Amid Faljaoui
USA: assassiner un patron pour lutter contre la cupidité de son entreprise?
Le meurtre d’un homme, quel qu’il soit, est évidemment condamnable et ne peut pas être justifié par quoi que ce soit. Sauf visiblement aux États-Unis où, Brian Thompson, le patron de UnitedHealthcare, l’une des plus grandes compagnies d’assurances des États-Unis, a été abattu ce 4 décembre de sang-froid en plein Manhattan.Please write your introduction text here
L’émoi est grand à Wall Street de voir l’un des leurs, un patron de 50 ans, être abattu en plein jour à New York, sans même parler bien entendu de la douleur de sa famille. A peine 5 jours plus tard, l’assassin est retrouvé grâce au travail remarquable de la police. Mais là, c’est l’étonnement : le profil de l’assassin ne correspond pas à ce qu’on aurait pu imaginer. Il s’agit de Luigi Mangione, un jeune homme de 26 ans, au physique de jeune premier, diplômé d’une des meilleures universités de la région, et fils d’une famille riche et influente de la région de Baltimore.
Mais les médias américains découvrent aussi rapidement que ce jeune assassin souffrait d’un très fort mal de dos.
Le profil surprend le public, mais très vite, à l’inverse de Wall Street et de la Maison-Blanche qui se montrent choqués, les internautes montrent leur soutien à ce jeune assassin. L’une des raisons, qui explique cette immoralité soudaine des internautes, est liée au fait que le motif de ce jeune assassin est connu: il est un pourfendeur du système d’assurance américain. La preuve? Les enquêteurs ont retrouvé (sur les douilles qui ont été fatales à ce patron d’une compagnie d’assurance) trois 3 mots inscrits au marqueur: deny, defend, depose (autrement dit, refuser, défendre et faire une déposition).
C’est une référence à un livre publié en 2010 aux États-Unis et qui dénonçait les méthodes des assureurs américains pour ne pas honorer les demandes d’indemnisation de leurs clients. « Delay, deny, defend », ces 3 mots résument la thèse de l’auteur de ce livre et sont selon lui, une manière d’augmenter les profits des assureurs américains, en retardant le paiement des demandes justifiées (delay), ces mêmes compagnies refusent entièrement le paiement (deny) et ensuite, ces mêmes compagnies d’assurance défendent leurs actions en forçant les demandeurs à engager des poursuites judiciaires coûteuses (defend).
Ces 3 mots, couplés à un texte virulent anti-assureurs retrouvé dans les affaires du jeune assassin, il n’en fallait pas plus pour que la toile demande la libération du jeune homme, qu’elle voit plus en Robin des bois qu’en assassin. En quelques jours, ce dernier est devenu l’idole des réseaux sociaux américains et des produits dérivés à son effigie se sont retrouvés sur des sites comme Amazon ou eBay.
Vu d’Europe, une telle attitude est sidérante : comment peut-on en effet utiliser la violence pour lutter contre la cupidité supposée d’une entreprise d’assurance ? Mais au-delà du drame humain, cet horrible fait divers montre aussi l’une des faiblesses principales du système social américain : aujourd’hui, si vous êtes âgé et vulnérable, il vaut mieux vivre en Europe qu’aux États-Unis. Le rappel est important en ces temps où l’Europe semble décrocher face aux États-Unis sur le plan économique. Malgré les alertes et les critiques contre ces abus et excès aux États-Unis, le taux de refus de demandes d’autorisation préalable d’assurés seniors pour des soins est passé de 10% à 20% au sein de UnitedHealthcare. Certains y voient aussi une corrélation directe avec l’automatisation du processus de décision, établi par l’intelligence artificielle.
Triste histoire, mais pleine d’enseignements pour nous autres européens.
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