Comment Liège et Brussels Airport se sont tiré une balle dans le pied

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Brussels Airport a confirmé le départ des vols cargo d’Ethiopian Airlines. C’est la conclusion d’une guérilla menée entre les aéroports de Liège et de Zaventem. À la fin du compte tout le monde risque d’y perdre. Peut-être même plus qu’on ne le pense.

Voilà un lobbying qui tourne plutôt mal. L’aéroport de Liège et surtout son premier client, TNT Airways, ont fini par obtenir le départ d’Ethiopian Cargo de Brussels Airport, qui volait pour le compte de DHL. Et qui concurrençait les vols longs courrier de TNT Airways vers Dubaï, Hong Kong et Shangai. Ethiopian Cargo déménage à Maastricht et devrait continuer ses vols dans un climat plus serein. En Belgique la compagnie africaine obtenait ses autorisations de vols mois après mois, à titre de charter, avec le risque de ne plus les voir renouvelées par la ministre de la mobilité, Jacqueline Galant, soumise à la pression des élus liégeois et de TNT Airways.

Le patron de Brussels Airport , Arnaud Feist, déplore une décision en mettant en avant les emplois perdus (100 à 400, selon les sources). Il va aussi perdre les redevances générées par ces vols.

Plusieurs balles dans le pied ?

Les protagonistes de l’affaire se sont tiré une balle dans le pied. Peut-être même plusieurs. TNT Airways pensait écarter un concurrent, avec l’argument de l’emploi à Liège, en utilisant les subtilités du droit aérien, qui permet de canaliser la concurrence avec les compagnies non européennes. Or Ethiopian Cargo devrait continuer ses activités à Maastricht, à 30 km de Liège, toujours pour DHL. La concurrence continuera.

Deuxième balle dans le pied (potentielle) : Ethiopian Cargo est aussi un bon client de Liège Airport. Ce qui place ce dernier dans une position inconfortable, car il est intervenu dans l’affaire, défendant son premier client, TNT Airways, contre les intérêts d’un autre client. Va-t-il le garder ? Notre excellent confrère, Patrick Anspach, de l’Echo, prédit un nouvel épisode fâcheux : “il se dit que la compagnie d’Addis Abeba pourrait quitter Liège également. Il semblerait en effet que Maastricht lui ait ouvert toutes grandes ses pistes, sans condition, pour des vols à destination de l’Asie et du Moyen-Orient et sans escale en Ethiopie.” Aucune confirmation n’a été apportée. Maastricht et Liège ne sont distants que de 30 km.

Le sort incertain de TNT Airways

Enfin, pour terminer, le sort de TNT Airways, le pourfendeur d’Ethiopian Cargo, est un grand point d’interrogation. Fedex est en train de racheter TNT, le dossier est en cours d’examen à la Commission européenne, et semble en bonne voie. Étant une compagnie américaine, Fedex ne pourra conserver la compagnie TNT Airways, qui sera mise en vente. Son activité future n’est pas claire, car Fedex dispose de ses avions et de ses pilotes et de divers accords pour pouvoir voler dans l’UE bien qu’il s’agisse d’un groupe américain. Le sujet inquiète particulièrement l’association belge des pilotes (Belgian Cockpit Association, BeCA), qui demande à la Commission européenne se pencher sur le sujet dans le cadre de l’acquisition de TNT. TNT Airways est l’une des rares compagnies aériennes basées en Belgique, qui emploie 270 pilotes.

L’affaire est aussi un avertissement pour les politiques qui développent l’idée d’imposer aux compagnies une répartition entre les grands aéroports du pays : ne faire du cargo qu’à Liège, du low cost qu’à Charleroi, des vols réguliers “traditionnels” qu’à Brussels Airport. Cette manière de réguler la concurrence peut être rejetée par les compagnies. Le cas d’Ethiopan Cargo montre qu’elles décident seules des destinations qui leur conviennent. Quitte à aller ailleurs, juste de l’autre côté de la frontière, quand le tarmac y est moins hostile.

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