7 conseils pour prévenir le burn-out cet été

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Les chiffres parlent d’eux-mêmes : les cas d’épuisement professionnel (ou burn-out) sont en constante augmentation parmi les travailleurs belges. Avant de se consumer littéralement de l’intérieur, l’heure est à la prévention. En cette période de vacances, que mettre en oeuvre pour recharger ses batteries ?

“Pour 2017, le coût total de l’incapacité de travail est estimé à 7,96 milliards d’euros. C’est la première fois de l’histoire que ce coût dépasse celui des allocations de chômage “, affirmait fin juin Kris Peeters, ministre en charge de l’Emploi et de l’Economie. Or, le burn-out (en première position) et le mal de dos (deuxième sur le podium) sont les causes les plus importantes d’absentéisme au travail. En 2015, selon les chiffres de l’INAMI, 8.208 travailleurs belges ont été victimes de burn-out (avec un arrêt de travail de plus d’un an), soit près du double de personnes par rapport à 2010 (4.574 cas d’épuisement professionnel). Des chiffres qui reflètent une évolution de nos manières de travailler, mais qui témoignent aussi d’une meilleure connaissance de cette maladie et donc d’un diagnostic plus fréquent par les médecins généralistes.

Des témoignages de “burnies”

Au lieu de se morfondre sur cette réalité, Anne Everard a décidé de prendre les choses en main en publiant un guide de survie à destination de ceux qui souffrent d’un burn-out ou qui pourraient en vivre un. L’auteur n’est ni médecin ni psychologue, mais n’est pas parvenue à se lever un matin, terrassée par le burn-out. Trois ans plus tard, Anne Everard publie le Guide du burn-out. Comment l’éviter, comment en sortir ? , un livre basé essentiellement sur des témoignages de burnies (ce petit surnom inventé par l’auteur pour désigner les personnes victimes de burn-out). D’après l’auteur, ” tous les burnies passent par les mêmes émotions et les mêmes étapes. D’où l’intérêt de les mettre en lumière pour prévenir et guérir cette maladie “.

Prévention estivale

Au coeur des vacances scolaires, comment recharger ses batteries ? Que mettre concrètement en place pour prévenir l’apparition d’un burn-out ? Ce guide pratique ainsi que Patrick Mesters, psychiatre, directeur et fondateur de l’EuropeanInstitute for Intervention & Research on Burn Out répondent à ces interrogations.

1) Comprenez les causes du burn-out

” Pour comprendre l’origine du burn-out, souligne le Dr Mesters, il faut le percevoir dans une approche globale. Le burn-out a une dimension personnelle et professionnelle, psychologique et physique, individuelle et sociétale, mais aussi biologique. ” Sur le plan professionnel, les principales causes de burn-out sont l’accélération du rythme du travail, l’hyper-connectivité, la perte de reconnaissance et de sens, et le débordement de la vie professionnelle sur la vie privée. ” J’étais hyper-connectée en permanence, témoigne Olivia. De la maison, je me connectais à l’ordinateur du boulot, et du boulot à celui de la maison : penser à réserver ceci, payer cela, prendre rendez-vous, chercher un stage pour les enfants, etc. On jongle avec tout, jusqu’au jour où ça commence à poser un vrai problème. ” Un surinvestissement dans sa vie privée peut aussi mener à une surchauffe généralisée : ” Un mois avant mon burn-out, une dame qui s’occupait de mes enfants quelques heures par semaine m’a fait faux bond, explique Anne. Plutôt que de faire appel à la garderie, j’ai choisi d’aller les chercher à l’école moi-même. Du coup, mon travail avançait moins bien, et je travaillais le soir et le week-end. ” S’ajoutent à la liste : les causes individuelles, c’est-à-dire la résistance de chacun face à la pression, et les causes sociétales, soit les conséquences de l’ère du ” toujours plus, toujours mieux en moins de temps “.

2) Détectez les signes du burn-out

7 conseils pour prévenir le burn-out cet été
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” Trois types de signes doivent vous inciter à consulter votre médecin généraliste “, note le Dr Patrick Mesters, ” l’épuisement physique (fatigue dont on ne récupère pas, douleurs sans diagnostic, troubles de la concentration, du sommeil, etc.), l’épuisement émotionnel (agressivité, cynisme, déshumanisation, etc.) et le désengagement (perte du sentiment de réalisation professionnelle pour des employés normalement brillants et motivés) “. Le Maslach Burnout Inventory (MBI) est un test d’évaluation du burn-out qui permet de détecter ces signes. En 22 questions, votre médecin généraliste peut évaluer votre état sur la base de trois paramètres : le sentiment d’épuisement émotionnel (vous sentez-vous vidé après une journée de travail ? ), la déshumanisation (craignez-vous que votre travail vous endurcisse émotionnellement ? ) et l’accomplissement personnel au travail (avez-vous l’impression d’avoir une influence négative sur vos collègues ? ).

