Olivier Mouton
Cher Alexander, on vous prend au mot…
Si votre désarroi est celui-là, peut-être vaudrait-il mieux en tirer les leçons et vous retirer ?
Cher Alexander. Votre lettre ouverte aux Belges, diffusée dans plusieurs quotidiens ce samedi 22 juillet, pose un constat que l’on ne peut que partager. Vous regrettez qu’en politique, « les attaques personnelles prennent trop souvent le pas sur les arguments » ou que « la classe politique est parfois tellement préoccupée par elle-même qu’elle en oublie les gens et les causes qu’elle doit servir ». Franchement, on ne peut mieux dire.
Ce constat, nous le faisons trop souvent. Cela vous honore de le reconnaître, mais à vrai dire, c’est un terrible aveu d’impuissance, aussi. N’êtes-vous pas à la tête du gouvernement depuis près de trois ans ? Si votre désarroi est celui-là, peut-être vaudrait-il mieux en tirer les leçons et vous retirer, comme votre homologue néerlandais Mark Rutte a eu le courage de le faire ?
Il n’y aura donc pas de réforme fiscale durant cette législature. A vrai dire, au vu de la dernière épure qui était sur la table, nous en sommes en partie soulagés. La volonté initiale de faire un tax shift et non un tax cut était regrettable, dans un pays où le niveau de taxation est déjà difficile à soutenir. Des hausses de fiscalité allaient handicaper davantage certains secteurs déjà fragilisés dans les loisirs ou les médias, notamment. Et pourquoi n’avez-vous pas couplé cela à une discussion plus large sur des réductions de dépenses ou des mesures en faveur de l’emploi ? Pourquoi ne pas avoir profité de cette fin de législature pour initier un nouveau pacte socio-économique avec les Belges ?
Cette absence de réforme est toutefois regrettable et préjudiciable. La suppression des « pièges à l’emploi », cet écart trop peu important entre les allocations sociales et les bas salaires, est une priorité depuis longtemps et tout le monde s’accorde à ce sujet. Le Conseil supérieur de l’emploi vient encore de rappeler que les pénuries d’emploi, qui prévalent dans plus de 150 métiers, deviennent un handicap pour notre économie. C’était le moment ou jamais pour montrer votre volonté de réformer sans tabou. Sans doute le poids du PS était-il trop important au sein de votre coalition pour avancer sur tous les tableaux ?
Cher Alexander, on a envie de vous prendre au mot quand vous affirmez ne pas être résigné et avoir l’envie de vous engager sans relâche au service d’une « politique meilleure ». Nous espérons que Paul (Magnette), Georges-Louis (Bouchez) et les autres se convertiront à votre volonté. C’est évidemment un peu tard : il reste moins d’un an de législature et le dernier chantier qu’il vous reste à accomplir n’est autre que de remettre le budget sur les rails en trouvant un milliard, au moins. Ce qui risque de ne pas être une partie de plaisir, ni pour vous, ni pour la population.
Mais chiche… Nous espérons assister à cet esprit de concorde retrouvé, mais nous attendons surtout de votre part et des présidents de parti dont Bart (De Wever) et Paul qui joueront un rôle essentiel, un engagement important. Le 9 juin 2024, nous irons voter. Puisse le choix des électeurs dégager des majorités viables, et peut-être composée d’un nombre moins important de partis. Mais au-delà des crises – merci, en passant, d’avoir géré la pandémie et l’inflation –, nous attendons du monde politique d’être conscient des défis de l’heure. Climat, économie, fiscalité, avenir du pays, etc. : promettez-nous, oui, une « politique meilleure ». Et si vous vous sentez trop impuissant pour la mener à bien, surtout, n’hésitez pas à nous le dire. Et soyons-en sûrs, Bart, Paul et Georges-Louis piaffent d’impatience si cela devait être le cas.
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