MolenGeek: des start-up pour redorer l’image de Molenbeek

© Molengeek/startup

Pour aider les jeunes de Molenbeek, commune à la mauvaise presse et qui compte l’un des plus hauts taux de chômage du pays, quelques entrepreneurs testent un remède : l’esprit start-up. Insuffler l’envie d’entreprendre pour pousser les habitants à s’en sortir et pour faire parler de Molenbeek autrement. Voilà la philosophie de MolenGeek.

Voir son nom cité sur les antennes de CNN, mentionné par la BBC et même évoqué dans certains médias japonais. L’exploit aurait de quoi griser les responsables des relations publiques les plus doués. Mais quand il s’agit de pointer du doigt une commune comme base arrière du djihadisme, c’est forcément moins réjouissant. Molenbeek campe, sans conteste, sur la première place des communes belges les plus – tristement – connues depuis l’attaque de Charlie Hebdo et les attentats de Paris et, plus récemment, de Bruxelles. Un bad buzz qui mine évidemment la population de la commune, déjà en prise avec le deuxième taux de chômage le plus élevé du pays.

Des projets portés par des femmes

Pour enrayer cette spirale négative et donner une image positive de la commune, un groupe d’entrepreneurs issus de Molenbeek, emmenés par Ibrahim Ouassari et Julie Foulon, se sont regroupés pour y insuffler l’esprit start-up et pour ” susciter l’envie d’entreprendre auprès d’une population qui n’est pas forcément familière à cet univers “. Sous la bannière MolenGeek, l’initiative se décline sous forme de start-up week-ends et d’hackathons (sorte de stage de codage pour mettre sur pied des applications ou des logiciels). A la fin du mois de janvier se tenait le deuxième start-up week-end de MolenGeek, après un test en mai 2015. Au total, une quarantaine de participants, dont une majorité de femmes (25), se sont retrouvés pour imaginer des projets d’entreprises.

MolenGeek: des start-up pour redorer l'image de Molenbeek
© Molengeek/startup

” Le vendredi soir, les participants ont pitché leur idée devant l’ensemble des candidats et des organisateurs, se souvient Ibrahim Ouassari. Il y a eu des projets technologiques et des projets non technologiques. Au total, sur 32 idées, sept projets ont été retenus dont six portés par des femmes. ” C’est que, à en croire le responsable de MolenGeek, ” les femmes de Molenbeek ont envie d’entreprendre “. ” Souvent, si elles portent le voile, explique-t-il, elles se voient confier des jobs où elles sont cachées, dans des call-centers par exemple ou n’ont pas de travail. Elles veulent prendre leur destin en main et ont plein d’idées. Tester l’entrepreneuriat leur plaît et deux des participantes au week-end MolenGeek sont même prêtes à quitter leur job pour se lancer dans l’aventure. ”

Pendant 54 heures, les équipes encadrées par des coaches de différents horizons ont abordé l’ensemble des questions liées au développement d’entreprise : mise en place du business, réflexion marketing, établissement du plan financier, etc. Un jury a ensuite récompensé les projets les plus porteurs. Parmi les membres de ce jury, des entrepreneurs issus de Molenbeek, des représentants des partenaires (KBC, Impulse Brussels) ou encore du cabinet du ministre Alexander De Croo. De ces différentes idées, certaines continuent leur bonhomme de chemin. L’une d’elles, Asas (lire l’encadré ” Trois idées nées de MolenGeek “) a été incubée au sein du Microsoft Innovation Center et des contacts auraient d’ores et déjà été pris avec de grands noms comme Proximus et KBC pour des partenariats potentiels. Un autre projet, MyShoesing, a quant à lui trouvé sa place au sein de l’incubateur StartIT-KBC dont Julie Foulon est devenue community manager.

Devenir un véritable incubateur

La philosophie positive du week-end a rapidement trouvé écho auprès de sponsors dans l’univers de la techno et de l’entreprise : Microsoft, Google, Dell, KBC, etc. Entre prêt de matériel, prise en charge du catering, les ” parrains ” ont soutenu à différents niveaux ce projet ponctuel de week-end MolenGeek. Pour ” plusieurs dizaines de milliers d’euros “, précise Ibrahim Ouassari. Mais le duo à la tête de l’initiative compte aller plus loin. Pour l’instant, le projet prend la forme d’une association de fait, mais les statuts d’une ASBL sont déjà rédigés et prêts à être déposés. Cela permettra de structurer le projet qui, jusqu’ici, est financé par les deux coordinateurs de MolenGeek qui y consacrent la majeure partie de leur temps libre. Mais ils vont avoir besoin de financement.

S’ils ont déjà inauguré un petit espace de coworking de 65 m2 à deux pas du canal, l’objectif est d’arriver à disposer de 50 places assises. Pour parvenir à un tel aménagement – dont les plans sont d’ores et déjà prêts -, les organisateurs espèrent trouver un minimum de 100.000 euros. Ils ont pris contact avec le cabinet d’Alexander De Croo ainsi qu’avec des partenaires privés. MolenGeek deviendrait alors le principal espace de coworking à Molenbeek et surtout la base arrière d’une jeunesse entrepreneuse et passionnée de technologie dans la commune.

MolenGeek: des start-up pour redorer l'image de Molenbeek
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Dans ce fief, Ibrahim Ouassari et Julie Foulon comptent également développer une série de services à destination des nouveaux entrepreneurs : cours de codage, formations, accompagnement, etc. A terme, MolenGeek doit (à son échelle) développer un véritable écosystème pour les start-up, au même titre qu’un Co.Station ou Start it @ KBC, mais pour des projets qui en sont aux balbutiements (très early stage, donc). D’ailleurs, comme Julie Foulon travaille en free-lance pour Start it @ KBC en tant que responsable de la communauté, les ponts sont d’ores et déjà créés.

L’idée serait que des projets porteurs nés en son sein puissent, par la suite, rejoindre des incubateurs adaptées à des start-up plus mûres. Et le carnet d’adresses de la jeune femme sera, inévitablement, mis à profit pour parvenir à regrouper des coaches et des partenaires. Il faut dire que Julie Folon a, pendant plus de trois ans, endossé le titre de managing director du célèbre BetaGroup, une institution dans l’univers des start-up. Et elle continue d’animer Girleek, une communauté de femmes passionnées par la technologie. Autant dire que MolenGeek s’appuie sur une ambassadrice de choix. Super-VRP, elle n’hésite d’ailleurs pas à relayer les détails de la prochaine initiative de MolenGeek : un hackathon qui se tiendra à la fin du mois d’avril.

“Hackathon” pour aider les services d’urgence

Le thème de ce nouveau projet ? ” Aider et optimiser les services d’urgence en cas d’opérations de secours “. Concrètement, les participants seront invités à apporter des réponses technologiques à des problématiques que rencontrent les services de secours. ” Il s’agit évidemment d’une réaction que l’on voulait apporter aux attentats du 22 mars, souligne Ibrahim Ouassari. Une sorte de message positif de la part de Molenbeek face aux événements. Nous sommes en contact avec une série d’hôpitaux afin de comprendre leurs besoins et on compte bien arriver à ce qu’à la fin du week-end de l’hackathon, on ait des résultats concrets. Et, pourquoi pas, qu’un des projets puisse vraiment être utilisé en situation réelle par la suite. “Les inscriptions sont ouvertes et pas seulement à la communauté molenbeekoise. Mais si, bien sûr, c’est sur l’ouverture des jeunes de Molenbeek à l’écosystème start-up que misent les fondateurs de l’initiative, un projet dont on devrait encore souvent entendre parler, tant leurs initiateurs sont motivés.

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