3) Déconnectez-vous

Depuis le 1er janvier 2017, la législation française autorise les travailleurs d’entreprises de plus de 50 salariés à se déconnecter de leurs applications professionnelles. Sans mode d’emploi précis, ce ” droit à la déconnexion ” invite l’employeur à définir des modalités précises pour déconnecter ses équipes. En Belgique, cette loi n’existe pas encore, mais Kris Peeters souhaite suivre la tendance française. En attendant, durant vos vacances, faites une détox numérique, fuyez votre smartphone, délaissez votre ordinateur professionnel, désactivez vos e-mails sur votre téléphone, etc. ” Les petites consultations intempestives réactivent le stress provoqué par le travail. Or, il est nécessaire d’y couper court “, conseille le Dr Mesters.

Le burn-out est la première cause d’absentéisme au travail.

4) Gardez une bonne hygiène de vie

Une bonne hygiène de vie permet d’accroître la résistance de l’organisme au stress et vous prémunit de nombreuses maladies dont le burn-out. ” La liste est longue, sourit le Dr Mesters. Mangez correctement, pratiquez un activité sportive régulière, évitez les excès, ayez une passion dans la vie, gardez des relations avec votre entourage, et maintenez une activité intellectuelle ou spirituelle pour conserver un sens à votre vie (philosophie, sophrologie, bénévolat, etc.). ” Les vacances représentent le moment idéal pour instaurer ces nouvelles bonnes habitudes au quotidien.

5) Apprenez à vous ennuyer

” Même si ce n’est pas dans vos habitudes, durant les vacances, prenez le risque de vous ennuyer “, répète le Dr Mesters. Cela vous permettra de libérer de l’espace dans votre esprit pour réfléchir, de prendre de la distance et de commencer à mettre des pistes en place pour la rentrée. Comment s’ennuie-t-on ? Promenez-vous, parlez avec votre entourage, isolez-vous de temps en temps pour entrer en contact avec vous-même. Bref, réservez-vous des moments de retrait.

6) Consolidez vos liens

Lorsque l’épuisement professionnel se déclare, le lien avec soi et avec les autres est perdu. ” La personne qui souffre de burn-out ne se reconnaît plus, perd la plupart de ses contacts sociaux, ne trouve plus de sens à son travail, et est déconnectée de ses valeurs et de ses priorités “, explique le Dr Mesters. En vacances, reprenez contact avec vous-même et avec les autres en planifiant des moments de qualité avec vous, votre famille, votre couple et vos amis.

7) Planifiez le retour au travail

Durant les vacances, vous avez plus de temps que durant le reste de l’année. Profitez-en pour planifier, dans votre futur agenda, des moments où vous ne ferez rien ou, du moins, des moments de réflexion et de détente hors du travail. Planifiez par exemple vos séances de sport, achetez déjà un abonnement de théâtre ou de cinéma pour vous réserver des moments de qualité en couple ou entre amis. ” Par ailleurs “, ajoute le Dr Mesters, ” apprenez déjà à dire ‘non’ aux sollicitations futiles et mettez un cadre afin de ne pas être submergé dès la rentrée “.

Par Lauranne Garitte.

Quand il est trop tard…

Le livre d’Anne Everard est un précieux outil pour ceux et celles qui souffrent déjà d’un burn-out. Dans les témoignages, ils trouveront certaines résonances avec leur propre expérience. L’auteur pointe du doigt différentes priorités du burnie au fil de sa guérison.

Priorité 1: rétablir l’énergie

“Le burnie a tellement puisé dans son fût d’énergie qu’il l’a, pour un temps, presque entièrement vidé”, explique Anne Everard. “J’ai dormi des centaines d’heures, je n’en avais jamais assez, témoigne Olivia. Rien qu’à l’idée de regarder un livre ou un écran, mes yeux se fermaient.” Pour rétablir cette énergie, l’auteur invite à appliquer la théorie du fût : il est nécessaire de le remplir presque complètement, de puiser le moins possible dedans, avant de pouvoir redémarrer. Sans cela, le burnie évoluera de rechute en rechute.

