Les Bourses chinoises s’effondrent à nouveau, les marchés mondiaux dévissent

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Les marchés mondiaux étaient une nouvelle fois sévèrement ébranlés ce jeudi par l’impressionnante déroute boursière en Chine, où la séance a duré moins d’un quart d’heure avant d’être interrompue après une chute de 7%.

L’indice composite de la Bourse de Shanghai a plongé de 7,32% ce jeudi matin avant l’interruption des échanges pour la journée, déclenchée par un nouveau mécanisme “disjoncteur” automatique visant à réduire la volatilité des marchés.

“L’accentuation de la volatilité des Bourses chinoises demeure presque certaine durant le premier semestre 2016, étant donné (le recul) de la croissance du PIB et la pression persistante sur le taux de change”, a estimé jeudi Brian Jackson, de l’institut IHS Economics.

“Pour l’instant, la réforme boursière chinoise va demeurer une affaire compliquée”, a-t-il souligné.

Les marchés mondiaux souffrent

Cette deuxième interruption de séance en moins d’une semaine inquiète les investisseurs quant à la portée du ralentissement de l’économie chinoise, un des poumons de la croissance économique mondiale.

En Asie, Tokyo a fermé en repli de 2,33% et Hong Kong a perdu plus de 3%.

En Europe, les places ont ouvert en très forte baisse. Dans les premiers échanges, Paris dévissait de 2,50%, Francfort et Milan de plus de 3% et Londres de près de 2%. Les Bourses de Stockholm, Oslo et Helsinki ont, elles, chuté de plus de 4%.

“La Chine a un très gros problème d’ajustement”, a déclaré le fameux milliardaire investisseur américain George Soros. “Je dirais que c’est bien une crise. Quand je regarde les marchés financiers, je vois une situation sérieuse qui me rappelle la crise que nous avons eu en 2008”.

Pékin prolonge des restrictions de vente

Par conséquent, la Chine a prolongé des restrictions de ventes par les actionnaires ce jeudi, à la veille de l’expiration d’une interdiction.

Appliquée depuis juillet pour six mois, l’interdiction fait partie d’un arsenal nourri de mesures pour contrer la spectaculaire débâcle de l’été 2015, lors de laquelle les places boursières chinoises ont vu s’envoler plus de 3.200 milliards de dollars en valeur.

Elle empêche les “gros actionnaires” — ceux possédant plus de 5% dans une entreprise cotée — de vendre leur participation, et son expiration programmée vendredi 8 janvier avait suscité les craintes des courtiers face à une possible vague de ventes, impossibles jusqu’alors.

Cette interdiction sera désormais remplacée par une règle empêchant ces actionnaires de vendre plus de 1% de l’entreprise tous les trois mois, a annoncé la Commission de régulation des marchés financiers (CSRC) sur son site internet. Ils seront également tenus d’annoncer toute vente 15 jours de cotation à l’avance.

Aucune date d’expiration n’a été annoncée pour cette nouvelle règle, sous-entendant qu’elle sera appliquée sur le long terme.

La CSRC a déclaré que la mesure permettrait de stopper une vague de vente d’actions, d’aider à stabiliser le marché et de “désamorcer les sentiments de panique”. La commission a également souligné que “l’équipe nationale” (organismes publics et courtiers achetant des actions pour le compte du gouvernement, NDLR) “ne stoppera pas (sa mission)” et que son rôle de stabilisation du marché se poursuivra.

Le brut flanche

Le pétrole, dont l’offre est toujours aussi abondante, était aussi tiré vers le bas par la Chine alors même que les tensions diplomatiques dans le Golfe seraient de nature à faire monter les prix.

Les cours du brut continuaient de flancher: le baril de Brent de la mer du Nord pour livraison en février perdait 1,58 dollar à 32,65 dollars par rapport à la clôture de mercredi, au plus bas depuis plus de 11 ans, et le WTI cédait 1,77 dollar à 32,20 dollars.

Le marché des devises était aussi secoué d’autant que l’étincelle qui a mis le feu au poudre jeudi a été la décision de la Banque centrale chinoise de dévaluer à nouveau le yuan.

Les autorités ont en effet abaissé le cours de référence du yuan face au billet vert de 0,51%, à 6,5646 yuans pour un dollar, soit le taux le plus bas depuis mars 2011. Il s’agit du huitième mouvement de baisse consécutif décidé par la banque centrale.

C’est aussi sa plus forte baisse depuis août, selon Bloomberg News, quand Pékin avait décidé d’une dévaluation-surprise du renminbi de quasiment 5% en une semaine. Le yuan est autorisé à fluctuer face au dollar dans une marge de plus ou moins 2% de part et d’autre d’un taux de référence défini par la banque centrale chinoise (PBOC).

Le dollar s’affaiblissait face au yen et à l’euro notamment, et le franc suisse, traditionnelle valeur refuge, se renforcait.

“Dans ce contexte de tensions financières renouvelées en Chine, l’euro et le yen remontent face au dollar, ce qui est souvent le cas dans ce type de situation car les investisseurs rapatrient leurs liquidités des zones stressées. La baisse du yuan alimente la baisse du pétrole, qui alimente elle-même la chute des marchés”, selon les analystes d’Aurel BGC.

“Cocktail dangereux de nouvelles menaces”

L’or, autre valeur refuge, progresse sensiblement depuis le début de l’année, passant d’environ 1.060 dollars l’once à pratiquement 1.100.

Ces turbulences chinoises viennent assombrir un panorama déjà un peu encombré, et où croît le risque géopolitique en provenance du Golfe et de Corée du Nord.

“C’est déjà une semaine à oublier”, a estimé Michael Hewson, un analyste de CMC Markets en évoquant une “multitude d’inquiétudes au sujet des tensions entre l’Arabie Saoudite et l’Iran, la bombe nord-coréenne et l’économie chinoise qui maintiennent les investisseurs dans un mauvais climat”.

Plus largement, la Banque mondiale (BM) a fortement abaissé mercredi sa prévision de croissance dans le monde pour 2016, renforçant les craintes suscitées par les performances “décevantes” des grands pays émergents dont la Chine et le Brésil.

Après avoir crû de 2,4% en 2015, le produit intérieur brut (PIB) mondial devrait progresser de seulement 2,9% cette année, marquant un recul de 0,4 point par rapport aux prévisions de l’institution en juin, selon un rapport semestriel publié mercredi.

Le chancelier de l’Échiquier George Osborne, devait faire également part d’un certain pessimisme jeudi. “L’an passé fut la pire pour la croissance mondiale depuis la crise et cette année débute avec un cocktail dangereux de nouvelles menaces. ( ) Cette année n’a que sept jours, et déjà nous avons des nouvelles inquiétantes sur la chute des marchés action à travers le monde, le ralentissement de la Chine, des problèmes sérieux au Brésil et en Russie”, selon le texte de de son discours.

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