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COP21 : les géants de l’énergie, sponsors ou faux frères ?

S’il s’agissait d’une opération marketing, EDF et Engie (pour ne citer qu’eux) en ont plutôt pris pour leur grade en choisissant de sponsoriser la grande conférence de Paris sur le Climat, la COP21, qui s’ouvrait ce lundi 30 novembre.

Accusés de greenwashing par la plupart des activistes environnementaux, ces importants contributeurs à l’organisation d’un événement dont la facture totale s’élève tout de même à 170 millions d’euros ne sont effectivement pas les champions en matière d’écologie. “Autant engager un renard pour garder un poulailler”, ironisait la directrice d’un groupe environnemental qui a fait le compte : en exploitant ensemble quelque 44 centrales au charbon, Engie et EDF émettent 190 mégatonnes d’équivalent carbone par an, ce qui correspond à peu près aux émissions annuelles de la Belgique entière. Pour les activistes, l’immixtion de ces “faux frères” dans le contexte de la COP21 ne serait qu’un moyen d’en influencer l’issue, et certainement pas dans le bon sens.

COP21 : les géants de l’énergie, sponsors ou faux frères ?

Ce serait toutefois avoir un raisonnement un peu court. Car la transition énergétique ne pourra être réussie qu’avec le concours des plus gros acteurs du secteur — et les difficultés que rencontrent actuellement les énergéticiens traditionnels sont bien la preuve qu’ils n’ont pas d’autre choix que d’y participer. Les profits tirés de la production conventionnelle et centralisée d’électricité se réduisent à vue d’oeil. Désormais, il n’est pas un énergéticien européen qui ne se lance dans les services — isolation, installation de compteurs intelligents, fourniture de pellets, etc. — ou qui n’investisse dans les systèmes de gestion d’un réseau de production décentralisée, tôt ou tard constitué d’un mix de photovoltaïque, d’éolien, de microturbines, d’installations de cogénération, d’unités de stockage, etc.

Soyons réalistes : vu la corrélation positive qui existe entre la taille d’une entreprise et sa capacité à créer de la valeur et à investir, ce ne sont pas tant les myriades de start-up “durables” qui résoudront le problème du réchauffement climatique, que l’élan de quelques grosses entreprises ou industries, si tant est qu’elles considèrent le renouvelable comme une — voire la seule — source de profit à long terme. Et si le politique se met d’accord sur un principe généralisé d’intégration des externalités négatives — ces coûts environnementaux liés aux émissions de CO2 — dans le prix de l’électricité, nul doute qu’elles arriveront à cette conclusion.

Ceci amène à penser que le prix directeur du marché de l’énergie ne dépend pas tellement de la structure de ce marché (en termes de concurrence) mais plutôt du couple “technologie + décisions politiques”. Or, dans ce dernier registre, il faut bien admettre que l’Europe et la Belgique en particulier ne sont pas, non plus, de grands champions.

D’ailleurs, lundi, si notre pays écopait du “prix fossile” à Paris, c’est principalement en raison de l’incapacité de nos quatre gouvernements à trouver un accord pour la répartition de l’effort environnemental que notre pays s’est engagé à fournir en mars dernier. Face à une prise de conscience globale des enjeux climatiques et de la nécessité d’une mutation, force est de constater que les réponses politiques apportées sont très différenciées, peu coordonnées, voire parfois contradictoires. Que des multinationales comme Engie et EDF sponsorisent une conférence visant précisément à ce que les gouvernements du monde entier posent des choix communs et concertés n’est pas surprenant ni même condamnable : c’est plutôt le signe positif qu’une industrie tout entière n’attend qu’un signal pour entamer sa mue.

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