Sextoys de Luxe
Après des carrières réussies dans la mode, Lauren Verweij et Sarah Mountford ont pensé qu’il était temps de passer à un secteur plus satisfaisant, celui des sextoys de luxe.
C’est sur un rooftop d’Anvers qu’a germé l’idée de Self Studies, il y a plus de dix ans. Lauren et Sarah passaient la soirée chez leur amie Ilse Cornelissen (fondatrice de Graanmarkt 13) et la conversation a vite dévié sur les relations et le sexe. «À l’époque, nous avions de nombreuses amies qui traversaient des divorces effroyables. Toutes les trois, nous nous sommes interrogées à haute voix: qu’est-ce qui fait que les gens décident de se séparer après d’importants moments passés ensemble? Comment peut-on se perdre de la sorte? Nous avons également constaté qu’il n’existait pas de plateforme accessible, esthétique et woman-friendly pour celles qui souhaitaient explorer leur sexualité. Peut-être ces deux constatations étaient-elles liées?»
Nous sommes fières de proposer des produits que l’on peut simplement laisser sur la table de nuit
Et c’est ainsi que cette idée a lentement germé dans les esprits d’Ilse, de Lauren et de Sarah. Ilse était trop occupée avec Graanmark 13 et si cette aventure devait prendre vie, c’était à Lauren et Sarah de se lancer.
Bijenkorf
Elles sont amies de longue date. Elles se sont rencontrées dans le secteur de la mode. Sarah était acheteuse au département prêt-à-porter de De Bijenkorf. Un poste prestigieux, car quelle marque refuserait d’être représentée par De Bijenkorf? Sarah avait donc déjà été repérée par Lauren qui, elle, s’occupait des ventes pour la marque Anecdote à l’époque, et qui était donc impatiente de rencontrer Sarah. Cela semblait impossible jusqu’à ce que leurs deux fils se retrouvent dans la même classe. «Là, elle ne pouvait plus m’échapper, bien sûr», dit Lauren en riant. Et, peu de temps après, la marque Anecdote est apparue dans les rayons de De Bijenkorf. Mais les deux femmes avaient bien d’autres points communs que le côté fashion. La conscience que le rythme du secteur du vêtement était effréné et était trop polluant. La conscience, aussi, qu’elles n’avaient peut-être pas envie de faire ce travail jusqu’à la fin de leur carrière.
Rompre le train-train quotidien
La pandémie de COVID leur a soudain donné le temps de ralentir et de réfléchir. Les magasins fermaient et les carnets de commandes prenaient la poussière. «À ce moment-là, tout s’est précipité», explique Lauren. «Le net-à-porter de l’industrie du sexe s’est avéré inexistant, nous avons donc dû devenir ce sexe-à-porter.» Même si, depuis son lancement, il y a plus d’un an maintenant, Self Studies est devenu bien plus qu’un simple sex-shop en ligne. «Nous voulons vraiment miser sur la communication et le bien-être mental», explique Sarah, d’origine britannique. «Nous étoffons le contenu en publiant des conseils d’experts, mais nous vendons aussi des jeux de cartes de The School of Life, par exemple, qui incitent les couples à aborder les sujets les plus tabous. Lorsque nous organisons des pop-ups, nous trouvons particulièrement fascinant d’écouter les histoires de nos clients. Pendant les fêtes, nous avons, par exemple, reçu dans notre pop-up la visite d’une dame qui avait perdu son mari il y a un an. Elle n’avait jamais utilisé de gadgets intimes auparavant et préférait ne pas en acheter en ligne. Et demander aux enfants de commander ce genre de choses en ligne, c’est un peu délicat (rires). Nous avons longuement parlé avec elle et elle est repartie avec une sorte de vibro d’entrée de gamme. Quelques semaines plus tard, elle est revenue. Elle était enchantée. Ce genre d’histoires, nous en entendons tout le temps. Des célibataires qui redécouvrent le plaisir, des couples qui se redécouvrent, un train-train quotidien qui est rompu… Bien plus que dans le monde de la mode, nous avons aujourd’hui l’impression de faire une réelle différence dans la vie de notre clientèle.»
Force d’aspiration
Mais quelle est exactement la différence avec les sextoys que l’on achète partout ailleurs? «Déjà rien que l’aspect esthétique», explique Lauren. «Nous sommes fières de proposer des produits que l’on peut simplement laisser sur la table de nuit. Des objets qui pourraient faire partie de la déco. Souvent, nos produits ne sont pas associés au sexe du premier coup d’œil. Et cela plaît à certains publics. Par exemple, nous vendons énormément de petits gadgets aux femmes musulmanes qui ne peuvent pas transporter des vibromasseurs dans leur sac quand elles voyagent vers certaines régions. Si elles sont arrêtées avec nos sextoys, les douaniers ne savent souvent même pas de quoi il s’agit.» (rires)
Autre élément important à l’achat d’un sextoy aujourd’hui: le bruit. «Personne n’apprécie les bourdonnements trop sonores, la nouvelle génération de sextoys est extrêmement silencieuse.» Et puis last, mais certainement pas least: une technologie sensible qui tient compte des besoins et des désirs des femmes. «Les stimulateurs qui fonctionnent par aspiration d’air, un moyen très efficace de stimuler le clitoris, sont très appréciés. L’intensité de cette technique d’aspiration doit bien sûr être au point à 100%. Trop ou, au contraire, trop peu d’aspiration rendra vite l’effet, initialement agréable, irritant.»
Ce qui nous amène à la question la plus fréquemment posée à ce duo d’entrepreneuses. «Oui, nous testons tout nous-mêmes», et «non, nos maris ne se sentent pas menacés, ils y sont habitués maintenant» Se sentir menacé est pourtant souvent le premier réflexe des hommes lorsqu’ils découvrent Self Studies. «Nous sommes les premières à encourager les gens à découvrir nos produits ensemble, en couple. Et nous proposons aussi des produits pour les hommes.»
Image obscène
Bien que les affaires soient en plein essor, comme en témoigne la récente collaboration avec la marque de lingerie Love Stories, le lancement de Self Studies n’a pas été de tout repos. L’entreprise est entièrement financée sur fonds propres. Lauren et Sarah, depuis Amsterdam, sont les gestionnaires actives de l’entreprise et Ilse Cornelissen, propriétaire de Graanmarkt 13, occupe la fonction de partenaire silencieuse avec un rôle consultatif depuis Anvers. «Nous avons rencontré beaucoup d’obstacles en cours de route», dit Lauren. «Déjà rien que l’image de l’industrie du sexe. La situation s’améliore progressivement, mais il y a toujours ce petit côté obscène. J’ai moi-même mis longtemps à être à l’aise d’expliquer à mes amis et à ma famille ce que je faisais exactement. Mais c’est passé, j’assume complètement aujourd’hui. J’en suis même fière.»
Un autre obstacle auquel se heurtent les deux femmes est l’interdiction de parler explicitement de sexe sur les réseaux sociaux. «Nous ne pouvons pas publier de messages à propos de notre activité principale sur instagram par exemple. C’est une réglementation obsolète: comme si tous ceux qui travaillent dans le monde du sexe avaient de mauvaises intentions. Au contraire. En période de burn-out et de dépression, une vie sexuelle saine est d’autant plus importante.»
www.selfstudies.com, une sélection de produits est également en vente au Graanmarkt 13 à Anvers, www.graanmarkt13.com
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