Comment remplir ce fût d’énergie ? En se mettant en mode “survie”, c’est-à-dire en faisant le strict minimum en fonction de ses capacités. Le reste du temps, le repos est le seul remède. “Pour moi, le mode survie équivalait à une grosse activité par jour (au mieux) comme aller au supermarché ou me balader doucement pendant une heure”, témoigne Catherine. Petit à petit, l’énergie revient, tout en fluctuant. Acceptez donc que ce processus prend du temps ! “En général , note le Dr Mesters, il faut environ six à huit mois d’absence avec accompagnement pour un burn-out grave.”

Priorité 2 : se faire aider

Plus tôt on attaque le problème, plus vite on s’en remet. Votre médecin généraliste est le premier interlocuteur avec qui vous devez faire un bilan de santé. Ensuite, le thérapeute (psychiatre ou psychologue) spécialisé dans le burn-out vous aide à répondre à plusieurs questions (Pourquoi je ne me suis pas écouté ? Après quoi je courais ? Que pensent les autres de moi ? ). “Le burn-out, c’est une remise en question majeure. Il est important de se reposer (pour le cerveau), mais aussi d’analyser les raisons qui nous ont menés à l’effondrement”, raconte Agnès. “Cette psychologue m’a appris à identifier mes sentiments, à comprendre mes pensées et à corriger mes comportements”, témoigne Jean. Le Dr Mesters conseille d’ailleurs de se diriger vers des psychologues comportementalistes qui cherchent à éliminer le comportement gênant ou inadapté plutôt que de chercher l’origine du trouble via la psychanalyse.

Priorité 3 : introduire les changements

“Le burn-out est un dysfonctionnement d’un ou de plusieurs systèmes : professionnel, familial, privé, individuel, explique Anne Everard. Identifiez le ou les systèmes qui ont dysfonctionné chez vous. C’est là que vous devez apporter les changements nécessaires .” Le burn-out est l’occasion rêvée de changer les choses pour repartir du bon pied.

Que changer ? Apprenez à vous arrêter et vous reposer, réconciliez-vous avec votre corps (en pratiquant la marche, les auto-massages, la sophrologie, la méditation, etc.). Misez également sur une bonne alimentation et une bonne hygiène de vie pour gagner de l’énergie. Remettez-vous au centre de votre vie pour repartir d’une feuille blanche : “Depuis mon burn-out, expose Jean, je choisis de manière beaucoup plus consciente ce que je fais ou ne fais pas.” Apprenez à dire “non” à votre employeur, à vos collègues, à vos amis, à vos enfants, à votre famille. En disant “non” aux autres, vous dites “oui” à vous-même. Ramenez aussi du plaisir dans votre vie dès que votre fût d’énergie est rempli. A vous de choisir la passion qui vous animera.

La reprise du travail est une période stressante, mais si c’est le bon moment, cela vous donnera de l’énergie. En accord avec votre médecin ou thérapeute, évaluez s’il est temps de retourner travailler. Pour passer ce cap, faites-vous aider par un coach professionnel. Et travaillez autrement via une nouvelle attitude, un nouveau job, un nouvel environnement professionnel, etc.

La théorie des petites cuillères

Initialement conçue pour expliquer l’impact d’une maladie chronique (lupus) sur l’énergie, la théorie des petites cuillères est applicable au burn-out. Toute personne en bonne santé se lève le matin avec cinquante petites cuillères. Pour chaque action entreprise, elle utilise une ou plusieurs petites cuillères : prendre sa douche, se rendre au bureau, participer à une réunion, prendre part à une dispute, s’amuser à une soirée bien arrosée, etc. A la fin de la journée, elle a utilisé à peu près toutes ses petites cuillères, elle est fatiguée et va se coucher. Le lendemain, elle se lève avec un nouveau stock de cinquante petites cuillères. Le burnie,lorsqu’il se couche, n’a aucune idée du nombre de petites cuillères dont il disposera au réveil. Au début du burn-out, il se réveille avec environ trois petites cuillères. Le lendemain, il en a plus. Un autre jour, il en a moins. Au fil de sa guérison, son énergie fluctue. En mode survie, leburniedoit donc réfléchir à la façon la plus économe d’utiliser à bon escient chacune de ces cuillères d’énergie.

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