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Wall Street: les révélations perturbantes d’un financier “repenti”

Entendre un financier dire du mal de la finance ou plutôt de la Bourse est extrêmement rare, surtout si ce financier est une légende de la finance. C’est portant ce qu’a fait John Bogle (1), le fondateur du fameux groupe financier Vanguard.

A 85 ans, John Bogle n’a en fait plus rien à perdre et peut se permettre de dire la vérité, sa vérité. Qu’a dit, en substance, ce gourou ? Pour lui, c’est simple, Wall Street ne sert à rien. Pire encore, l’industrie financière pour laquelle il a pourtant travaillé pendant des années serait, selon lui, tout juste parasitaire.

Bien entendu, il ne se contente pas de le dire, il essaie aussi de le démontrer via des chiffres. Donc selon lui, pas moins de 32.000 milliards de dollars de titres – autrement dit, des actions et des obligations – sont échangés tous les ans à Wall Street mais avec très peu d’impact positif pour l’économie. C’est étonnant, car le discours officiel que l’on retrouve dans tous les manuels qui parlent de la Bourse, c’est que justement la Bourse sert au moins à une chose fondamentale : financer les entreprises, et notamment celles en croissance.

Or, justement, d’après John Bogler, ce n’est pas ce que fait la Bourse aujourd’hui. Pour lui, 99% de ce qui se fait dans l’industrie financière consiste en des échanges d’une personne avec une autre dans le seul intérêt, je le cite (1), de l’intermédiaire. Il en résulte un gâchis considérable. Traduis en termes simples, notre financier “repenti” nous dit que ces 32.000 milliards de dollars de titres qui sont échangés chaque année à Wall Street (pour rappel, ce montant correspond à deux fois le PIB des Etats-Unis, soit deux fois la richesse annuelle de la première puissance économique mondiale), servent de rente à une industrie financière qui prend un pourcentage sur chaque transaction.

On peut voir cela comme une sorte de péage à l’achat et à la vente. Pour John Bogle, les traders, à l’inverse des analystes financiers, n’ont aucune valeur, ils ne savent pas quelles sont les actions qui vont grimper ou baisser, mais ils gagnent à la baisse et à la hausse. Sa vérité, c’est que les grandes banques d’investissement américaines pourraient travailler une semaine par an seulement et fermer le reste du temps sans que cela ait la moindre conséquence sur l’économie réelle. Evidemment, les experts qui écoutent cette chronique ne seront pas d’accord et diront que ces banques ont un rôle (assurer la liquidité par exemple). Il n’empêche, entendre un homme âgé de 85 ans, qui a très bien réussi dans la finance et cela, au plus haut niveau mondial, dire que la finance – telle qu’elle est pratiquée aujourd’hui – n’apporte rien à l’économie réelle, c’est perturbant !

(1) Why 99 of trading is pointless, John Bogle, sur le site de marketwatch.com, et de slate.com

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