Le secteur de la construction met en garde le gouvernement wallon: “Un risque de crise” 

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Olivier Mouton
Olivier Mouton Chef news

Risque d’une réforme mal ajustée des droits d’enregistrement, primes à la rénovation revues, plan de relance recalibré: si les intentions générale sont bonnes, le diable se cache dans les détails, prévient Hugues Kempeneers (Embuild). Ces réformes pourraient provoquer une crise ou un ralentissement de la transition en Wallonie. 

Souvent, le diable se cache dans les détails. Tel est le sentiment d’Hugues Kempeneers, patron de Embuild Wallonie, fédération régionale de la construction, à la lecture de la déclaration de politique régionale et à l’écoute des premières annonces faites par le gouvernement d’Adrien Dolimont. L’intention générale de cet accord MR- Engagés est bonne, précise-t-il d’emblée, mais quelques points précis pourraient nuire à la dynamique économique, voire semer des germes de crise. 

Ses points d’attention concernent la réforme des droits d’enregistrement, les primes à la rénovation ou encore le resserrement du plan de relance. 

Droits d’enregistrement: deux pièges 

Hugues Kempeneers nous a contacté après l’annonce de la baisse de fiscalité annoncée sur les droits d’enregistrement pour le 1er janvier 2025: ils passeront de 12% à 3%. “C’est positif, mais attention, toutefois, à ne pas limiter cela aux seuls primo-acquéreurs, comme j’ai pu le lire ça et là, nous dit le directeur général d’Embuild. On risquerait de geler le marché. Si je m’en tiens aux termes de la DPR, il est question de l’achat d’une ‘habitation propre et unique’, c’est tout.” 

La nuance est importante car dans le cas de l’habitation “propre et unique”, souligne-t-il, on accélère le marché en donnant la possibilité, par exemple, à un étudiant d’acquérir un kot avec 3% de droits d’enregistrement, puis un studio l’année suivante, puis un appartement lorsqu’il fait sa vie… Même chose pour des personnes âgées qui décideraient En clair, ces 3% seraient d’application pour chaque achat, pour autant que cela serve de résidence. “Cela permettrait d’augmenter le nombre de transactions”, insiste-t-il. Pour s’assurer de la bonne interprétation de la règle, il a pris sa plume pour interroger le ministre-président. 

De même, la volonté gouvernementale de proposer un texte pour la fin de l’été, déjà, est sans doute un bon signal, mais attention de “ne pas confondre vitesse et précipitation”. Depuis l’annonce de cette réforme, le secteur est sous tension”, constate-t-il. Avec ses collègues notaires et agents immobiliers, ils craignent un déplacement des intentions d’achat et de vente susceptible de calmer excessivement le marché d’ici le 1er janvier 2025, avant une accélération qui pourrait provoquer une hausse des prix. 

Primes à la rénovation et plan de relance: deux dangers

L’autre enjeu majeur, outre l’aspect purement économique, concerne la transition écologique. “En Wallonie, un bâtiment sur deux date d’avant la Seconde guerre mondiale, rappelle Hugues Kempeneers. Pour atteindre les objectifs européens, vingt bâtiments devraient être rénovés toutes les heures.” C’est dire l’ampleur de la tâche. 

Or, on n’y accorde pas l’attention voulue. “Si les 3% de droit d’enregistrement sont actés, nous restons sur notre faim car nous demandions aussi un taux de 1% dans le cas où des travaux économiseurs d’énergie sont réalisés”, précise le patron de la fédération de la construction.” Embuild s’inquiète de la suppression des primes à la rénovation au profit de prêts et de garanties. La volonté ne serait pas suffisante pour mener à bien cette révolution du bâti wallon. 

Enfin, Hugues Kempeneers glisse encore son inquiétude de voir le plan de relance revisité en profondeur, avec certains projets susceptibles de passer à la trappe. “Ce serait préjudiciable d’abonner des projets pour lesquels des investissements ont déjà eu lieu pour le permis ou les travaux d’infrastructures préalables, notamment. En outre, pour le volet européen du plan de relance, la date couperet tombe en juin 2026: si le chantier n’est pas rendu à cette date, on risque de perdre les montants promis. Or, en matière de construction, un tel délai, c’est demain… Il faut accélérer tout ce qui peut l’être pour ces chantiers, y compris l’octroi des permis.” 

Le gouvernement Dolimont est prévenu: le secteur est bien bienveillant, mais vigilant.

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