “la concertation sociale était essentielle”. “Nous espérons que le gouvernement examinera de façon constructive les autres exigences des syndicats et réitérons notre volonté de pouvoir rediscuter des mesures d’austérité drastiques de l’accord de gouvernement”, ajoute encore le syndicat.
“Mini-compromis, pas de grand accord”
Selon le président de la CSC, Marc Leemans, il s’agit d'”un mini-compromis, pas un grand accord sur de grands principes”. Il semble tempérer l’enthousiasme d’un nouvel élan pour la concertation sociale après les actions syndicales de ces dernières semaines. “Je ne préviens personne, mais je suis réaliste”, dit-il.
M. Leemans confirme qu’un résultat a été atteint au sein du Groupe des 10 mais qu’il s’agit, selon lui, d’un “mini-compromis” dans le meilleur des cas. “La concertation a eu lieu parce qu’il fallait trouver une solution pour les éléments manquants du statut unique”, indique le président de la CSC.
Quant à un nouvel élan de la concertation social, Marc Leemans estime que cela dépendra des ouvertures qui seront créées au sein du gouvernement. Cela sera évalué début janvier.
“Une étape importante dans la normalisation du dialogue social”
L’administrateur délégué de la Fédération des entreprises de Belgique (FEB), Pieter Timmermans, est lui satisfait de l’accord conclu entre syndicats et employeurs qui a été transmis au gouvernement. “C’est une étape importante vers la normalisation des discussions entre partenaires sociaux”, a-t-il indiqué. “J’espère vraiment que ces actions et tensions sociales sont derrière nous”.
Selon M. Timmermans, les contours de l’accord de gouvernement ont été maintenus mais les modalités transitoires ont été affinées. Il renvoie notamment au règlement sur les prépensions et les fins de carrière. Les âges relatifs à la fin de carrière vont être élevés mais il y a eu un accord sur les mesures de transition.
Les partenaires sociaux ont aussi conclu un accord sur l’harmonisation des statuts ouvriers et employés. “Il y a finalement plus de clarté sur la compensation financière pour les entreprises qui emploient beaucoup d’ouvriers et qui subissent des coûts supplémentaires en raison de la suppression du jour de carence”, explique encore M. Timmermans. Anciennement, lorsqu’un ouvrier était malade, son employeur ne devait pas lui payer de salaire garanti le premier jour. Avec l’harmonisation des statuts, les ouvriers reçoivent leur salaire le premier jour de maladie comme les employés. Une enveloppe de 80 millions d’euros avait été précédemment annoncée pour les coûts liés à la suppression du jour de carence mais pas encore mise en oeuvre. “Cela se concrétisera désormais ces prochains jours”, conclut le patron de la FEB.