A-t-on raison d’avoir peur en avion ?

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Vous devez prendre l’avion dans les prochaines semaines et les derniers incidents concernant les Boeing ont réveillé chez vous quelques angoisses ? Voici, en 3 points, pourquoi celles-ci sont, en grande partie, injustifiées.

Chute abrupte, arrachement d’une porte en vol ou incendie moteur au décollage : ces dernières semaines, les incidents dans des avions ont refait la une des médias. Doit-on s’en inquiéter ?  Voici quelques éléments qui remettent ces accidents en perspectives.

Rareté des incidents graves

On estime qu’il y a en moyenne 40 millions de vols commerciaux par an dans le monde avec un taux d’accident de 1 accident par million d’heures de vol. C’est là un chiffre global puisqu’il existe de fortes disparités régionales : 0,7 accident par million d’heures de vol en Europe, 0,4 aux États-Unis, plus de 13 en Afrique.

En moyenne, ce seraient 300 à 500 personnes qui meurent chaque année dans des accidents d’avion. C’est une moyenne large. Ainsi, en 2023, il n’y a eu « que » 72 personnes qui ont été tuées dans un accident d’avion commercial dans le monde, selon l’Association internationale du transport aérien (Iata), l’organisation qui fédère 320 compagnies représentant 83% du trafic de voyageurs sur la planète. Entre 2019-2023, la moyenne annuelle est de 38 accidents, dont cinq mortels, pour 143 victimes. Toujours selon cette association, une personne qui volerait tous les jours mettrait «103.239 ans en moyenne à subir un accident mortel».

Si le nombre de tué en avion est si faible, c’est parce que ce moyen de transport est scruté comme le lait sur le feu. De la conception de l’appareil à la gestion du trafic aérien, la sécurité est au cœur de l’industrie aéronautique. Ce qui ne veut pas dire qu’il n’y a jamais de problème. Il y en a, comme partout.

Selon le National Transportation Safety Board (N.T.S.B.), les causes typiques des accidents sont la turbulence, les atterrissages musclés, les collisions au sol avec d’autres avions ou véhicules et les défaillances de composantes comme un volet ou un moteur. La bonne nouvelle c’est que ces incidents, bien que parfois effrayants, sont généralement mineurs. S’ils doivent être étudiés et traités, ils ne mettent pas en danger la sécurité des passagers. D’autant plus que les avions sont pleins de ce que l’on appelle des systèmes de secours. Des systèmes qui, si un des éléments est défectueux, permettent de prendre le relais et de continuer à voler en toute sécurité. Tout cela fait que les décès et même les blessés liés à ces incidents sont extrêmement rares. Dans la plupart des cas, lorsqu’ils se rendent compte qu’il y a un problème, les passagers s’en sortent avec une belle frayeur. 

Ces soucis techniques provoquent par contre des milliers de retards et d’annulations quotidiennes à travers le monde. Avec une note salée à la clé pour le secteur. Quand les pilotes optent pour des vérifications par mesure de sécurité, il faut donc davantage y voir la preuve que d’un système qui fonctionne que des problèmes qui s’accumulent. Malgré les pressions croissantes et la chasse au coût des dernières années, la sécurité de l’aviation commerciale aux États-Unis s’est ainsi améliorée de plus de quarante fois au cours des dernières décennies.

Si l’on entend souvent que voler est plus sûr que la voiture ou le train, comparer les différents types de transport est compliqué. Même en se basant en nombre de décès par milliard de passagers-kilomètres parcourus, la comparaison est sujette à caution. Surtout en sachant que les chiffres peuvent fortement varier d’une année à une autre selon qu’il y ait eu de gros crashs d’avions ou non. Néanmoins, même si c’est comparer des pommes et des poires, signalons tout de même qu’il y a eu, en 2023 en Belgique, 36.855 accidents de la route selon Stabel qui vient de sortir ses chiffres sur le sujet faisant. Ces accidents ont fait au total 45.243 victimes. 3.261 (7%) d’entre elles étaient gravement blessées et 501 sont mortes (225 rien qu’en Wallonie).

Il n’y a généralement pas une seule cause

On l’oublie un peu vite, mais chaque avion défie la gravité. Or chaque jour, des milliers de vols ont lieu dans des conditions et des contextes extrêmement variables. Malgré les avancées technologiques, l’aviation reste donc complexe et dépend de plusieurs facteurs (humain, matériel, météo, ect). Les problèmes ont donc rarement une seule cause identifiable. Le plus souvent c’est un effet boule de neige qui rend un problème réellement dangereux.

Si les rapports suite à un accident ne pointent que très rarement un responsable, c’est aussi parce que cela encourage une certaine culture de la sécurité dans laquelle les gens sont prêts à signaler leurs préoccupations. Plutôt que de le cacher sous le tapis, chaque problème, même mineur, est relevé, analysé et sert ensuite à améliorer la sécurité. Plus que désigner un coupable, le rôle des experts est d’assurer que cela ne se reproduise plus.

Importance du contexte et biais de confirmation

La fréquence des problèmes rapportés concernant certains types d’avions (comme les Boeing 737 et Airbus A320) est en partie due à leur prévalence dans la flotte commerciale mondiale. Ils représentent plus de la moitié plus de la moitié des avions commerciaux en service, il est donc normal qu’on en parle plus.

Ensuite, balayons devant notre porte, les médias et le public peuvent être plus attentifs aux incidents impliquant une compagnie aérienne ou un fabricant particulier après un incident médiatisé. Ce qui peut exagérer la perception des problèmes, voire en imputer alors que le constructeur n’a aucun lien avec le problème mentionné.

Ce même biais fait aussi qu’on ne parle que rarement des améliorations réalisées suite à ces catastrophes. Les enquêtes sur les accidents prennent du temps et fournissent des recommandations de sécurité pour éviter de futurs incidents. Celles-ci sont par la suite le plus souvent implémentées, mais cette information n’atteint que rarement les médias qui sont déjà passés à autre chose.

En conclusion, soyez donc surtout prudent en vous rendant à l’aéroport. Et prenez aussi un peu de temps pour songer à votre empreinte carbone. Car l’écoanxiété a bien moins de contre-arguments. 

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